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Affichage des articles du mars, 2019

Froid comme la mort : Conte d’hiver

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Le rôle de sa vie, au risque du fondu au noir… Oh it gets dark it gets lonely On the other side from you Kate Bush Puisque l’on décèle ici des réminiscences de Chantage (1929), Une femme disparaît (1938), Rebecca (1940), Soupçons (1941), L’Ombre d’un doute (1943), La Maison du docteur Edwardes (1945), La Corde (1948), Le Grand Alibi (1950), Fenêtre sur cour (1954), Sueurs froides (1958), La Mort aux trousses (1959), Psychose (1960) et Complot de famille (1976), les critiques écriront « suspense hitchcockien ». Toutefois, Froid comme la mort (Penn, 1987) ne se réduit pas à ceci, s’inspire moins que plus du Calvaire de Julia Ross (Lewis, 1945), prénom de la victime et patronyme du toubib en rime, inclut une descente d’escalier à la Boulevard du crépuscule (Wilder, 1950), une audition annonçant l’homonyme de Miike (1999). Comme si tout cela ne suffisait pas, l’héroïne interprétée par Mary Steenburgen , elle-même vrai-faux sosie de Kate Bush, s’appelle

Les Complices de la dernière chance : Le Transporteur

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Soulever le capot, ouvrir son cœur, rouler plein pot, couler le moteur… Y a que les routes qui sont belles Et peu importe où elles nous mènent Jean-Jacques Goldman Si le terme chef-d’œuvre ne s’avérait pas aussi galvaudé, je l’emploierais volontiers à propos des Complices de la dernière chance (Fleischer, 1971) ; je me limiterai donc à écrire qu’il s’agit d’un grand petit film méconnu, mécompris, d’une leçon de réalisation, d’une réflexion en action(s) sur la solitude, la vieillesse, la famille, la fuite, surtout du temps, ce que souligne le titre original, programmatique, The Last Run . Bien avant The Hit (Frears, 1984), pareillement automobile, hispanique, davantage sardonique, Paris encore en perspective inaccessible, le film du cher Fleischer s’apprécie en polar existentiel, dont la course contre la montre, perdue d’avance, vous le savez, allez, se déroule dans un décor lunaire, s’achève dans un cimetière, puis sur une plage au sable de sarcophage. Scott, cond

Djinn : Inch’Allah dimanche

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À Dubaï, Tobe déraille… Ça vient de là-haut Comme le vent sur ma peau Le destin nous entraîne Comme une ritournelle Chimène Badi If I looked all over the world And there’s every type of girl But your empty eyes seem to pass me by And leave me dancing with myself Billy Idol Ce Djinn (Hooper, 2013) suit Djinns (Martin, 2010) et Djinn (Dufaux & Mirallès, 2001-2016), sans « événements » clivants, sans sensualité dessinée. Il s’agit de l’ultime film de Tobe, tourné aux Émirats arabes unis, produit par Image Nation, société déjà associée au Complexe du castor (Foster, 2011). Du fantastique arabophone sur fond de relooké, délocalisé, Rosemary’s Baby (Polanski, 1968) ? Pourquoi pas, dépaysement prometteur, possibilité d’un sang neuf épicé, métissé, en VOST, mais cela, hélas, ne fonctionne pas, clôt une courte carrière sur une note très mortifère. Certes, on décèle ici des échos assourdis des œuvres précédentes, par exemple l’ouverture solaire, cré

Héros : Moon

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  « Cannonerie » ? Reconnaissance… Pour mon père Des coups de poing dans l’âme Le froid de la lame qui court Chaque jour me pousse Un peu plus vers la fin Daniel Balavoine Doté d’un intitulé original programmatique, Héros (Tannen, 1988) fait s’affronter un flic « héroïque », médiatique, et un psychotique increvable. Il s’agit donc d’une réflexion en action(s) sur l’héroïsme et le traumatisme, la normalité et l’insanité, le deuil et la lignée. Il s’agit, aussi, d’une œuvre doublement méta, où le tueur se terre au sein d’un ciné rénové, se déplace derrière les cloisons, une pensée pour le Kinski de Crawlspace (Schmoeller, 1986), où Norris se met en danger, au propre, au figuré, décide, entre Portés disparus 3 (Norris, 1988) et Delta Force 2 (Norris, 1990), d’explorer de nouvelles voies, d’exposer la vulnérabilité de sa persona . Hero and the Terror hélas n’attira pas les foules, déçut sans doute les fans friands de coups de tatane, mais il représente une

All You Can Eat Bouddha : All Inclusive

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Perfidia dépourvue de perfidie… Curiosité concoctée par des Québécois à Cuba, All You Can Eat Bouddha (Lagarde, 2017) peut laisser certain spectateur sur sa faim, néanmoins ce premier met(rage)s ne manque pas de saveur(s), s’apprécie à sa juste valeur, c’est-à-dire à l’instar d’un rêve sensuel, funeste, doux-amer, agrémenté de sourires et de mystères. Dans un Palais a priori paradisiaque, en réalité promis à la ruine, la renaissance de persistance, le personnel et les touristes se fascinent, sinon se prosternent, pour un Français rétif, massif, fichez-moi la paix, mouais. Diabétique, boulimique et mutique, Mike dévore du sucré, du salé, du cru, du cuit, délivre une pieuvre parlante prisonnière sur la plage puis guérit aussitôt, de quelques mots, chuchotement à son oreille, une taciturne anorexique, au papounet très bronzé, reconnaissant, doté d’entregent. Autour de l’hôtel autarcique, le monde mute, « l’administration » se métamorphose, nouvelles révolutionnaires retransmi

Il était une fois un meurtre : L’Ami retrouvé

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Voir, ne rien voir, succomber, résister… The air is so heavy and dry Strange voices are saying (What did they say?) Things I can’t understand Bananarama Bien sûr, on ne peut pas ne pas penser à Memories of Murder (Bong, 2003), influence assumée de cinéaste méconnu, au Sang du châtiment (Friedkin, 1987), cf. la fête foraine funèbre, à M le maudit (Lang, 1931), nationalité commune, mais Il était une fois un meurtre (Odar, 2010) ne saurait certes rivaliser avec ces prestigieux prédécesseurs. Il s’agit davantage d’un exercice de style en widescreen , qui frise parfois le luxueux téléfilm, le mélodrame classé sociétal, diffusion du vendredi soir sur chaîne franco-allemande. Titre taciturne dont l’intitulé français, outre adresser un clin d’œil au polar sud-coréen précité, sous-entend adroitement la présence d’un ogre de conte défait, Das letzte Schweigen se termine en effet dans le silence, en zoom avant au carré, boucle bouclée de porte d’immeuble (re)fermée s

Fired : Ruby

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Destruction de l’entreprise et entreprise de destruction… Every day is like survival You’re my lover not my rival Culture Club Joy Mittal possède un patronyme fameux, vient de virer 121 employés, investit le bureau du boss , se came aux médocs, copine avec le vigile, finit tel le dessin sanguin de la prophétique photocopieuse furieuse. À moitié film, il se regarde en replay , sur des écrans de surveillance témoins de sa démence, mais une gosse décédée fixe l’objectif in extremis , confirme la hantise au lieu de l’hallucination. En vérité, peu importe la perspective, psychologique ou fantastique, puisque l’arriviste et le récit de sa longue nuit – de l’exorcisme, me souffle Fulci – carburent à la culpabilité. Film d’horreur dite économique, Fired (Warrier, 2010) rime à sa manière avec De gré ou de force (Cazeneuve, 1998) et The Belko Experiment (McLean, 2016) ; il s’agit, à nouveau, de donner à voir « la souffrance au travail », comme disent les sociologues. Ce pr