House : Good Morning, Vietnam
Hantise intime, culpabilité exp(l)osée, propriétaire en enfer…
Somewhere
after midnight
In
my wildest fantasy
Somewhere
just beyond my reach
There’s
someone reaching back for me
Racing
on the thunder and rising with the heat
It’s
gonna take a superman to sweep me off my feet
Bonnie
Tyler, Holding Out for a Hero
Au siècle dernier, c’est-à-dire en
1986, sortirent deux titres se souvenant des ravages du Vietnam : House
+ Platoon.
Si Oliver Stone, alors en mode autobiographique, opte pour la transposition
réaliste, Steve Miner favorise le fantastique, le contrapuntique. Mais on
retrouve, d’une bande à la suivante, une identique posture caractéristique, sinon
christique, celle d’un soldat au sol, agenouillé, les bras levés. Pourtant,
ici, point de ralenti trop joli, ni d’adagio (de Samuel Barber) à trémolo.
Confrère du fameux Stephen King, moins productif et moins riche, Roger Cobb
décide donc de ne plus vendre la maison de sa tante pendante, puisque dès le
début suicidée, olé. À peine arrivé, il se rappelle devant la piscine un drame humide,
celui de son fils aussitôt disparu, absurdité d’insanité. Séparé de sa compagne
occupée, aimable actrice de soap au
téléphone, il fait connaissance avec un voisinage bienveillant, serviable et sexy. Hélas, les démons à domicile ne
sauraient le laisser tranquille ; devenu malgré lui le héros d’une fiction
vécue pour de bon, à la fois affreuse et facétieuse, notre romancier malmené va
devoir se réinventer, en géniteur sauveur. L’ultime image, arrêtée, en regard
caméra, de son visage vivant, vibrant, suant, souriant, cristallise ce parcours
et la multiplicité des tonalités adoptées. Bien co-écrit par le tandem Fred Dekker & Ethan Riley, bien
décoré par le production designer Gregg Fonseca, bien éclairé par
le DP Mac Ahlberg, partenaire de Stuart Gordon & John Landis, bien
interprété par un casting choral
conduit par le convaincant William Katt, accompagnateur de Carrie pour l’éternité
d’un bal de promotion ensanglanté (Brian De Palma, 1976), House s’avère par
conséquent un film d’effroi souvent drôle, cependant à base très dramatique,
car deuil (impossible), divorce (apaisé), solitude et impuissance (au carré), suppression
intempestive (féminine), trauma
militaire (entre mecs) et « trouble de stress post-traumatique »
(déjà diagnostiqué).
L’opus
primé, à succès, ressemble ainsi à un exercice de résilience soigné, à une
sorte de catharsis amusante et amusée, capable de rivaliser avec deux autres
réussites du modeste Miner, en alternance passé par la TV, pas si surprenant :
Forever
Young (1992) et Halloween, 20 ans après (1998).
Musiqué par Harry Manfredini, produit par Sean S. Cunningham, duo auquel on
devait précédemment le dispensable Vendredi 13 (SC, 1980), House
sait s’attirer, voire conserver, une trentaine d’années après, la sympathie du
spectateur, surtout estival. Ponctué de clin d’œil patronymiques, Craven &
Hooper, mon cœur, délesté de sombre noirceur, comparez avec le Nightcrawlers
(1985) similaire, différencié, de Bill Friedkin, selon la nouvelle version de The
Twilight Zone, le métrage ne verse jamais vers le cynisme méta ni le
régressif de fada. Outre utiliser la métaphore du « placard »
psychique, reprise ensuite par les essayistes LGBT, pas seulement au sujet de Ben-Hur
(William Wyler, 1959), House anticipe le miroir-armoire à
pharmacie de Candyman (Bernard Rose, 1992), porte picturale de poche, à la
Cocteau & Carpenter, vers un au-delà situé en-deçà. Comme plus tard Pay
the Ghost (Uli Edel, 2015), il s’agit aussi d’un mélodrame paternel, cette
fois-ci réussi, mâtiné d’éléments de comédie. Peut-on dépasser (puis réparer)
le passé, juguler la guerre (par l’écriture), sortir au grand air, lutter pour
la lumière ? Placé quelque part au sein d’un vaste sillage, à rapprocher
des éprouvants voyages du Mort-vivant (Bob Clark, 1974) et Outrages
(De Palma, 1989), encore des cauchemars masculins d’armée malsaine, House
répond oui à ceci, nous contente durant une heure trente, item tragique et ludique, à la séduction sereine, saupoudrée de steadicam, cf. le plan d’ouverture
autour de la villa victorienne,
californienne, cadrée idem en
régulières contre-plongées de nocturnes travellings
panoramiques. Sincère et sobre, adulte et tendre, House mérite, CQFD, de
figurer sur la liste des fréquentables maisons hantées, en tout cas au ciné.
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