Un film de Stephen King
Royauté reflétée, monarchie d’anarchie…
Cinéphile lucide, cf. les études tout
sauf « académiques » de Anatomie de l’horreur, scénariste
souvent anecdotique (Creepshow, Romero, 1982, Cat’s
Eye, Teague + Peur bleue, Attias, 1985), parfois
assez inspiré (Simetierre, Lambert, 1989), réalisateur amateur a priori
pitoyable (Maximum Overdrive, 1986), le romancier dut à
ses débuts son succès au ciné, en l’occurrence à l’écarlate mais immaculée Carrie
(De Palma, 1976). Il s’agissait déjà d’infidélité, de malentendu bienvenu,
l’intéressé le reconnut. Ensuite, très vite, durant cinq décennies, les
transpositions, douces, amères, se multiplièrent, à la manière de gremlins après Minuit (2
ou 4),
ne paraissent sur le point de disparaître, puisque voici désormais annoncés Salem’s
Lot
de Dauberman, The Running Man de Wright, The Tommyknockers de Wan, au
milieu des remakes programmés de Christine,
La
Part
des
ténèbres,
Firestarter,
parmi d’autres traductions en peloton, dont From a Buick 8
de Mickle. Du côté de la TV, où King commit les scripts plutôt soporifiques du diptyque Le Fléau/Shining,
illustrés avec servilité via l’ami
Mick Garris, sans omettre l’épopée suspecte de La Tempête du siècle, en compagnie
de l’oublié Baxley, on s’active aussi, jadis, aujourd’hui, Hooper fait peur,
Wallace délivre un Ça pas dégueulasse, Carrie, bis, mérite les ricanements, en dépit de la présence toujours
intense de Miss Bettis, idem un épigone à la gomme de Dead
Zone
(Cronenberg, 1983), The Outsider sortit illico
sur HBO, Le Fléau refit surface sur CBS, Joyland, Le
Talisman des territoires ne devraient tarder. Épargnons au lecteur
pressé l’accumulation des suites, virons les dérivés à la con, annotons ces
noces roses, rosses, plusieurs épisodes d’ailleurs par votre serviteur ici abordés,
vous le savez.
N’en déplaise aux cinéastes
respectifs, successifs, connus, obscurs, l’inconscient collectif affirme
« un film de Stephen King », comme il disait en écho « un film de
Belmondo ». Quasi concurrent de
Balzac en termes d’items, réécrits sur
petit, grand écran, lui-même créateur, de surcroît à Castle Rock, de Comédie
(in)humaine,
l’auteur populaire, pas mineur, fournit fissa au cinéma, à la fiction chez soi,
un gros réservoir d’histoires, une Americana
familière, singulière, guère révolutionnaire, sinon conservatrice, vive la
catharsis, comparez-les au radicalisme dépourvu de peur de Clive Barker,
vrai-faux « futur/avenir » délesté d’ordre à rétablir. Machine (divine) à écrire (à traitement de texte)
à dimension méta, aimable marque jamais patraque, artiste perspicace, à propos de
son pays, de son imagerie, King, du point de vue de la production, combine le
lucratif, le narratif, le frisson, l’émotion, le culturel, le naturel, voire
l’universel. La centaine de translations passées, en prévision, entre
commercialisation, promotion, poétique et politique profusion, participe d’une
logique symbolique, pragmatique, identifie ainsi le média, qui se soucie de
psychologie, adore encore la métaphore. Davantage que de mariage arrangé, de
(dé)raison, il s’agit donc d’union à l’unisson, de miroitement stimulant,
démoralisant, de REDRUM sacré, saccagé, enterré, ressuscité, tel le pauvre Gage
sacrilège de Pet Sematary, pardi. Immolé, immortalisé, mondialisé, au moyen de
(télé)films fameux, infimes, notre stakhanoviste subit en définitive une
bénédiction-malédiction, démiurge dédoublé de fantaisies fantasmées, de
mimétisme émancipé. Ses textes s’y prêtent, au jeu sérieux se prêtent, captifs,
affranchis, modifiés, inchangés, à découvrir, à revisiter.
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