Monnaie de singe
Un métrage, une image : Un jour au cirque (1939)
Les multiples Marx n’amusaient guère
Mayer, qui leur colla aux basques un Buster Keaton déjà sur le déclin, réduit
au triste statut de gagman à
distance, voire en concurrence avec ce type de comique(s). Éclairé par Leonard
Smith, partenaire régulier du précité, de plus DP des Poupées du diable
(Browning, 1936), d’un diptyque exotique (Tarzan s’évade + Tarzan
trouve un fils, Thorpe, 1936, 1939), sa direction artistique supervisée
via l’incontournable et bien nommé
Cedric Gibbons, At the Circus possède ainsi le professionnalisme impersonnel
d’un produit MGM, en l’occurrence chapeauté par Mervyn LeRoy, pas encore aux
prises avec les fauves de Quo vadis (1951). Derrière la caméra, l’obscur Edward Buzzell, (dé)formé à Broadway ; devant, trois grands garnements, face à trois
femmes fréquentées, fréquentables, certes à fond faire-valoir, mais jamais
dérisoires : la fidèle Margaret Dumont, veuve joyeuse aux fêtes
francophiles onéreuses, l’aussi scénique Florence Rice, écuyère éprise et sincère,
la svelte, vénale et inversée Eve Arden, croisée après chez Preminger (Autopsie
d’un meurtre, 1959), Mann (La Vénus au vison, 1960) ou Kleiser (Grease,
1978). Le métrage d’un autre âge, sorti en simultané au côté du plus côté Magicien
d’Oz (Fleming, 1939), tandem
musical Arlen & Harburg et cher scénariste Irving Brecher (non crédité) en
commun, sucrerie conservatrice propice à séduire le cynique Louis B.,
pourvoyeur de pilules pour la dépressive Judy, s’intitule ici Un
jour au cirque, il pouvait plutôt s’appeler Un voyage en train, point
hitchcockien, à quête et enquête de dérobé butin. Si le fabuleux Freaks
(Browning, 1932), autre production de la firme au fameux lion, du temps
d’antan, c’est-à-dire celui d’Irving Thalberg, qualifié illico de génie par Groucho, ennemi sous le signe de Laemmle d’un
certain von Stroheim (Folies de femmes, 1922), rival
éphémère puisque maladif de LBM, choqua les bonnes âmes, causa le scandale,
l’anecdotique At the Circus courroucera, n’en doutons pas, notre modernité
victimisée, à l’hypersensibilité mal placée, car un nain, pardon, une personne
de petite taille, écrivons de manière politiquement correcte, chouette, met la
main sur le pognon planqué au creux de la cage du gros gorille, lequel, en
définitive, en coda, le récupérera, le recomptera, oui-da, car des Noirs s’y
cantonnent à incarner les barmen en
costume immaculé, une chorale orchestrale et chorégraphiée improvisée, en plans
débullés, à proximité du primate, de la monnaie, d’une remorque peinte occupée
par les félins affirmés africains, à transformer fissa la nounou désormais
reloue de Autant en emporte le vent (Fleming, 1939) en modèle de
progressisme. Tandis que Chico joue du piano, Harpo de la harpe, Richard
Rodgers côtoie Richard Wagner, une berceuse de Brahms la balèze Marseillaise. Conte conventionnel
carburant de surcroît à la romance à la noix, opus superficiel ponctué de chansons à la con, tradition de la maison, At the Circus s’avère
vite un véhicule quasi ridicule, assez éventé, ce dont semblent
conscients les principaux intéressés, en service minimum, trio à la gomme. Démuni de la moindre empathie vis-à-vis
du milieu décrit, décharné de la plus chétive anarchie, pas de désordre social,
party + pari réussis, l’ouvrage
provoque pourtant une poignée de sourires, parvient à déployer durant le climax de l’ultime séquence une énergie presque burlesque. Trop posé, trop poli, il s’agit en résumé d’une occasion
manquée, d’un humour corseté, à l’instar de la cabine riquiqui du mimi mini, d’où éternuement d’ouragan…
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