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Affichage des articles du août, 2014

Memento : La Mémoire dans la peau

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Un homme se réveille dans une chambre d’hôtel, ne se rêvant plus papillon mais juge et bourreau – au spectateur de créer sa réalité purement cinématographique, de co-réaliser le film qui s’y prête et réclame sa participation active : souviens-toi que tu vas mourir, mais n’oublie pas de créer ton propre monde auparavant, car l’autre continue à exister « les yeux [grand] fermés ». Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit : " Souviens-toi ! Les vibrantes Douleurs dans ton cœur plein d'effroi Se planteront bientôt comme dans une cible, Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dévore un morceau du délice À chaque homme accordé pour toute sa saison. Baudelaire, L’Horloge , in Les Fleurs du mal Dans Blow-Up , l’agrandissement d’une photographie faisait disparaître un cadavre, rendu à l’abstraction du grain, indiscernable dans la ve

Après la pluie : The Blade

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Derrière ce titre, aux allures d’un morceau de Satie, se cache une émouvante fable morale sur la bienveillance, le déshonneur et la liberté, écrite par Kurosawa, filmée par Takashi Koizumi, son assistant et ami de trente ans. Le film, dédié à sa mémoire, s’ouvre d’ailleurs sur trois photographies en noir et blanc du réalisateur au travail. Élie Chouraqui, coproducteur inattendu, en raison du manque de financement international, nous apprend que la mort seule (et l’attente de l’actrice principale) l’empêcha de mettre en scène ce testament, qui s’abreuve à l’ensemble de sa filmographie, ainsi que le récit à l’eau du ciel ou de la terre, avec la présence concrète et symbolique d’un fleuve rappelant celui de Renoir. De ses premiers plans jusqu’au dernier, l’œuvre respire remarquablement, inscrite dans l’animisme de la culture asiatique, le shintoïsme « naturel » irriguant, entre autres, aussi bien La Harpe de Birmanie (notons que Koizumi travailla pour Ichikawa) que les dess

L’Impératrice rouge : Identification d’une femme

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Loin des vieilles légendes factices et des mythologies paresseuses, redécouvrons ce biopic éblouissant, charnel et spirituel, intimiste et politique, rapide comme un cheval au galop, intemporel comme un baiser.   Après un étonnant carton – NRA members : We do our part – et le générique, où le nom du directeur de la photographie, Bert Glennon, apparaît sous celui du scénariste, Manuel Komroff (collaboration d’Eleanor McGeary, non créditée), von Sternberg, de son agile caméra, surplombe la chambre d’une petite fille, princesse en devenir, se rêvant danseuse et non pas reine : Maria Riva, la fille de Marlene Dietrich, qui signera plus tard une biographie paraît-il haineuse de sa mère (comme la fille de Bette Davis), incarne Catherine enfant. Le jeu de miroirs méta se met en place, par un clin d’œil le film révèle sa nature personnelle et sa forme véritable, justifiant toute sa luxuriance esthétique, sa portée symbolique : un précepteur lit à la gamine les hauts faits