Les Bonnes Intentions

 

Un métrage, une image : Les Neiges du Kilimandjaro (2011)

Dépouillée par Grégoire Leprince-Ringuet, requinquée par Pierre Niney, Ariane Ascaride désire « comprendre » comment (dys)fonctionne le « monde dans lequel elle vit » avec son ex-syndicaliste de mari. La séquence de hom(m)e(s) invasion pouvait s’inspirer du sadisme réflexif de Haneke (Funny Games U.S., 2007), cependant Guédiguian ne s’attarde guère sur les misères du petit « propriétaire », à une chaise attaché, du sol relevé, épaule en compote. Il filme en forme faible les conséquences d’une violence plutôt économique que physique et psychologique, même si Denise, la fine Maryline Canto illico, en larmes sister de l’aide-ménagère, se « pisse » dessus, met du temps à digérer, dépasser, l’événement traumatisant et imprévu. Dès l’orée sévissait la sauvagerie policée, remarquablement cadrée, montée, d’un licenciement sous le signe du hasard et de la nécessité placé, tirage au sort sans remords, pas sans rancœur, le voleur formulera tout cela en coda, dernière rencontre après trois mois de prison, ne compte pas sur moi, fada, pour te donner l’absolution. Le cinéaste de L’Estaque n’esquisse pas des salauds, des « salopes », douce insulte de belote, il accorde la parole au fils et père putatif, à la mère amère, convaincante et vénère Karole Rocher, sur le point de prendre la mer, qui estime que les assistantes sociales, à cette heure, ça sommeille, qui pense que les mamans, personne ne les « baise », elle devrait mieux se renseigner, visiter des sites spécialisés. Robinson Stévenin s’affiche en flic un brin malsain, de pari point pascalien, Julie-Marie Parmentier interprète une voisine au romantisme en mode Quick, les enfants, très grands, du couple en déroute, c’est-à-dire Anaïs Demoustier & Adrien Jolivet, ne comprennent pas, bis, leurs parents, tandis que Gérard Meylan se sent d’humeur homicide, n’accorde, bis, aucune circonstance atténuante au délinquant jusqu’ici innocent, casier immaculé, second projet déjà pensé, les loyers, il faut les payer ou les emporter. Jean-Pierre Darroussin se fait remercier, dérober des billets, de voyage, d’hommage, fait son examen de conscience dans la foulée, parvient au même point, via un différent chemin, que la bien aimée Marie-Claire, pas de regret de ne pas être devenue infirmière, qui voit en effet clair – après l’extorsion, voici l’adoption, en tout cas par procuration, pour deux ans ou trois, vous n’y pensez pas, s’insurge la peu généreuse progéniture, et l’argent que tu me dois pour ta pergola, tu en dis quoi, tu me le rend quand, mon grand ? Les hommes « faibles », les femmes fortes, des chansons et un classique mélancolique les accompagnent, Barretto & Blondie, Danel & Ravel, Cocker encore, au programme. Entre Jaurès & Strange, le cœur balance, ne s’oublie la souffrance, l’héroïsme du quotidien, comme disent les magazines, les humanistes, se substitue aux super-pouvoirs des super-zéros américains. Au début, Raoul reproche à Michel un « orgueil » cohérent et incongru ; à la fin, trop cuit festin, il avoue le vol de la revue, faute de gosse fissa pardonnée. Faux flingue et vrai dilemme, maison individuelle versus HLM, idéaux vitaux mis à l’épreuve du réel, mélodrame au soleil à fossé générationnel : le film frise le didactisme, sinon l’angélisme, pas de nuisible nature, rien que des mauvaises ou bonnes actions dues à la conjoncture, salue l’optimisme hugolien, le choix du bien, se suit délesté d’ennui et de nuit…

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