Susan Slept Here : Debbie Does Dallas
Délicieuse-dédoublée Debbie…
In memoriam of Carrie Fisher
Un oiseau de (Vanessa) paradis
relooké par (Jean-Paul Goude) Héctor Babenco ? Davantage un « dream
ballet » en forme de moralité. Pas encore incarcérée par décence de
policier, par magnanimité de Noël, Susan Landis déboule au domicile de Mark
Christopher, scénariste US oscarisé,
pourtant incapable de rédiger un récit au sujet – d’actualité, au ciné, cf. La
Fureur de vivre, Nicholas Ray, 1955 ou Graine de violence,
Richard Brooks, idem – de délinquance
juvénile et, rapetissée, se met à rêver… d’une cage, à défaut d’une cellule,
annonçant, bien sûr sans le savoir, les déboires molto cosmiques, poétiques,
philosophiques, de L’Homme qui rétrécit (Jack Arnold, 1957). La mineure vient
d’assommer un marin, alors elle « déplace », terme freudien, elle
déguise son logeur de malheur puis de bonheur, mécanisme
(d’attraction/répulsion) commun de la comédie sentimentale américaine, d’abord
agitée puis in extremis sereine. Sur
fond rose, elle s’oppose à une femme arachnéenne moins méta (quoique) et homo
que chez Babenco (Le Baiser de la femme araignée, 1985, autre histoire d’amour
onirique, politique, entre quatre murs clos). Sur le point d’être rescapée de Planète
interdite (Fred M. Wilcox, 1956), la réfrigérante Anne Francis défie
donc Debbie Reynolds, pour l’éternité cinéphile la Selden Kathy de Chantons
sous la pluie (Stanley Donen & Gene Kelly, 1952), eh oui. Au
milieu, Dick Powell fait de son mieux, fait ce qu’il peut, dix ans après C’est
arrivé demain (René Clair, 1944), au sein du sillage des Ensorcelés
(Vincente Minnelli, 1952). Dans son dernier rôle, le premier avatar de Philip
Marlowe s’avère un quinquagénaire émouvant et drôle, matelot à emmener, escorté
d’un serrurier à détrousser (Alvy Moore en assistant).
Néanmoins, hommage aux deux dames, à
leur(s) charme(s), à leur aura
d’au-delà (du réel, du temps de veille), la scène séduit avec ceci, émancipe le
reste du métrage de son origine théâtrale. Ces six minutes de culbute sans
turlute méritent une exhumation de saison, morceau de cinéma tout sauf concon. En
effet, flanqué d’un directeur de la photographie éclairé, applaudissez Nicholas
Musuraca, DP attitré de la RKO, je renvoie vers La Féline (Jacques
Tourneur, 1942), La Septième Victime (Mark Robson, 1943), Pendez-moi haut et court
(Tourneur, 1947) ou Le Voyage de la peur (Ida Lupino, 1953), quatre titres (en noir
et blanc) remarquables, magnifiques, en partie grâce à lui, Frank Tashlin, issu
du dessin, de l’animation, surtout (re)connu au cœur de l’Hexagone pour La Blonde et moi (1956) + Un
vrai cinglé de cinéma (bis), signe ainsi
une sorte de film dans le film, où l’ensemble possède le clair mystère du
symbolisme sexuel de Sigmund. Avec ce court métrage d’un autre âge, qui
cependant résiste à l’usure des ans, Susan découche (1954) se hisse
au-dessus de lui-même, renverse par avance et s’amuse du sombre songe
triangulaire, mortifère, de Sueurs froides (Alfred Hitchcock,
1958). Qui, de la vamp ou de la vagabonde,
de la « femme fatale » ou de la fille idéale, l’emportera au
final ? La fin ne fait aucun doute, on s’en doute, la réponse désherbe
les ronces, permet à l’ersatz urbanisé de Cendrillon d’épouser pour de bon son
papa par procuration, pain béni pour les psys. Chorégraphié par Robert Sidney (Traquenard,
Ray, 1958), musiqué par Leigh Harline (Pinocchio, Walt Disney, 1940), le
numéro souriant, sensuel, illumine l’item
produit par la propre fifille de Louella Parsons, lui confère une dimension supplémentaire, entre spectacle spéculaire et séance d’analyse
spectaculaire.
Debbie, réveillée, malmène la sage
image (maudit mariage) de l’aimé, maltraite son oreiller, mais son trip comique, érotique, démontre la discrète maestria du
réalisateur, certes ni rival de Minnelli (personne ne le lui demande) ni nanti
de la MGM (épure guère impure, par conséquent). Une séquence anecdotique,
archéologique ? Un moment plein d’allant, éclairant et charmant, aussi
souple que l’acrobate Debbie, aussi léger qu’un sien baiser (de ciné).
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