Les Loups de haute mer : Commando pour un homme seul

 

Chercher la femme, ne rechercher l’infâme…

Fable féministe fardée en film d’action, sinon de science-fiction, car Roger Moore misogyne, puisque Tony Perkins terroriste, Les Loups de haute mer (Andrew V. McLaglen, 1980) cristallise les contestations sexuées de la décennie en train de se terminer, les développe d’une façon positive et apaisée. À contre-emploi, sans doute il s’en délecta, le regretté Roger les « femelles » ne peut supporter, en raison de raisons familiales puis conjugales formulées, indices pour expliquer, pas pour justifier. Il s’avère cependant capable de reconnaître les qualités du Premier ministre, interlocutrice complice, a contrario de facto de l’infecte Margaret : « Cette femme vaut bien deux hommes », en effet, tout comme le vrai-faux « garçon » survivant, dissimulé, frigorifié, auquel il devra la vie, sous la douche chaude, il se surprend de ses seins, donc de son sexe, vive la vapeur, vive la valeur, il l’admet dans l’immédiat et l’en remercie aussi. Auparavant, avant de croiser la cuisinière à coupe courte, à café trafiqué, à collègue sous ses yeux empoisonné, qui faillit se faire violer par l’un des salauds à main armée, il prenait place parmi un compartiment de première classe, y recadrait à coup d’interdiction une fumeuse hargneuse, vraie-fausse contrôleuse, vite déguerpie en compagnie de sa silencieuse serpillière de maudit mari. Le barbu bienvenu carbure au scotch d’Écosse et à la couture qui dure, possède un coffre fourni et une flopée de félins mimis, tant pis pour les pussies à double sens d’un célèbre et soi-disant sexiste agent au service of course secret de Sa Majesté, chacun le sait, surtout au ciné. Pas fou de minou, en tout cas celui des ressortissantes toutefois bienveillantes du classé deuxième sexe, le mec à commando et à canevas pratique par exemple une goujaterie distinguée, exemplaire, envers une estimable secrétaire, certes un peu tendue, à cause du contexte, rien d’inconvenant.

Mandaté par une société d’assurances, l’expert amer ne s’aperçoit que sa mission de simulation, fissa de réalisation, merci Tony, se place sous le signe d’une féminité démultipliée, d’adoubement biblique, chic – le ravitailleur de malheur et les plates-formes de pétrole indeed se dénomment ou plutôt se prénomment Esther, Ruth, Jennifer, fichtre. Pendant l’épilogue de ses agissements genrés, de son dessillement ensoleillé, la directrice du gouvernement, via la sauveuse souriante précitée, à proximité de la secrétaire point rancunière l’applaudissant, ne lui offre ni médaille ni pierraille, mais trois immaculés chatons trop mignons, idem dotés des pareils prénoms. Si une femme, pénible parité, parfois se précise en salope certifiée, ou digne de vivre et crever à égalité avec ceux d’à côté, Rufus ffolkes l’affirme de manière guère magnanime, cela ne saurait constituer une généralité, moins encore légitimer une méprisante moralité. Il faudra par conséquent un divertissement divertissant, d’antan, un opus plaisant, transparent, afin de l’afficher, d’en faire prendre conscience et profiter au stratège à l’aise, appelé en plus Excalibur, épée mythologique, puissance phallique, dont la vide vie virile, à exercices masculinisés, minutés, à château au bord de l’eau, écarté, isolé, s’identifie en définitive à un piège, voire à un sacrilège. Tandis que le film dit de commando repose en pleine partie, grosso modo, sur une camaraderie en autarcie, jadis assumée, peut-être désormais dépassée, Les Loups de haute mer vogue sur une autre mer, une autre mère, du même élan esquive l’écueil du manichéisme, de la misandrie, de la victimisation. Ainsi, James Mason et un mari second font transmettre à leurs épouses respectives un dernier billet doux, en prévision d’un possible sacrifice.

Dirigé par le réalisateur du davantage mineur Le Commando de Sa Majesté (1980), éclairé par le professionnel DP Tony Imi (Enemy, Wolfgang Petersen, 1985), produit par l’anglophile Elliott Kastner, collaborateur de Michael Winner (Le Corrupteur, 1971) & Alan Parker (Angel Heart, 1987), et interprété par un casting choral impeccable, pourtant évident véhicule accepté par le principal intéressé sur la recommandation de sa moitié, Les Loups de haute mer corrige de surcroît l’inquiétude technologique, écologique, de l’apocalyptique Holocauste 2000 (Alberto De Martino, 1977), au passage co-production italo-britannique, entretient un suspense modeste, serein, aux effets soignés, à l’homosexualité suggérée, l’ami de Tony ne me contredit. Il doit itou beaucoup à la brève Lea Brodie, à l’aristocratique Faith Brook (L’Arme à l’œil, Richard Marquand, 1981), à la réactive Jennifer Hilary (Les Héros de Télémark, Anthony Mann, 1965), trio de femmes fréquentables, de personnages pertinents, d’actrices tout sauf décoratives. Testostérone à la gomme ? Concorde pas conne.   

Commentaires

  1. Roger Moore en vieux briscard, scotch à broderie et caresse féline portées aux nues, dans la confrontation maritime chacun cherche son diable, nonobstant la manipulation parente de certaine forme d'intelligence de certains messieurs pragmatiques,
    jeux du cirque de plateformes obligent...
    un film vu il y a bien longtemps, souvenir de l'élégance et l'humour de Roger Moore acteur capable de surprendre,
    étonnement rimant avec plaisir sous entendu
    comme le soulignait un poète qui préférait les hommes aux femmes...

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