La Maison de la terreur : My Wonder Women


Du défi à la folie, du « subconscient » à « l’hystérie »…


Revoilà Valeria en jupe jaune pour huis clos de giallo. Elle succombe au cutter, elle meurt la première, elle sourit, elle irradie. Et Mademoiselle Cavalli, saisie dans l’éclat de sa juvénile beauté, s’autorise, magnanime, la laideur hitchcockienne d’une agonie, revoyez Frenzy (1972), ses lèvres, évidemment rouge sang, déformées par la souffrance, plaquées contre un grillage d’outrage. Ici, au sein de cette villa louée, avec piscine, trop tranquille, malgré un jardinier qui mate, découpe des titres de faits divers, on trépasse salement, on décède en série, puisque la musique de films ne saurait certes adoucir les meurtres. La seconde victime, au prénom angélique, se lave les cheveux dans la salle de bains à la suite d’un plongeon de saison. Hélas, l’assassin se tient dans la glace embuée, lui transperce la main et l’étouffe sous un sac plastique. L’emballage de tabassage s’ensanglante, le pauvre visage vandalisé sur le lavabo. Une fois la sirène occise, égorgée par en dessous, il faut faire le ménage, à la Norman Bates (Psychose, Hitchcock, 1960). Une réalisatrice de thriller de maltraitance enfantine, dont la balle de tennis bondissante, écarlate, rappelle le joujou relou du gosse de Opération peur (Bava, 1966), personnage de petite fille interprété, on le sait, par un petit garçon, subit quant à elle un étranglement à la pellicule, se voit traînée au sol, traîtresse créatrice en partie révélatrice de secret sexué, enregistré, en rime à Katia/Valeria baladée au creux du parc nocturne puis sa tête inerte heurtée à chaque marche d’escalier, avant que les deux cadavres des voisines ne finissent dissimulés dans un silo lui aussi giallo. Et Julia, dans tout ça ? Si le spectateur inattentif peut soupçonner la comédienne sur scène d’être malsaine, absente, armée, elle périra poignardée, dans le dos, la pointe de la lame ressortie sous sa poitrine.




Rien ne sert de courir, de chercher à fuir, nul ne quitte indemne ce vaste mausolée remarquablement éclairé par un directeur de la photographie fiable. La lectrice cinéphile se sent possiblement visée, écœurée par la description objective du sadisme accumulatif ; qu’elle se rassure, la coda fissa du scénario transsexuel justifie l’entreprise a priori misogyne, qu’elle ne répète pas, please, l’erreur des féministes US ulcérées par Pulsions (De Palma, 1980), matrice pas si apocryphe de La Maison de la terreur (Bava, 1983) – la haine des femmes appartient au tueur, pas au réalisateur. Tout ceci, écrit par le tandem Briganti/Sacchetti, scoré par le duo De Angelis, incarné par l’acteur-producteur auteuriste Occhipinti, par un Soavi déguisé, passé de l’autre côté de la caméra, par la Lara Naszinski-Bava de Aenigma (Fulci, 1987), fonctionne assez, adresse des clins d’œil à Blow Out (De Palma, 1981) et La Maison près du cimetière (Fulci, idem), cartographie le piège du passé, dresse l’état des lieux d’un fou furieux. Film atmosphérique et claustrophobique doté d’un titre international programmatique, générique d’une imagerie fétichiste plutôt que machiste, quoique, esthétique autant que psychanalytique, A Blade in the Dark affirme une moralité domestique ironique : toujours se méfier du confort solitaire, des bonnes affaires, du fils du propriétaire, de l’ancienne locataire semble-t-il éprise d’obscurité, en sus des modèles de placard, diablesses de supplices. Le fiston Lamberto modère la dimension méta de Démons (1985), écarte l’inceste de Delirium (1987), apprend son boulot après les débuts de Macabro (1980). Ni renversant ni misérable, La casa con la scala nel buio, intitulé immobilier illustré par le prologue transposé, nous entraîne parmi des ténèbres familières et sincères, violentes et vivantes.


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