Carrie au bal du diable : A Bucket of Blood
Le succube et le chevalier, le dissimulé du (dé)montré…
Comme John Travolta en coda de Blow
Out
(1981), Amy Irving arrive trop tard pour déjouer le désastre ; elle
part aussi trop tôt, mise aussitôt à la porte par sa prof de sport, afin d’assister au massacre en
huis clos, aux allures de frénétique fourneau, spectacle cependant point perdu
pour la principale intéressée ensanglantée, sidérante et sidérée, implacable et
(presque) pardonnable, ni pour le couple apeuré, tireur de ficelles, plutôt de
corde, pas celle de Hitchcock, témoins malsains d’un gymnase en effet d’enfer,
fissa transformé en cruel et drolatique cimetière. Sous tous ces yeux n’en
croyant pas les leurs, dont les nôtres ad
hoc, se déploient et se dédoublent un cauchemar matérialisé, une leçon de
réalisation, une punition collective de vraie-fausse sorcière very vénère, reine truquée de promo pas
très catho, devenue illico dingo.
Dans cette scène assez sublime, au sens kantien du terme, donc mélange de
terreur et de beauté, de l’increvable Carrie (De Palma, 1976), Sissy
Spacek ne se soucie d’hygiénisme lycéen (de tampons hygiéniques sur elle jetés
par dédain) ni de harcèlement scolaire, par contre elle réentend, et nous itou,
l’avertissement de sa mère amère, intégriste peut-être lucide, puritaine
bientôt en déveine. Il semble que l’adolescente, par la sinistre plaisanterie
malséante, collante, à l’instant rendu cinglée, sa rage et sa puissance
décuplées, hallucine les phrases et les faces rieuses, odieuses, effet
kaléidoscopique inclus. Toutefois, chez ce cinéaste-là, le « à première vue »
paraît toujours malvenu, l’évidence ne saurait se revendiquer vérité, le
phénomène, du personnage perceptif, du mal nommé objectif, s’apparente à un
palimpseste. Dès lors surgit une seconde réalité, un filigrane encore plus
affreux que le seau désastreux, pauvre Tommy au tapis. Si l’éviction de Sue
réside sur un sentimental malentendu – elle doit la (sur)vie à sa supposée
jalousie ! –, la nuit de colère de Carrie, sorte de dies irae vite inversé, se base sur un péché partagé. Comme avec
Travolta, bis, la paranoïa(que)
pourrait par conséquent avoir raison. Ce doute fondamental, fondateur, du ciné
(de la société) US des seventies,
affirme de facto la dimension d’opus
politique du conte de fées défait, et Carrie en consœur de Jackie Kennedy.
En complément/développement, je vous
renvoie vers ceci.
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