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Affichage des articles du septembre, 2019

Que l’amour : Music of My Life

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« On vit tous en province quand on vit trop longtemps » ? On y (dé)chante aussi. Que l’amour montre en même temps un mystère et une mémoire, celui d’une épiphanie, celle de l’Algérie. « Abdel chante Brel » affirme l’affiche, obligeamment apposée à Alger, alors, par conséquent, on l’entend, on assiste au(x) spectacle(s), auparavant à l’installation, aux répétitions, le principal intéressé entouré de ses potes ou partenaires intéressants, à côté travaillant, comme lui-même, loueur de voitures presque naval, estival, parisien adoptif délocalisé au Pays basque. Ce documentaire dynamique et sincère, jamais angélique ni austère, épouse une courbe bien (re)connue, d’une ascension suivie d’une chute, utilisée à plusieurs reprises par le ciné US fictif, a fortiori psychologique, mis en musique, à dimension (mél)dramatique, remember l’exemplaire The Rose (Mark Rydell, 1979), vrai-faux biopic d’une certaine Janis Joplin. Ce qui devait constituer une sorte de couronnement, un retour

Thalasso : Le Gros et le Maigre

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La référence et la vérité, les rillettes et le dentier, le rire et la réalité… Assez amusant, carrément inconsistant, Thalasso (Guillaume Nicloux, 2019) délocalise, développe et radote L’Enlèvement de Michel Houellebecq (Guillaume Nicloux, 2014). Sur fond d’autofiction, de chronique en Scope, de remise en forme, de remise aux normes, celles de l’hygiénisme moderne, nique la nicotine, inspiratrice sevrée, substituée à l’absinthe de Baudelaire, l’écrivain croise (le couloir) la voie (et la voix) de l’acteur de The End (Guillaume Nicloux, 2016), enfin sorti de sa forêt, ouf. Michel & Gérard dans le même bateau, le spectateur tombe à l’eau ? Presque, puisque s’enchaînent les saynètes, assemblées de manière linéaire, les deux lignes narratives principales, la cure impure, le couple en déroute, finissant évidemment par se rencontrer, sinon se contaminer. À Cabourg, mon amour, on coule des jours moins tranquilles qu’à Clichy, en tout cas en mode Henry Miller, on y baise beauc

Edith, en chemin vers son rêve : Je sais où je vais

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Sheila, Shula, un réchaud, du réchauffé… Assez anecdotique, très touristique, Edie (Simon Hunter, 2017) néanmoins ne manque de mérite : durant ses meilleurs moments, ce métrage trop sage transforme le visage en paysage, en parallèle duquel ceux de l’Écosse, plutôt somptueux, paraissent pâlir, sinon s’abolir. Je me permets, aussitôt, de renvoyer le lecteur vers ma prose à propos de la face parfois fascinante, à la fois immense et intime sur grand écran. À notre époque et son ciné largement dominés par un jeunisme cynique, intéressé, il faut un certain courage pour s’autoriser de tels gros plans désarmants, presque malaisants. Je ne vois pas, actuellement, d’équivalent à une telle ivresse des rides, à une pareille proximité avec un passé incarné, au propre, au figuré. Les traits altiers de l’impeccable et francophone Sheila Hancock, elle-même veuve du regretté John Thaw ( Inspecteur Morse mémorable, mélomane, thanks for this information , Shulamith), récompensée comédienne su

Rambo : Le Vagabond

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Prendre les armes, fondre en larmes, exécuter un programme ou rendre l’âme. Pour mon propre père « Retour du refoulé », vietnamien à défaut d’être freudien ? Bien sûr, davantage : retour du fils prodigue, dans un éden déserté, endeuillé, retour d’entre les morts, qui le hantent encore, ce christ fissa refoulé par les flics, purifié à la dure, en parodie impitoyable du baptême. Ici, les cicatrices s’interprètent en stigmates ; ici, un policier provincial, rural, brutal, excellent Brian Dennehy, prend des allures de Ponce Pilate luciférien ; ici, David Caruso, sans lunettes, devient le rouquin témoin des humiliations de saison, des traitements indécents, prodigués par de sadiques et piètres et joyeux agents. Chasseur de cerf à la Robert De Niro ( Voyage au bout de l’enfer , Michael Cimino, 1978), fugitif forestier, accompagné par les percussions puissantes de Jerry Goldsmith, modèle non officiel du Motorcycle Boy de Rusty James (Francis Ford Coppola, 1983), l’homme des bo

The Offence

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Faire des films efficaces, se rassurer sur sa sensibilité… Ma confirmation à la question : Yes it can, and should! Voici en VO un article assez intéressant, cristallisant un basculement, du « graphique » vers l’idéologique, sans cependant paraître s’apercevoir que l’organique procède du politique, que la représentation ne saurait se passer d’une réflexion, même a minima , même inconsciente. Figurez-vous que je lus jadis L’Oiseau bariolé concerné, désormais adapté, petit catalogue horrifique, didactique, à l’authenticité discutée, sans en être traumatisé, CQFD – Survivre avec les loups de la fallacieuse Misha Defonseca suivra d’ailleurs la voie. Oui, la relativité concerne aussi le scandale, la censure, et la transgression, terme très religieux, à la Georges Bataille, se métamorphose avec les années, les sociétés, mais choquer, être choqué, constitue encore un plaisir, comme le disait un certain Pasolini, expert en ce domaine, réputation payée au prix de sa vie. La par

Le Gangster, le Flic & l’Assassin : Le Droit de tuer ?

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Chasse à l’homme qui   dégomme, poursuite psychologique, tract patraque. Voici un titre programmatique, de triangle asiatique, de divertissement dominical, droitiste in extremis , qui retravaille, selon la collusion, la collaboration, le parallélisme de M le maudit (Fritz Lang, 1931). La pègre gestapiste cède sa place à des spécialistes de machines à sous reloues, le tueur d’enfants sifflotant se métamorphose en taré jadis maltraité, en lecteur de traités ethnologiques, en automobiliste létal, entre le morose et l’extatique. Disons-le d’emblée : Le Gangster, le Flic & l’Assassin (Lee Won-tae, 2019) représente, au moins dans son ultime partie, une apologie de la peine de mort, institutionnelle ou individuelle, à faire fissa passer Michael Winner pour un émule de Robert Badinter, le William Friedkin du Sang du châtiment (1987) pour un simple rapporteur de procès, quasiment clément. Cette inclination peu politiquement correcte, inaccessible à la miséricorde, au pragmatis

Tarzan chez les singes : Greystoke, la légende de Tarzan

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Des Blacks , des Blancs, Lilian Thuram en arroseur arrosé, l’autrefois du ciné… Le légendaire Johnny Weissmuller peut reposer en paix, la candeur sincère de Christophe(r) Lambert reste intacte, car affublé d’un improbable bandana, Elmo Lincoln ne les surpasse pas, patronyme de président ou non, tant pis pour son pedigree chez DW (Griffith). Cependant cette curiosité mutique excède l’archéologique, possède sa propre dynamique, garde les grandes lignes du récit joli, de la fable affable, à la Rousseau, à la Lévi-Strauss, à base de dialectique exotique, zoologique, entre la nature (africaine) et la culture (britannique). Certes, Tarzan chez les singes (Scott Sidney, 1918) affiche un chouïa un colonialisme d’époque, attention à la tribu malsaine des indigènes, mais l’équilibre par un féminisme guère agressif, courage en partage, « un homme ne force pas une femme », en effet. Sans égaler la présence éloquente, suffocante, érotique, mythique de celle de King Kong (Merian C. Coop

The Furies : La Région sauvage

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Des « belles », des « bêtes », comme un codicille au conte d’Amat Escalante... Le slasher , on le sait, ne séduit guère les cinéphiles féministes, qui n’y perçoivent qu’un amas de misogynie, d’effarantes fadaises, désormais dénommées « féminicides », amen . Si The Furies (Tony D’Aquino, 2019) semble se situer au sein de l’imagerie ressassée, afin de la mieux renverser, d’attribuer aux proies une victoire provisoire, sur leurs chasseurs remplis d’une froide fureur, il contourne en réalité le conflit sexué, il tamise son manichéisme liminaire de nuances surprenantes, je pense à ce salut de la main, échangé entre la kidnappée, son poursuivant. Dans la forêt à vif de The Furies , les tueurs meurent, tête masquée, à distance explosée. L’épilogue, sous forme de mise en abyme ironique, sado-masochiste, tel voyeur, tel spectateur, nous apprend les tenants et les aboutissants du jeu sanglant, organisé par une obscure société, pour le bon plaisir et le mauvais replay de riches oisifs

Dantza : Brigadoon

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Danser sa vie, enchanté ? Dénombrer les minutes immobiles, désenchanté. À la chère Shula, tu te reconnaîtras. Dantza (Telmo Esnal, 2018) se voudrait mythique mais se réduit à de l’anecdotique et, peut-être pire, à de l’autarcique. Ce projet assez sauvage, devenu produit trop sage, cherche à séduire via ses paysages, voire ses visages, n’y parvient jamais, dommage. On doit Dantza à un ancien assistant d’Álex de la Iglesia, par exemple sur Le Crime farpait (2004) ou Mes chers voisins (2000). Toutefois, en dépit du sardonique pedigree , Dantza souffre aussi de son manque d’humour, de son esprit de sérieux, de son déroulement laborieux, en partie calqué sur le cycle des saisons, allons bon. Plus aéré que le claustro Beyond Flamenco (2016) du compatriote Carlos Saura, moins songeur que le pictural Rêves (1990) d’Akira Kurosawa, cédant la 3D au piteux Pina (2011) de Wim Wenders, trois influences assumées du cinéaste ex -danseur, Dantza ressemble ainsi à une commande a