Vingt ans avant

 Exils # 35 (05/06/2024)

Donc en deux mille quatre, ce passé se rattrape, l’auteur Le Meur, dissimulé derrière un double pseudonyme dépourvu de frime, revoici Tarkovski et même Margaret Mitchell, revoilà pourquoi pas Asia (la Scarlett O’Hara de Autant en emporte le vent, justement, versus la Scarlet Diva de la fifille fébrile du caro Dario), ne se posait en avocat du dernier Coppola, imagier mégalo du bien nommé Megalopolis, ne critiquait par opposition, par-delà sa culturelle (sur)production, notre époque médiocre et sa mondialisée camelote, royaume à la gomme de singes sans méninges, pas seulement sur les écrans, mon enfant, salon à la con de « coiffeuses et coiffés » pour conférencier spécialisé, presque désespéré par les errances de la trance (de l’enfance, de la jouissance) et les solos du « réseau » (stimulation de la simulation baguenaude Baudrillard).

Fi de musique supposée « sociologique », de colères lapidaires (de quinquagénaire), d’ire en ligne, bonjour jeunesse, coupe courte, disque vif (t-shirt chic et shit).

Rassemblés, ranimés, ni relookés, ni remontés, ces moments de « temps scellé » (Andreï again) à présent et au présent s’écoutent ou s’acquièrent sur Bandcamp (prélèvement de « sept pour cent »).

Brieuc les adoube, dédoublé, davantage âgé, rêve Rimbaud « teufeur », rien ne lui fait peur, parle de « poésie », qui, aujourd’hui, à part lui, oui ?

En résumé numérisé, sept pièces pas faciles, pas si difficiles, (il y « file », « (in)tranquille »), disons dix-huit minutes de synthétique tumulte, quelques guitares, aucun retard.

Urbain (parce ce qu’il le valait bien), rapide (point sous acide), polysémique (« vie barrée » voudrait dire vie partie, interdite, digne de l’asile), alcoolisé (mode mexicaine), emmerdé (merde à « l’emmerdeur » Emmanuel Macron), secoué, CQFD (« shak » de coda), BLM à demi mélodique, un brin robotique (adieu « D2 »), se soucie des « paradis du style », cède au cher Baudelaire le « spleen de Paris », tandis que Madame Anne Hidalgo, because JO,  se sert du « karcher » chipé au petit Nicolas, souviens-toi, en sa capitale cité cosmopolite et paupérisée : la fameuse foutue flamme infâme – (re)matez Les Dieux du stade de la douée Leni Riefenstahl, (re)lisez W (ou le Souvenir d’enfance) du pertinent et impertinent Perec – petit provincial tu filmeras, avec « du pain et des jeux » cet été censé asséché tu (t’)étoufferas, à moins que le terrorisme à domicile et médiatique ne te tétanise (BLM se rappelle « Paname au bord du gouffre », prophétie rétroactive).

De la rave le ravissement étymologiquement délirant, nul ne le sent plus vraiment, plutôt la poudre et l’épuisement, la reproduction de la contrefaçon (haro sur « l’aura » de l’œuvre artistique unique, comme le disait bien Walter Benjamin).

Neuf ans auparavant, le tandem de NTM se remémorait idem le jadis complice, le « Hip Hop sur Paname », les graffs et les « keufs », alors en bonne logique symbolique BLM adresse un clin d’œil drolatique et explicite à Kool Shen (à Bashung amen).

« Tu souris qu’à ton portable », « t’as plus vingt ans », le Berlinois breton, le Breton de Berlin, réactive de l’ancien, du déclin, cependant pas un instant ne dérive vers la « petite déprime qui dure », d’où découlent des « fresques rassurantes » d’imposture.

Contre le culte inculte, les suicides de Cobain & Curtis ; contre la soumise amnésie, l’évidente énergie ; contre l’aveugle et aveuglante « immédiateté », le regard retourné d’Orphée, cette fois-ci (dé)frisé, au cœur du rétroviseur révélateur, tel un sprinteur existentiel, l’explorateur acteur au contact de « conservateurs » (les spectateurs de BFM, comparatifs des extrêmes, ruminent leur haine), applaudissant des « progressistes » (le mine le mythe qu’il estime inoffensif du « wokisme »).

Skarlet & Stalker, à l’abri du « binaire », Brieuc Le Meur remet les pendules à l’heure (surtout la sienne), parcourt à rebours, à l’ombre sombre de l’Europe des autres (malchance de dimanche), des heures interlopes, entre (bon)heurts et syncope (il apprécie le sympathique et anecdotique 24 Hour Party People de Winterbottom, sur lequel j’écrivis, voui).

En deux mille vingt-quatre, début de décennie patraque, on (re)découvre son souffle et l’on retient le sien. 

Commentaires

  1. 24 Hour Party People, anecdotique, mais juste, puisque cette histoire du son est oubliée (déjà). Mais l'oubli EST le vrai projet...

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    1. https://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2020/12/kaleidoscope-sans-hitchcock-i.html

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