Atomic Cyborg : Arizona Junior


Jack Kerouac ? Paco Queruak…


RoboCop (Paul Verhoeven, 1987) rencontre Over the Top (Menahem Golan, idem) dans ce métrage d’un autre âge agencé par l’aimable Sergio Martino, rebaptisé Martin Dolman selon l’exploitation à l’étranger, mégalithique Bretagne en bonus. Atomic Cyborg (1986) débute comme Invasion Los Angeles (John Carpenter, 1988), se poursuit comme Starman (John Carpenter, 1984), s’achève comme Frankenstein ; il adresse en sus des clins d’œil à Terminator (James Cameron, 1984), à Blade Runner (Ridley Scott, 1982), au Convoi (Sam Peckinpah, 1978) et envisagerait Universal Soldier (Roland Emmerich, 1992). L’intertextualité ludique joue aussi sur les prénoms, les patronymes, Linda telle Hamilton ou la scientifique appelée à la SP. Ce vrai-faux western tourné surtout en Arizona, sans syndicat, endeuillé par un vrai décès, en rime à celui de Vic Morrow sur le plateau de La Quatrième Dimension (Joe Dante, John Landis, George Miller, Steven Spielberg, 1983), séduit assez par son soin désargenté, son sentimentalisme adulte, cf. le refus de la fin heureuse, sa manière dynamique de manier les mythes US et européens, renaissance de seconde chance à l’Ouest ou homme-machine tourmenté. L’ancien soldat au Guatemala, blessé, rapatrié, devient donc un mercenaire robotisé, un tueur à la réalité physique augmentée, employé-téléguidé par un pollueur en hélicoptère, magnat d’usine(s) guère magnanime. John Saxon, syndiqué, ne monta pas à bord du joujou orthographique du Magnifique (Philippe de Broca, 1973) et cela lui sauva la vie. Autour de l’androïde musclé, d’abord dépourvu d’états d’âme, ensuite déprogrammé par un retour de/à l’humanité, grain de sable tragique, imprévisible par les cyniques, évoluent les silhouettes d’un homme politique écologique, aveugle clairvoyant, aux affiches affichant-détournant un slogan punk, de camionneurs délateurs ou au grand cœur, au serpent bruyant, de séides décimés, d’une tenancière de bordel, pardon, de motel, qui décida jadis de s’enterrer ici, loin de sa Suisse natale.


Souvent « cauchemar climatisé », relisez Henry Miller, le rêve américain déploie une imagerie mondialisée détournée dès les années 60 par les artisans transalpins, repensez par exemple au pionnier Sergio Leone déguisé en Bob Robertson à l’époque de Pour une poignée de dollars (1964), mélange d’opportunisme et de poésie, de recyclage et d’originalité, de distance et de truculence, sens duel. La violence à la fois excessive et inoffensive de l’opus, comportant trois explosions crâniennes et une décapitation méduséenne concoctées par le maestro Sergio Stivaletti, le place parfois en plein registre cartoonesque, salut à Sam Raimi, différent et similaire westerner (Mort ou vif, 1995), effet facétieux renforcé par une VF de VHS very vintage, aux répliques drolatiques, involontaires ou non, approximatives ou pas. Mais, in extremis, la mélancolie se manifeste, l’emporte, précédée par une traque point patraque, assemblage alerte de scènes d’action jamais simplettes. Divertissement sincère, tout sauf décérébré, Atomic Cyborg quitte le spectateur sur une question à la David Cronenberg, à la Philip K. Dick, à laquelle il ne répond que par un arrêt sur image et un court message à propos du commencement d’un autre temps. Le contexte post-apocalyptique se tamise ainsi d’une dimension nostalgique. En colère, en crise identitaire, le protagoniste réapprend à construire au lieu de détruire, à aimer au lieu de détester, à échapper à une pluie acide, à couper puis ranger du bois fissa. Et pourtant un doute ontologique évacue sa victoire vengeresse, malgré la présence rassurante, stimulante, confiante, fumante, de son Eurydice à porte-voix, de sa Lois Lane à lui. Son corps puissant et repoussant métaphorise/matérialise le film lui-même, alliage au plumage et au ramage mixtes, cosmopolites, tressage réussi d’origines réunies.


Tout ceci, porté par un plaisant casting international, citons la Suédoise Janet Ågren (La Plus Belle Soirée de ma vie, Ettore Scola, 1972, Ingrid sulla strada, aka L’Hystérique aux cheveux d’or, Brunello Rondi, 1973, Frayeurs, Lucio Fulci, 1980, Kalidor, Richard Fleischer, 1985), l’Italien George Eastman (The Belle Starr Story, Lina Wertmüller & Piero Cristofani, 1968, Satyricon, Federico Fellini, 1969, Anthropophagous, Joe D’Amato, 1980, Les Guerriers du Bronx + Les Nouveaux Barbares, 1982-1983 de Enzo G. Castellari, Les Barbarians, Ruggero Deodato, 1987), le local Daniel Greene, venu de la TV ; emporté par les synthés énergiques, attristés, de Claudio Simonetti ; visionné en ligne dans une copie impeccable, faisant honneur au travail du fidèle directeur de la photographie Giancarlo Ferrando, ne mérite ni le mépris ni l’évanouissement, mérite d’être apprécié posément, à l’instar d’items supplémentaires de la filmo du sieur Martino, je repense à La Montagne du dieu cannibale (1978), au Grand Alligator (1979), je repense à Ursula Andress & Barbara Bach, ah. Ni chef-d’œuvre ni navet, Vendetta dal futuro s’avère in fine une fable fréquentable, pour grands enfants pas si indulgents, une petite dystopie plutôt sympa, voilà.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les Compagnons de la nouba : Ma femme s’appelle Maurice

La Fille du Sud : Éclat(s) de Jacqueline Pagnol

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot : Le Trou noir