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Affichage des articles du juin, 2018

Pandora : Quelque part dans le temps

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Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre d’Albert Lewin. Demoiselle de Magdala ou Miss Reynolds, la foi demeure un motif fondamental de Pandora , film admirable, étonnamment amusant, qui repose en partie sur l’idée discutable, sinon détestable, de Sacrifice, marotte romantique, patriotique, de messie christique et de kamikazes asiatiques. Ava Gardner, à l’instar de Clark Gable, à tort, ne s’adouba jamais véritable actrice, et dans ses mémoires lapidaires, elle ne s’attarde guère à propos de Pandora , sinon pour souligner qu’il changea sa vie… en lui faisant découvrir l’Espagne, cela et rien de plus, comme dirait le corbeau de Monsieur Poe. Cependant, elle dut croire en son talent, au film d’Albert Lewin, réalisateur-scénariste-producteur qui en retour crut en la star , sut à la fois la diviniser, la rendre humaine. Notre cinéaste, aussi raffiné que Mankiewicz & Minnelli, moins sarcastique que le premier, mélodramatique que le second, filme une histo

Marie Madeleine : Les Démons de Jésus

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Une femme, plusieurs hommes ; à défaut de gang bang , un Big Bang peu copernicien. En vérité je vous le dis, voici un évangile végan au révisionnisme féministe. Œcuménique et anachronique, ce pensum bien-pensant, que devait distribuer aux USA un certain Harvey Weinstein – si les voies du Seigneur s’avèrent impénétrables, l’ironie du sort s’affirme infernale –, ne possède pas une once de foi dans le cinéma ni dans la féminité, réalité plurielle, contextuelle et individuelle, que les deux médiocres scénaristes du dit « deuxième sexe » entendent présenter, représenter, on se demande au nom de quoi et de qui, qu’elles réduisent, suivant la vulgate du temps désespérant, à des victimes désignées, in extremis émancipées, amen . Le réalisateur australien, metteur en scène amateur de MJC cosmopolite, semble se prendre pour un Pasolini transgenre, mais l’aridité des panoramas ne saurait équivaloir à une quelconque rigueur intérieure, à un dépouillement orienté vers le transcendant

Les Ailes de la victoire : Looking for Eric

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Prier pour ses ennemis ? Pardonner un péché de ciné.   Ce mélodrame martial clairement anémié, à l’image du personnage principal, représente un triple intérêt. D’abord, il témoigne de la mondialisation du cinéma, phénomène pérenne aujourd’hui redéfini par l’hégémonie de l’économie de marché. Exit , « Hollywood sur Tibre » ; fini, le temps d’artisan des co-productions européennes, par exemple entre la France et l’Italie ; adieu aux délocalisations d’un Samuel Bronston, parti jadis bâtir des châteaux, pardon, des studios, en Espagne. Désormais, sur l’échiquier de l’art industriel, l’Asie et les États-Unis se livrent une partie placide, de complicité rémunérée. La Warner et compagnie(s) ne l’ignorent plus : le soleil se lève à l’Est, c’est-à-dire en Orient, terre d’opportunités pour investisseurs étrangers, alléchés par le nombre de spectateurs potentiels indigènes, auxquels un niveau de vie revu à la hausse permet d’accéder à des salles ouvertes sur l’international, elles-mêmes

Death Wish : Le Livre d’Eli

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  « Gardez la foi » affirme le flic au veuf – on préfère le doute devant telle déroute.   Eli, Eli, lama sabachthani ? Matthieu, 27, 46 Vingt minutes de présence puis la chère Elisabeth Shue disparaît, au propre, au figuré. On la comprend, on voudrait en faire autant, cependant, indépendance et conscience de cinéphilie, il faut boire jusqu’à la lie, il faut voir jusqu’au bout l’ineptie. Qu’arrive-t-il à Eli Roth ? Qu’arrive-t-il au cinéma américain ? Que nous arrive-t-il à nous, qui croyons encore au cinéma, pour mériter ça ? Death Wish (2018) constitue un cas d’école, un symptôme, un simulacre qui cristallise une grande partie de la modernité audiovisuelle, désignée ciné par abus de langage. À propos du pareillement léthargique Le Jardin du diable (Hathaway, 1954), Bernard Herrmann, fi de diplomatie, admettait pouvoir habiller le cadavre mais pas le ranimer : voici un métrage totalement inanimé, désincarné, exécuté, terme idoine, avec une absence ahurissante d’inv

The Hollow Child : Sam, je suis Sam

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Des bois, du désarroi, des frissons, de l’émotion – cinéma de maintenant, à saluer. On sait depuis M le maudit (Fritz Lang, 1931) ce que signifie perdre un enfant à l’écran ; on découvrit avec Simetierre , le livre (Stephen King, 1983) + le film (Mary Lambert, 1989), qu’il peut exister pire que cette perte, que le parent survivant, ordre du monde renversé, le père enterrant le fils, doit désormais affronter ce qui remplace le disparu, se substitue à lui, changeling des contes anglo-saxons ou mort-vivant juvénile (avant épouse putréfiée) selon l’auteur majeur de Pet Sematary . Oublions vite l’homme homonyme de Paul Verhoeven ( Hollow Man , 2000), relecture laborieuse, en effet creuse, de L’Homme invisible de Herbert George Wells (1897), malgré son évocateur écorché, en dépit de la chère Elisabeth Shue, et penchons-nous sur le vide infantile, au sens fort, du titre. Olivia disparaît donc dans une forêt, tandis que Sam, sa sœur adoptive, plus âgée, fume un joint roulé de ses

Vacances romaines : Kill Bill

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Un week-end à Rome, dixit Daho ? Une étape déconfite, diluée, malgré Audrey.     Débuts reconnus, oscarisés, d’Audrey, développement-renouvellement du littéral « Hollywood sur Tibre », dans le sillage des sandales prosélytes de Quo vadis (LeRoy, 1951). Au début, cérémonie de procession, escarpin symbolique, la royale Ann s’ennuie et nous aussi. Plus tard, piazza di Spagna, sur le célèbre escalier, munie d’un cornet glacé, elle interroge son compagnon d’occasion, à propos de la puérilité de ses projets pour la journée. Ensuite, à domicile, face au rédacteur en chef indocile de la feuille de chou d’exil, Joe résume l’absence éthique d’article stratégique : « Il n’y a pas d’histoire ». En effet, hélas, et le film lui-même paraît par trois fois signifier cela. En pilotage automatique, appliquant platement avec sa caméra une doxa inanimée, soignée, anesthésiée par sa star à la grâce de danseuse, au physique dessiné par les privations de la guerre davantage que révolutionnaire,

Euthanizer : Un homme et son chien

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Silence de la souffrance, morts en miroir, nouveau départ arrivé trop tard. Comédie dramatique drolatique, émouvante, intelligente, Euthanizer (2017) repose sur un trio de personnages : un tueur avec du cœur, un mécanicien magouilleur (presque pléonasme) et une infirmière sincère. Autour d’eux gravite une fine équipe de nationalistes racistes (pléonasme plein), qui va précipiter le drame et pousser le héros dans ses derniers retranchements d’embrasement, puisqu’il incendie le responsable infernal de l’immolation de son canidé rescapé, avant de se renverser dessus le reste d’essence, suicide surprenant et cohérent. L’épilogue le portraiture en momie à la Polanski, celui du Locataire (1976), en tout cas, similaire sismographie sociétale, son amoureuse à son chevet lui demandant s’il veut écouter de la musique, euphémisme pour signifier une euthanasie jolie. D’une main bandée, il caresse le visage de la jeune femme à la beauté singulière, au sourire roux radieux, de l’autre, i