Brazil
Une chanson et deux déclinaisons…
Ce qui rend irrésistible Aquarela
do Brasil ? Sa « mélancolie » pas si en sourdine, peu
propice à la déprime, son « exaltation » d’unisson, d’assumée
transformation. En 1939, année damnée, voici du neuf, ensuite illustré/adoubé
par Disney (Saludos Amigos, 1942), disons à la moitié
d’une guerre mondialisée. D’une Amérique à l’autre, latine et nordiste, la
belle aquarelle, nationale et non nationaliste, connaît le succès, devient vite
un classique instantané, voire controversé, sans cesse relooké, mention
spéciale à la version radicale, plutôt martiale que tropicale, quoique, de
l’éphémère et royale Elis Regina. Ary s’inspire de la pluie, célèbre un pays,
« troubadour d’amour » en train d’immortaliser une terre religieuse,
« malicieuse » et « délicieuse », de signer une samba
superbe, modèle, peut-être immortelle, dont l’impressionnisme épique se
métamorphose en romantisme nostalgique, merci aux lyrics de Russell, collaborateur d’Ellington, partenaire de Kaper.
En 1985, Gilliam s’en réclame, selon un film au titre quasi homonyme. Dans Brazil, Kate Bush & Michael
Kamen se complètent à merveille, délivrent une cover de grande valeur, d’urgence languissante, orchestrale et
chorale. La chanteuse audacieuse et l’homme du score de Dead Zone (Cronenberg, 1983)
servent au mieux cette vraie-fausse transposition de 1984, pourvue d’un
épilogue de liberté un brin lobotomisée, amitiés à Forman (Vol au-dessus d’un nid de
coucou,
1975). Une vingtaine d’années après, la bien nommée Storm Large, « performeuse »
puissante, captivante, polyglotte, point interlope, jadis et depuis passée par
le télé-crochet, on lui pardonne, on s’en tamponne, puisque la dame désarme,
remarquée, remarquable, capable, sillage essentiel de Lotte Lenya & Ute
Lemper, de reprendre, de personnaliser le répertoire du tandem Brecht & Weill, revisite et ressuscite l’item, lui confère en public, escortée
par l’expertise de tous les types en effet « sympathiques » de Pink
Martini, une présence renversante, physique, festive, exercice complice de
virtuosité vocalisée, incarnée. Si Le Bonheur, CD doucement
dévié où vous devinez, ne convainc jamais, en concert, elle assure et séduit
toujours, Pink & Lady Gaga ne nous démentiront pas. Au cinéma, le tube de
Barroso s’entendit aussitôt, chez Berkeley, Hitchcock & Cukor, Brooks &
Babenco, Scorsese à l’aise. Sur disque, Rosemary Clooney (& Bing Crosby),
Gal Costa, Simone, Deborah Blando, Dionne Warwick, Daniela Mercury, Claudia
Leitte ou Loona s’y essayèrent, misère, à côté de cadors nommés Cugat, Reinhardt,
Sinatra & Anka, Jobim, Gil, Gilberto, Veloso, Belafonte ou Domingo. On en
reste à Kate & Mike, à Miss
Large, leurs interprétations pleines d’émotions...
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