Tarzan chez les singes : Greystoke, la légende de Tarzan
Des Blacks, des Blancs, Lilian Thuram en arroseur arrosé, l’autrefois du
ciné…
Le légendaire Johnny Weissmuller peut
reposer en paix, la candeur sincère de Christophe(r) Lambert reste intacte, car
affublé d’un improbable bandana, Elmo Lincoln ne les surpasse pas, patronyme de
président ou non, tant pis pour son pedigree
chez DW (Griffith). Cependant cette curiosité mutique excède l’archéologique,
possède sa propre dynamique, garde les grandes lignes du récit joli, de la
fable affable, à la Rousseau, à la Lévi-Strauss, à base de dialectique exotique,
zoologique, entre la nature (africaine) et la culture (britannique). Certes, Tarzan
chez les singes (Scott Sidney, 1918) affiche un chouïa un colonialisme
d’époque, attention à la tribu malsaine des indigènes, mais l’équilibre par un
féminisme guère agressif, courage en partage, « un homme ne force pas une
femme », en effet. Sans égaler la présence éloquente, suffocante, érotique, mythique
de celle de King Kong (Merian C. Cooper & Ernest B. Schoedsack, 1933),
la jungle respire, survit/séduit
encore cent ans après, eh ouais. L’opus
pionnier, co-écrit par la pionnière Lois Weber, elle-même réalisatrice du
marxiste succès Shoes (1916), où une paire de chaussures entraînait l’héroïne
désargentée, sinon exploitée, vers la déchéance de la prostitution, ah bon,
assemble archives in situ et reconstitution en Louisiane,
cascadeurs en costumes/athlètes locaux + vrais animaux. De façon pas tant
surprenante, il annonce le temps d’une scène peu sereine 2001, l’Odyssée de l’espace
(Stanley Kubrick, 1968), autre métrage d’évolution de l’espèce, à
pseudo-primates, au darwinisme dépressif. Ici aussi, le progrès s’apparente à
la supériorité sur l’adversité, ciao au gorille cause de matricide, planté au
couteau. Un styliste, Sidney ? Disons davantage un type prolifique, un
artisan anonyme, alors attaché à esquisser les jeunes années d’une figure impure,
d’un étrange étranger, presque partout.
Sur le miroir de l’étang mouvant, un
instant émouvant, pris en contre-plongée bien pensée, quand le minot orphelin
se découvre définitivement différent de sa mère adoptive, tout sauf
bestiale ; bientôt, petit espion pas con, Anglais en train de se
(re)trouver, il apprendra la pudeur, deviendra un redoutable et redouté beasts killer. En 2019, plus personne
n’ose filmer un enfant cul nu, au risque de passer fissa pour un affreux
pédophile, pléonasme, dommage pour l’édénique nudité de Gordon Griffith. Au
siècle dernier, on pouvait se le permettre, point de plan de pénis, pourtant, comme
de mettre en scène des marchands d’esclaves arabes, évidemment excités par la
chrétienté d’un marin maudit par des mutins, mince. Quasiment autodidacte,
radouci par Jane, Lord Greystoke croisa jadis la cabane de ses parents, avisa
leurs squelettes, celui de son clone
simiesque, quelle importance, en pleine inconscience. Seul le professeur Porter,
parti à la recherche du possible rescapé, identifie le crâne mini, mimi, tandis
que sa grande fifille se fait courtiser par un « décevant »
dégingandé, enlever par un mec à la peau noire, nous revoici revenu à Naissance
d’une nation (David Wark Griffith, 1915), à son libidineux « négro »
voulant violer une vierge doublement immaculée, vite sauvée par les konnards du
KKK se prenant pour de preux chevaliers kagoulés. Ce Tarzan très sudiste, voire
raciste, s’achève à la sauce Atlanta (Autant en emporte le vent, Victor
Fleming, 1939), c’est-à-dire par un gros incendie villageois, voilà qui les
éduquera, les dissuadera de toucher à la femme blanche, affirmerait un Marco
Ferreri. In extremis, le précité père
erre, l’amoureux heureux saute en l’air, rappelé par sa dulcinée, Enid Markey
imitant Lillian Gish, plus lisse et néanmoins moins lys (brisé) – au creux du
lexique se tient ainsi l’acmé de l’extase, du couple biblique recommencé loin
de la société, CQFD.
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