Ma femme est un gangster 2 : Bloody Mama


La Gloria ressuscitée de Gena & John ? La Gloria Gaynor survit encore ! 


Certain(e)s, spécialement en Occident, reprochent au cinéma sud-coréen contemporain sa caractérisation des personnages féminins. Comme pour contrer ces accusations de misogynie généralisée, ce cortège de sous-héroïnes estimées souvent décoratives, très tabassées, Ma femme est un gangster 2 (Jeong Heung-sun, 2003) évoque un univers où règne le supposé « deuxième sexe », amitiés aux mânes de la Simone sartrienne. Cantonnée à l’introduction, à la conclusion, l’action laisse la place à une comédie de mœurs dans laquelle les hommes font de la figuration, autour du pôle d’attraction désigné par le titre drolatique, presque schizophrénique. Amnésique, la Patronne se recycle illico au creux d’un petit resto de quartier menacé par l’érection, terme connoté, adéquat, d’un futur centre commercial aux mains de vandales en costard bien sûr noir. À Séoul aussi, le capitalisme sévit, sa collusion avec les triades locales en bonne logique économique, symbolique. Le conte sexué, peu sexuel, gentiment marxiste, pourrait d’ailleurs se dérouler du côté de Hong Kong, de ses castagnes et de ses sarcasmes cinématographiques d’autrefois, pourquoi pas. Certes, le menu manque de saveur, d’ampleur, soigné, impersonnel, au risque du télévisuel. Il se suit cependant sans déplaisir, on vit pire, il repose sur les épaules de la sympathique et assez keatonienne Shin Eun-gyeong, sorte de Michelle Yeoh déguisée en cuistot. Chouchou (Tsu Tsu en VO) chute donc deux fois, perd la mémoire, la retrouve pas trop tard, brise un miroir, s’électrocute, hirsute, s’affame de foudre, apprend à faire des pâtes, patatras. Rescapée de son vol plané depuis le building ludique, son chaos tout en haut, escortée en contrepoint par l’increvable White Christmas de Bing Crosby, elle atterrit sur un camion de volatiles puis sur le pavé, à proximité d’un restaurateur au grand cœur, appréciable Park Jun-gyu, célibataire (durant dix-sept ans) bourré en train de chantonner puis de pisser, POV renversé de la doublement atterrée.


Le type élève seul une gamine rétive, harcelée par des consœurs en uniforme nippon, allons bon, au cutter rose, admirez le sens du détail. Évidemment, la maîtresse du gang des ciseaux viendra fissa lui donner un coup de main et… de peigne, affreuses coiffures en récompense des maltraitances. Sinon, la Mygale malmène son ennemi le Squale, doté d’un collier vocal qui déraille, lui fait changer de genre, croise la route d’un investisseur vétéran, mélomane d’amours rémunérées, d’une connaissance experte en séduction, en poitrine agitée, en doigts embouchés, apprivoise la petite bâtarde précitée, roule en scooter de cascadeur, in extremis, en image fixe, combat en l’air une ultime adversaire very vénère, dealeuse hautaine en talons hauts, en pantalon rouge et lèvres idem, caméo muet en mode mannequin de Zhang Ziyi, alors entre Hero (Zhang Yimou, 2002) et 2046 (Wong Kar-wai, 2004). La coda cohérente survient après le sacre du braquage de banque avorté (parturiente rouée de coups de pied) et l’opprobre express (rivale joviale), la bonne réputation regagnée, de la hors-la-loi pas tellement immorale, malgré son maigre moral face à la mort de son sauveur, Judas à la rescousse embroché sur une lame maousse, à l’épouse décédée en couches. Ma femme est un gangster 2 s’avère-t-il en vérité, au vu de ce qui précède, divertit, mélange le drame et la comédie, renverse les rôles, culbute les habitudes, un film féministe ? Pas vraiment, puisque dépourvu de victimisation, de récrimination, de néologisme à la con (« féminicide », Seigneur). Montée par  Go Im-pyo (Deux sœurs, Kim Jee-woon, 2003), cette suite d’un succès en Asie, deuxième volet moins rentable d’une trilogie locale, s’assortit d’un sbire baptisé RoboCop, et hop, d’un tueur chanteur hospitalisé, because culotte colorée, adieu à ses valseuses, entre les mains d’un médecin au féminin, d’un vestiaire de mecs immobiles et d’un serpent croqué cuit histoire de se souvenir de jadis. En résumé, rien de roboratif, toutefois du festif, à déguster en soirée, avec ou sans sa moitié en son royaume manifesté.

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