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Affichage des articles du décembre, 2017

Le Père Noël a les yeux bleus : Le Provincial

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Narbonne breakdown  ? Peut-être, adieu à la dynamite des Tontons flingueurs … Cela pouvait s’intituler Scènes de la vie de province , cela pourrait passer pour un univers parallèle d’Antoine Doinel, mais Eustache, ni Balzac, ni Truffaut, encore moins Vigo, possède sa propre personnalité, propose sa propre perspective. Le Père Noël a les yeux bleus se rattache à la Nouvelle Vague et s’en détache, fait du cinéma en paraissant faire du documentaire, s’autorise un discret clin d’œil méta – Léaud passe devant l’affiche des Quatre Cent Coups – et privilégie l’autobiographie. En 1966, deux Noirs élégants déambulent au début du moyen métrage, on s’enquiert du Cellule 2455 de Caryl Chessman et une blague zoophile durant la guerre d’Algérie remonte à la surface au bar hilare. Daniel veut s’acheter avant janvier un manteau de saison ; pour acquérir le désiré duffle-coat , il accepte l’embauche opportune d’un photographe sachant porter costume. Déguisé en père Noël de rue, pas vraiment

La Femme du boulanger : La Chatte à deux têtes

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Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre de Marcel Pagnol. On sait que Giono détestait La Femme du boulanger , transposition-trahison d’une « nouvelle » pas même citée au générique, en réalité d’un extrait de roman apparemment autobiographique. Si Regain réussissait in extremis à illustrer le panthéisme lyrique de l’auteur du Chant du monde et du réalisateur de Crésus , le métrage de cocufiage se rapproche davantage de la « comédie à l’italienne », avec son argument tragi-comique soutenant la peinture sociale. Réduire Marius à sa partie de cartes relève du risible et le retour du matou n’occupe que la coda, à peine huit minutes, allez. Précisons subito qu’elle ne pourrait être aujourd’hui reproduite à l’identique, merci au féminisme et à l’antiracisme, alors que le pacifique Pagnol utilise le terme « Nègres » tel Voltaire, souligne la ressemblance de tous les hommes, y compris en Asie, à peine distingués par la beauté, congédie les soupçons de misog

The Bigamist : Ordinary Decent Criminal

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Beauté(s) de la série B – à propos d’Ida Lupino (III)… Cette fois, voilà Ida derrière et devant la caméra. Cette seule fois, la réalisatrice dirige l’actrice, ou l’inverse. Au générique, on retrouve les noms du scénariste-producteur Collier Young, du compositeur Leith Stevens et George Diskant éclaira La Maison dans l’ombre . On pourrait être surpris par la présence de Joan Fontaine, d’ailleurs escortée de sa mère en caméo de proprio, star hollywoodienne d’origine britannique, pedigree presque en parallèle à celui de la Lupino, mais moins lorsque l’on sait que la muse de Hitchcock, Ophuls ou Richard Thorpe partageait alors maritalement les jours et les nuits de Mister Collier donc divorcé d’Ida… Un homme, deux femmes, San Francisco : cela évoque-évite Vertigo , quand bien même le métrage conserve une dimension méta de bon aloi, cf. supra , autocar touristique de piaules d’icônes sur Beverly Hills inclus + un clin d’œil à celle d’Edmund Gwenn, ici enquêteur d’adoption, ce

Le Voyage de la peur : Desperado

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Beauté(s) de la série B – à propos d’Ida Lupino (II)… Inspiré d’un fait divers, The Hitch-Hiker ne donne pas dans le spectaculaire mais au contraire dans la répétition et les variations, tout au long d’une funeste odyssée vers un éden incertain, rêve irréel de hors-la-loi aux abois. « This is the true story of a man and a gun and a car. The gun belonged to the man. The car might have been yours » nous avertit le lapidaire carton d’introduction, avant qu’un canon de revolver présageant celui de L’Impasse ne s’impose en gros plan, sur tout l’écran, moins directement dirigé vers le spectateur que pour Carlito Brigante, à l’agonie proustienne sur sa civière mémorielle. Le Voyage de la peur , traduction française hyperbolique et pourtant point inexacte, invite à se positionner à la « place du mort », littéralement, et peut apparaître en matrice apocryphe d’une longue et sanglante lignée matérialisant les noces nocives de l’asphalte et de la folie. On pense ici à Riders on the S

Outrage : Assaut

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Beauté(s) de la série B – à propos d’Ida Lupino (I)… Quand on ne possède pas d’argent, il faut avoir du talent. Actrice attachante, notamment chez Hathaway ( Peter Ibbetson ), Archie Mayo ( La Péniche de l’amour avec Gabin), Nicholas Ray ( La Maison dans l’ombre ), Aldrich ( Le Grand Couteau ), Peckinpah ( Junior Bonner, le dernier bagarreur ) et… Peter Falk ( Columbo ), Ida Lupino se réinventa scénariste-réalisatrice-productrice indépendante via sa société The Filmakers, placée sous l’égide de la RKO. Accompagnée de son mari Collier Young, le créateur de L’Homme de fer , et du producteur-auteur Malvin Wald, connu pour La Cité sans voiles , elle dirige un film court et dense, modique et riche. En 1950, on ne saurait prononcer le mot rape , en tout cas, pas au cinéma. On utilise par conséquent l’euphémisme policé, sinon policier, de criminal assault et sa variante évocatrice, vicious . Outrage , titre explicite et francophone que le distributeur hexagonal du Casualties of W

Heli : From Hell

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Suite à son visionnage sur le service Médiathèque Numérique, retour sur le titre d’Amat Escalante. Comme Irréversible , Heli commence par la fin, plus exactement par le milieu ; comme Irréversible , il s’apparente à un voyage au bout de la nuit vers une possible lumière. Les deux films s’achèvent sur deux femmes violées, allongées, ensommeillées, mais l’Alex de Noé ignore encore l’enfer qui l’attend, tandis que l’Estela d’Escalante cherche à l’oublier durant une sieste sur canapé à côté d’un bébé (son neveu), à peine troublée par un souffle d’air venu d’une fenêtre aux allures de cellule. Depuis la chambre, on entend les ahanements des amants-parents, peut-être réconciliés, en tous cas réunis au lit, après la justice expéditive, définitive, en steadicam et surcadrage en mode La Prisonnière du désert , de Heli parti venger sa sœur mutique et néanmoins dessinatrice (de plan éclairant). Au début, donc, une camionnette transporte le protagoniste groggy et le flic naïf en plan-

Cadet d’eau douce : Mississippi Burning

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Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre de Chas. F. Reisner. Dans cette fable aimable sur le capitalisme et la paternité, le corps atone de Keaton étonne, détonne, cartonne (et chantonne !) – Buster ou celui que l’on attend, que l’on rate, qui tombe, qui s’échappe. La dualité contradictoire du film et de la figure se lit dès le surnom devenu prénom : faire exploser/faire banqueroute. On le sait, Steamboat Bill, Jr. ne devint guère un blockbuster , il parapha plutôt le naufrage de la boîte de Buster, bientôt suivi de son embarquement de régiment à la MGM. Suicidaire, le Buster, surtout durant la célèbre cascade de coda ? Peut-être, en tout cas assurément destructeur, via un argument de fils prodigue (ou presque) revenu délivrer (outillé, déguisé en boulanger) son papounet emprisonné, le soustraire à une tempête possiblement biblique, pensons à la Jezabel de Las Vegas affrontée par le sinner Santoro dans Snake Eyes . Reisner, collaborateur de Chaplin (

L’Ange bleu : Le Bateau d’Émile

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Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre de Josef von Sternberg. Marlene Dietrich & Sternberg, bla-bla-bla. Que cela plaise ou pas, on ne va pas parler de ça, on va parler de cinéma, écrire sur le film, laisser à autrui le mythe miteux et la place sous le lit, celle qu’occupe à l’identique le lycéen fétichiste et fantaisiste, voleur de petites culottes à Lola Lola (une femme allemande, affirme Fassbinder), pas encore à Madonna, ni à la danseuse gracieuse, presque homonyme, de Jacques Demy discrètement gay friendly . Que (re)voir dans Der blaue Engel en 2017 et en ligne qui vaille la peine, qui mérite quelques lignes ? En vérité je vous le dis depuis ma subjectivité, tout se joue durant le quart d’heure d’exposition, conclu par un funeste fondu au noir, où le cinéaste revenu des États-Unis puis vite reparti, merci aux nazis, relit Le Cabinet du docteur Caligari et use du son en virtuose. Mate-moi l’architecture de cette masure, avise cet avatar de