Hard Candy
Un métrage, une image : Chromosome 3 (1979)
Personnage mémorable, inoubliable,
captivant, poignant, elle donne corps à la poétique de Cronenberg, quasiment
malgré lui, en dépit de son règlement de comptes personnel, fantasmé, elle
inverse les valeurs (du cinéma, de la morale, du biopic générique) et oblige le spectateur à repenser les concepts
de maternité, de parentalité, de beauté (ou de laideur), de maladie (mentale).
Nola n’en fait qu’à sa tête (un salut à la Darling de Spike Lee), finit par la
perdre, étouffée par les mains serrées de son ex effaré, ulcéré (le menteur énamouré « coupe le
cordon » d’avec les avortons, rend muette la bouche ensanglantée, jadis
embrassée, de la vestale immaculée, qui le défie de la tuer, brouillon de la
silencieuse supplication de Seth Brundle dans La Mouche, montée en
parallèle avec les cris de Candy), débouté par avance par la loi sexuée,
sentimentale (ses preuves de polaroïds raviraient désormais les photographes
pédophiles). La victoire du survivant – Raglan périt, courageux occis par les
démons de sa déraison d’hubris – reformule la fameuse à la Pyrrhus, défaite de
prophète (marques dédoublées, cutanées, signature au carré du génétique sort
jeté), sise dans l’habitacle d’une automobile en fuite et en route vers nulle
part, sinon la réjouissante et romantique « foire aux atrocités » en
réunion de Ballard et sa bande (Crash), grands enfants orphelins
privés d’héritiers, entièrement dévoués à du sexe déconnecté du moindre soupçon
de reproduction (la pilule passa par là, la procréation in vitro également). Candice et son papa ne verront pas le bout de
la nuit, père et fille réunis et cependant à jamais séparés par ce qu’ils
viennent de traverser, 90 minutes d’un voyage toujours vivant et parfois
bouleversant. Personne (surtout pas eux) ne saurait échapper à sa condition
cabossée, cicatrisée, outragée, aux blessures infligées par des gens qui
s’aimaient, qui s’aimèrent, qui s’affrontèrent sans une once de pitié.
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