La Dame du lac

 

Un métrage, une image : Malombra (1917)

Je découvris jadis la version voyeuriste, opus propice à l’onanisme en mode M6, puisque porté par la sculpturale et en train de se palucher Paola Senatore (Malombra, Gaburro, 1984). Voici aujourd’hui le « film muet » du mussolinien Carmine, conduit par la « participation spéciale de la diva Lyda Borelli ». Aussitôt au « château » à ragots populos débarquée, la nièce disons endeuillée joue les emmerdeuses assumées, demande une « chambre avec vue sur le lac », malvenue, patraque, les domestiques la déclarent maudite, se met à lire Poe presto, en français, s’il vous plaît, mauvais signe d’oisiveté vite maladive. Au creux du compartiment escamotable d’un secrétaire, le meuble cercueil et non le mec à l’accueil, elle exhume un journal intime, un miroir, une poignée de feuillets et de cheveux, un gant blanc, tout ceci appartient au passé, à la Cecilia à domicile « emprisonnée », l’occasion de lancer une malédiction sur les descendants du maudit mari. Hélas, la glace se casse, le destin prend un différent chemin, la confusion se substitue à la fusion. Marina s’imagine subito la réincarnation de l’ancêtre peu espiègle, crinière préraphaélite comprise. « L’âme malade » et lucide, au fait de sa « folie », consciente de son aspect risible, se balade en barque, dévore un livre intitulé Un rêve, qui la reflète, insupporte au piano l’aïeul bousillé bientôt. Survient l’auteur visiteur, vous suivez, sidéré d’aviser du maternel mobilier : un « doute atroce » saisit Corrado illico, au sujet d’une possible paternité, par « l’amitié de l’adorée » ôté. Le couple en déroute, à menu et malentendu, à correspondance sous pseudonyme de « fierté + arrogance » féminines, mène en tandem, tant d’aime et de haine, une partie d’échecs, au propre et au figuré, parmi une masculine société, aussi réunie dans ce ludique dessein d’aristocratique déclin. Tandis que sévit la passion, se passent bien les tractations, même si la promise ne paraît point toute sa tête posséder, « non ha la testa a posto », donc en place ou sur les épaules. En (dé)route vers la « grotte de l’horror », accepter la déclaration du comte Salvador, d’accord, appréciez au passage le somptueux décor, au pont spectaculaire, au torrent inquiétant, nonobstant l’ombrelle cruelle, l’aveu peu miséricordieux. Les études, quelle platitude, l’épris à l’esprit occupé préfère flirter auprès de la daughter raisonnable et raisonnée du serviteur précité. La cérémonie de mariage nocturne annulée, la vengeance sexuée s’accomplit sans un pli, l’ellipse subtile de l’oncle qui s’effondre, épiphanie fantasmatique, fantomatique, de fantasma et fantasmi, si, servira au récit, au retour en arrière de la sous influence et nostalgique meurtrière, petite crise d’hystérie au pied du lit en sus. Les proches se moquent de la preuve d’accessoire immaculé, par le toubib trouvée, le rationalisme, le pragmatisme, se fichent du romantisme, de la nécromancie, pardi. Trépasse le propriétaire, en dépit de prières pas si salutaires, Marina devient définitivement dingo, fait gésir le jeunot, estimable Novelli Amleto, se tire, sinon se suicide, en bateau. Ressuscité presque au complet par la cinémathèque bolognaise spécialisée, Malombra ne démérite pas, mélodrame mondain a priori à l’origine du gothique italien, Bava et cetera. Borelli ressemble un brin à Dominique Blanc, ce physique à la fois incarné, « raffiné », devrait plaire à l’italianophile Jacqueline Waechter, son expressionnisme molto scénique, sensuel quasi, adoubé par D’Annunzio & Gramsci, peut produire des sourires de modérée modernité. Vingt-cinq ans avant Soldati (Malombra, 1942), Gallone dégraisse Fogazzaro, n’en fait pas trop, sa réalisation mesurée, précise, appliquée plus qu’inspirée, compense ainsi la féministe surexpressivité de sa star ensuite retirée du ciné, comtesse désormais, de décès, la vie selon l’art (re)modelée, vieille histoire ici démontrée...

Commentaires


  1. «Je me souviens de ces femmes au pas vacillant et saccadé, leurs manières de naufragées de l’amour qui allaient en effleurant les murs le long des couloirs, s’enivraient du parfum des fleurs entre les jardins ombragés et les petits escaliers de marbre…»
    Salvador Dali,

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    1. Femme faustienne, muse amusée :
      https://www.youtube.com/watch?v=b9YyPIiT2pM

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