Anne, ma sœur Anne
Cinéma, si Mina…
À la mémoire d’Olivia
Newton-John
De 1959 à 1977, on savoura souvent
Mina au cinéma, surtout suivant les génériques, en musique de source dite ou non diégétique. Ensuite, diverses décennies davantage qu’avéré oubli, elle revint à
l’instar d’un refrain, chez Almodóvar (Matador, 1986 + Douleur et Gloire, 2019,
sympho Donaggio) & Scorsese (Les Affranchis, 1990, placée sous le
signe céleste de Gino Paoli), Turturro (Passione,
2010) & Watts (Spider-Man: Far from Home, 2019), tant mieux ou hélas.
Auparavant, elle traversa L’avventura + L’Eclipse (Antonioni,
1960, 1962), fit un (quarante-cinq) tour et des détours au fil des filmographies
de Fulci, Paolela, Petri (La Dixième Victime, 1965), Risi,
Bertolucci, Festa Campanile, Bolognini. On connaît pire pedigree, pourtant tout ceci, auquel rajouter quelques caméos, rôles
classés premiers, de la publicité dirigée par Zurlini, un fameux voyage (de
Mastorna, voire Manara) avorté de Fellini, ne retiendra notre attention ni
notre oreille aujourd’hui. Il suffit parfois d’un titre à succès pour une trace
laisser au sein de la collectivité ; Mina nous en offrit trois, pas les
plus connus, parmi les plus bienvenus. Si celle de Sylvia Kristel connut la
postérité un peu beaucoup usurpée que l’on sait (Emmanuelle, Jaeckin,
1974), celle quasi confidentielle de
l’obscur Canevari (Moi, Emmanuelle, 1969,
année érotique, Gainsbourg ne se goure) paraît s’apparenter à un opus pop
pasteurisé, à prétentions auteuristes, sinon antonioniennes. Heureusement, on y
retrouve dès le premier plan, à panoramique émétique, monologue guère drôle, de
bourgeoisie dépressive, l’appréciable Erika Blanc, muse de Bava (Opération
peur,
1966), Lenzi (Si douces, si perverses, 1969), épouse de Bruno Gaburro (Malombra,
1984). Flanquée des fidèles Antonio Amurri & Gianni Ferrio, parolier
précis, inspiré, compositeur assez estimable, a fortiori en compagnie
de la dame amicale, on recommande encore l’écoute des thèmes amènes de Cran d’arrêt (Tessari, 1971), L’homme sans mémoire (Tessari, 1974,
Rossella assure), La poliziotta (Steno, idem),
de l’incontournable Parole, parole, duo d’Alberto Lupo (La Bataille de Marathon,
Tourneur, 1959) puis parodie d’Adriano Celentano, Dalida & Delon bien sûr s’en
souviendront, Mina l’héroïne mutique questionne, de magistrale manière
douce-amère s’époumone, change de registre illico
à l’occasion du giallo La mort caresse à minuit (Ercoli,
1972), « vocalises » virtuoses via la Valentina de Susan Scott, donc « contre-éclairée »,
droguée au LSD. Entre les deux, portraits de femmes a priori fréquentables, demeure
le mélodrame masculin La mort remonte à hier soir
(Tessari, 1970), sur lequel moi-même je ne reviens, vous renvoyant vers le
texte précédent. À celui qui nie la nostalgie, valide l’irréversible, Tessari lyriciste, la
chanteuse somptueuse y souligne la disponibilité du passé, son enlacement au
présent. Jadis au téléphone addictif de Morricone, avec déjà ses octaves
triplés, ses sourcils rasés, sa blondeur décolorée, Mademoiselle Mina Anna
Mazzini, alors trentenaire sombre et solaire, dotée d’une sorcellerie sonore à
la Baudelaire, ne cesse de charmer, au sens surnaturel du terme, telle une
sirène capable de toutes les nages, ici parmi les eaux de BO, de torch song, du jazz. Tandis que
nous quitte l’aimable actrice mélodique, énergique et mélancolique, de Grease
(Kleiser, 1978) ou Xanadu (Greenwald, 1980), amitiés médicalisées à la compatriote
Kylie Minogue, cette trilogie très jolie ne sent le testament, puisque art
poétique et opératique, à plein transalpin, à diva tournée vers l’envie, la
vie, forme forte et fragile d’immortalité acoustique accordée.
Commentaires
Enregistrer un commentaire