Bons baisers d’Athènes
Un métrage, une image : Le Casse (1971)
Le Casse commence comme Le Cercle rouge (1970),
cambriolage comportementaliste, silence éloquent de professionnels de la
profession ; il se termine à la Vampyr (1932), cercueil de silo.
Entre Melville & Dreyer, Verneuil dilate la durée en mode Leone, pratique
une course-poursuite « animée par Rémy Julienne et son équipe », à
glisser, au propre et au figuré, entre celles de Bullitt (Yates, 1968) et French
Connection
(Friedkin, 1971). S’il adapte David Goodis, ici escorté d’un co-scénariste, en
l’occurrence le Katcha de Galia (Lautner, 1966) ou du Maître-nageur
(Trintignant, 1979), portraiture, presque une dizaine d’années après, d’autres
stratèges idem en échec (Mélodie
en sous-sol, 1963), cette co-production franco-italo-américaine à
succès, en Grèce guère démocratique tournée, Costa-Gavras dut en être outré, dépasse
le divertissement d’antan, s’avère vite un titre expérimental assez surprenant,
sinon passionnant. Le Casse excède en effet le cadre en Scope et à chaque plan
composé, parfois en bifocale, eh ouais, du polar à stars, de la comédie sentimentale pas si bancale, du défi en
définitive phallique et ludique. Face au flic fissa cynique, voire sadique, de l’offensif
Sharif, face à deux femmes fréquentables, dissemblables, sorte de petite sœur
souhaitant s’émanciper + « petite salope » pragmatique et
pardonnable, gifles fournies, spots
sonores, qu’interprètent avec justesse, allégresse, les sympathiques Nicole
Calfan & Dyan Cannon, Belmondo, à moitié pro, à moitié minot, doit donc
grandir, partir, se défaire d’un adversaire en reflet déformé. Artiste pudique,
a fortiori lorsqu’il photographie
Brigitte Lahaie (I… comme Icare, 1979) ou accorde illico un caméo de manteaux à la taiseuse Alice Arno, notre
cinéaste, certes de manière dédramatisée en regard du plus tendu Peur
sur la ville (1975), prend ainsi acte du majeur changement des mœurs,
entre féminisme magnanime et « foire du sexe » dépourvue de
complexes, cf. la cosmopolite presse ou le « théâtre érotique »
archéologique, démystifié, propice à laisser le protagoniste un peu puritain,
moraliste, à son insu photographié, de
facto époustouflé. Construit sur une
accumulation de séquences, un assemblage de blocs davantage abstraits que
narratifs, fichtre, Le Casse, par conséquent conte d’éducation, séduit aussi en
conte d’incarnation, car en écho à Keaton, surtout celui du Mécano
de la « General » (1926), le corps increvable, quoique cabossé, de l’acteur sans peur se confronte à et affronte des machines soumises, citons
sa mallette de serrurier non conventionné, ou indociles, bateau de renouveau
(départ) loupé parce qu’à réparer, bagnole très de traviole. Dotée d’un
générique profondo rosso de cibles collectives, d’un bestiaire symbolique,
poissons rouges, cheval disons de manège, paquet de poulets, de deux thèmes
amusé, mélancolique, du régulier Morricone, la moralité douce-amère minore les
émeraudes, donne au bien prénommé Azad, Arménien apatride, la liberté de l’amour
et de l’amitié, (in)estimable CQFD.
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