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Affichage des articles du juillet, 2016

L’Ange du mal : Miracle à Milan

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Sous-titre ironique pour un ratage quasi intégral… Il fallut par conséquent – tu l’achètes en solde, tu le visionnes en DVD, stronzo français – subir jusqu’au bout (admirez notre conscience cinéphile, à défaut de notre exécrable morale citoyenne) de ses cent six interminables minutes (auxquelles rajouter la demi-heure des suppléments superfétatoires, supplice moins longuet, toutefois, que le contemporain pensum en deux parties sur le transformiste Jacques Mesrine commis par Jean-François Richet) ce téléfilm de luxe (champs-contrechamps scolaires, shaky cam à la Ridley Scott durant les braquages) baigné dans un bleu paresseux (ça fait riche et sérieux, ça affiche la couleur supposée du polar) et un glamour (les costards de marque, la came à s’injecter les yeux révulsés, les gonzesses à démailloter dans la piscine de parvenu, le fric comme un abus de friandises propice à de piètres rêves de réinvention existentielle et brésilienne, les truands entre eux, toujours un peu h

Contes et légendes du peuple corse : L’Île mystérieuse

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Géographie féminine, intérieure, d’une « patrie » problématique et d’un magnifique, authentique, morceau d’éternité… Le cinéma corse n’existe pas, et pour cause (un salut au Sempre vivu ! de Robin Renucci, au Silence d’Orso Miret). En littérature, le désert (des Agriates) paraît moins désolant mais la production demeure confidentielle et s’exprime souvent en français. Fabienne Maestracci, comme sa consœur Marie Susini, pratique itou cette langue (commune, partagée, autrefois imposée dans son monopole « républicain ») mais l’agrémente d’idiomatismes assez goûteux (clin d’œil à son activité passée de restauratrice). La seconde partie du titre renseigne discrètement sur son « engagement » nationaliste (on laisse au lecteur l’épuisant loisir d’apprécier, ou pas, la notion-nation de « peuple corse »). Car ce copieux – 59 entrées, 508 pages – double recueil très délectable, doté dans son humilité revendiquée d’une vraie qualité littéraire, abouché à la source d’un imaginaire tr

Mythologies : La Société du spectacle

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Un petit livre pertinent, clair et agréable, de sémiologie ? Sans doute, mais aussi et surtout, en bonne logique dite symbolique, un essai fragmenté sur le cinéma, art mythologique entre tous… 1 En France, on n’est pas acteur si l’on n’a pas été photographié par les Studios d’Harcourt. L’acteur d’Harcourt Mais le signe intermédiaire (la frange de la romanité ou la transpiration de la pensée) dénonce un spectacle dégradé, qui craint autant la vérité naïve que l’artifice total. Les Romains au cinéma Charlot a toujours vu le prolétaire sous les traits du pauvre : d’où la force humaine de ses représentations, mais aussi leur ambiguïté politique. Le Pauvre et le Prolétaire J’en viens à me demander si la belle et touchante iconographie de l’abbé Pierre n’est pas l’alibi dont une bonne partie de la nation s’autorise, une fois de plus, pour substituer impunément les signes de la charité à la réalité de la justice. Iconographie de l’abbé Pierre Le f

Noires sont les galaxies

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Entreprise mondialisée (aux oreilles vulcaines) ou sécession solitaire, l’aventure interstellaire demeure une épopée de proximité… Immanente, scintillante, la Mort sourit depuis ses hauteurs célestes et glacées. Dans la nuit enfin délivrée des lumières chaplinesques de la ville, les étoiles nous accueillent sur le seuil du sommeil. On perçoit leur souvenir, seulement la trace absente d’une présence illusoire, spectaculaire. Nul visage maternel n’apparaît sur le drap sombre pour nous bercer d’un « Rien ne meurt jamais » ; aucun « éléphant » ne rejoint le bestiaire astronomique garni d’ourses, de centaures, de bergers. Les hommes entendent aussi baptiser le ciel, tout ce qui gravite au-dessus de leur tête. Les animaux, les lieux, les villes, les événements, les sentiments, cela ne suffit pas, il faut encore que l’éther nocturne finisse dans un dictionnaire. Virus verbal transmis jusqu’aux astres, trajectoires terrestres calquées sur les parcours astraux, ou l’inverse. Exigence

Un jour sans fin

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Saisir l’esprit des séries… La série, chérie, nous donne rendez-vous, ordonne et rythme notre semaine. Dans sa multiplicité même, elle réapprend la fidélité programmée aux amoureux boulimiques du film unique. Si la pire chanson, structurellement, sartrienne ou pas, confère un sens (double acception) au temps hémophile, son retour hebdomadaire rassure et inscrit les vies des spectateurs dans l’ordre illusoire du calendrier. Tous les jours tendent vers celui des retrouvailles avec l’univers fictionnel superposé au nôtre, placé en regard de notre propre histoire, tel un miroir domestique, confortable, agréable, jusque parfois dans la reproduction stylisée de l’espace de visionnage, l’accord spéculaire entre la réception (de détente) et l’horizon (d’attente) : cas d’école de la mise en abyme du salon dans la sitcom . Les coffrets ou la VOD chamboulent en surface le planning établi par les chaînes sans remettre en cause le principe du découpage, du différé, de l’épisode suivant i

A Touch of Zen : L’Art de la guerre

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Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre de King Hu. Après le scorpion darwinien de Sam Peckinpah dans La Horde sauvage , l’araignée bouddhiste de King Hu (une double pensée aussi pour la toile enfantine et l’ogre puritain de La Nuit du chasseur , les insectes grouillant dans l’herbe américaine de Blue Velvet ). Imagerie liminaire et métaphorique d’un monde enragé, d’un combat à mener contre le Mal et/en soi-même. L’affolement d’une multitude de plans, montage ivre comme le « chat » masqué de l’hirondelle dorée (notre moine saignera d’or, croyez-le ou non). Montagne majestueuse, pluvieuse, paysage calligraphié rempli de brume et de vide, d’ombre et d’immobilité. Cette terre antique s’anime d’un mystère cinématographique, d’une bouleversante présence immanente ouverte sur la transcendance. La musique nous invite, l’absence humaine guide vers le fort fantomatique, ruines à ciel ouvert supposées hantées. Du foyer (maternel, matriciel