Mondo cane

 

Un métrage, une image : Antarctica (1983)

« Le Japon est un nid de crétins. Ils ne savent rien de l’Antarctique et encore moins des chiens. Ça ne les empêche pas de crier pauvres bêtes. C’est ridicule » résume illico l’érudit de Hokkaidō. Ce long et longuet métrage, presque réalisé sans trucage, les Américains s’en émurent, ne lui accordèrent leur imprimatur, célèbre formule « No animals were harmed », amen, carbure donc à la culpabilité partagée, aux expéditions en triplé, s’inspire du meilleur et du pire d’une histoire vraie, là-bas renommée, y connut un gros succès, en version disons rallongée, intégrité d’intégralité, se fit remaker ou plutôt pasteuriser selon Disney, plus d’une vingtaine d’années après. Confectionné par un quasi inconnu productif appelé Koreyoshi Kurahara, qui coécrit, coproduit, monte de manière autonome, quel homme, Antarctica ressemble à un conte cruel pas trop de (première) la jeunesse, dommage et dégage, Ōshima, au sujet des liens, au propre et au figuré, point sereins entre les espèces, tissés de rudesse et de noblesse. Le Carpenter itou en Antarctique de The Thing (1982) filmait des types très peu tranquilles, proies en veux-tu en voilà d’un prédateur d’ailleurs, à eux supérieur et pas sympa. Doté du solide tandem de Yakusa (Pollack, 1974),  Kurahara  met en images son sien survival animalier, immaculé, cette fois-ci à base de base isolée, inaccessible désormais, de remords toujours et encore, de funérailles et de retrouvailles. Tandis que Ken Takakura s’excuse auprès d’une gosse morose, propriétaire d’un quatre pattes prisonnier des glaces, à présent de leur ersatz, que Eiji Okada ne se réjouit à Tokyo, à cause d’un caniche décoré rococo, les clébards au collier serré, hélas, décèdent sur place ou se libèrent et résistent à l’hiver. Au final, les deux frères, « acteurs » récompensés de prix japonais, font à nouveau face aux bipèdes, conclusion douce-amère d’un item tourné en mode documentaire, que tapisse Vangelis, sa BO la matrice apocryphe du Grand Bleu (Besson, 1988) de Serra, substitué à Morricone, mes oreilles, à tour de rôle, apprécient ou se désolent. Jamais émule du fameux et vrai-faux Nanouk l’Esquimau (Flaherty, 1922), fi d’ethnographie, même s’il se soucie aussi de survie, de nourriture à fourrure, Antarctica évoque davantage Hatchi, eh oui, le tire-larmes de Lasse Hallström commis en 2008 et lui-même démarqué du local Hachiko (Kōyama, 1987), consacré à la fidélité d’un canidé consacré. Certes, le darwinisme de ce film en définitive inoffensif offensera les VRP de la SPA, bien sûr Brigitte Bardot, sudiste frontiste qui posa sur la banquise, ne vécut au creux d’un igloo, lesquels se questionneront à tort ou à raison à propos de la chouette mouette, du phoque ad hoc, a fortiori bouffés, refroidis façon refroidissant snuff movie, par les clebs affamés, en dépit d’un plan éloigné, d’une image arrêtée, outrage de tournage étendu sur trois années, physique, sinon difficile, imaginé. Dans tout cela, l’échec individuel devient une faillite collective, la décision personnelle se soumet à la route du groupe, l’instinct de survie verse vers la sélection naturelle, adoube le combat quotidien, surhumain, avec une nature à la dure, des ennemis à domicile, mention spéciale à l’orque redoutable, moins maternelle que celle de Orca (Anderson, 1977), oui-da, Ennio revoilà. « Dédié à toutes les créatures vivant sur terre », narré en VF via la voix reconnaissable et non créditée d’un certain Robert Hossein, Antarctica annonce en sus les surnaturelles « aurores australes » de The Last Winter (Fessenden, 2006), onrisme du réalisme, étrangeté de l’altérité, mystérieuse cinégénie de cette immensité, idem en danger.

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