L’Anglais

 

Silhouette ou quartette, musico et peut-être mec honnête…

John Cameron composa donc une poignée de pièces assez irrésistibles de library music, exercice de style difficile, sinon stérile, dont un diptyque addictif, à la sensualité de « soleil liquide » et de céleste vocaliste seventies, en partie découvert jadis par votre serviteur via une publicité télévisée. Il ne céda cependant à la paresse de « rêveries oubliées à demi », jaillit du jazz, passa par la pop, s’occupa de comédie musicale, par exemple les increvables Misérables du tandem Boublil & Schönberg, se soucia aussi de classique. Collaborateur de Donovan, Hot Chocolate ou José Carreras, Cameron écrivit, conduisit et produisit ainsi, souvent avec discernement, pour le petit et le grand écran, signa en sus moult arrangements. Moins renommé que son compatriote, un autre John, Barry, en tout cas ici, il ne démérite néanmoins, prend sa place parmi une estimable liste, celle d’artistes britanniques à saluer, à ressusciter, que constituent à l’unisson les noms de disons John Addison, Craig Armstrong, David & Malcolm Arnold, Richard Rodney Bennett, James Bernard, Simon Boswell, Roy Budd, Patrick Doyle, George Fenton, Ron Goodwin, Laurie Johnson, Clint Mansell, Stanley Myers, Michael Nyman, John Powell, J. Peter Robinson, John Scott, Humphrey Searle, Ed Shearmur, Benjamin Wallfisch ou Stephen Warbeck, suite alphabétique bien sûr impressionniste et subjective, tout sauf exhaustive. De la délicatesse de Kes (Loach, 1969) au « tremblement de terre de quatre heures » rejoué selon Jackass Forever (Tremaine, 2022), son CV d’OST s’étend sur plus de cinquante ans, (r)amène une cinquantaine d’items. Cameron écuma de multiples imageries, la mer douce-amère du documentaire, le flux et le reflux de la fiction. Sa route sans déroute croisa les voies de la famille Ingalls et Frankenstein, Jack (l’Éventreur) & Jekyll (+ Hyde), Marlowe & Disney, du 11-Septembre et du Voleur de Bagdad (Donner, 1978), de Seinfeld et des Simpsons, de Liz Taylor (Terreur dans la nuit, Hutton, 1973 ou Le miroir se brisa, Hamilton, 1980) et même Millénium (Fincher, 2011). Chorale ou orchestrale, dramatique ou ludique, la musique du pianiste « décentré », vrai-faux et very cool « fauteur de troubles », s’avère vite stimulante en permanence, certes à leur service mais insoumise aux films et téléfilms, plus obscurs que fameux, tant pis et tant mieux. Cette petite playlist se propose d’explorer plusieurs titres disponibles en ligne, d’abord à écouter, quelquefois à regarder. Doté de versatilité, voire de virtuosité, le presque octogénaire s’y exprime en créateur libre, au corpus à la fois atmosphérique et mélodique. Qu’il accompagne Marty Feldman, John Cleese & Harold Pinter, Peter O’Toole, George Segal & Glenda Jackson, nomination à l’Oscar à la clé, olé, George Sanders en fin de carrière, Lee Marvin & Oliver Reed, encore Glenda Jackson & Melina Mercouri, Roddy McDowall & Kabir Bedi, Geraldine Chaplin, Angela Lansbury, Kim Novak réunies chez Agatha Christie, Diana Rigg & Deborah Kerr au creux d’un remake de Billy Wilder (Témoin à charge, 1957), Christie bis, Patrick Bergin relooké par Mary Shelley, Kiefer Sutherland entre souffrance et résilience, Tony Anholt, Nyree Dawn Porter, Robert Vaughn, le trio très cosmo(polite) de Poigne de fer et séduction, cogité par Gerry Anderson, le « spectral » Robert Culp, détective insolite, John Cameron jamais ne se moque de personne, surtout pas du cinéphile mélomane, du dénicheur dominical, et ses œuvres valeureuses, d’une constante élégance, bel et bien British, pas une seconde ne trichent, délice de fortiche.     

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