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Affichage des articles du octobre, 2020

Ne vous retournez pas (2) : Un mois de cinéma

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  Des films, des films, des films … Frime futile ? Exil utile ! À la mémoire de Sean Connery (1930-2020)   L’Ange meurtrier (Larry N. Stouffer, 1974) Carrie au bal du diable en brouillon, en version Stevenson, dont le bel intitulé français congédie le jeu de mots multiple de l’original, Horror High , pas grave. Premier opus du peu prolifique Larry N. Stouffer, ce métrage méconnu, tourné en deux semaines, mérite sa (re)découverte, sinon son culte discret, car Pat Cardi & Austin Stoker, émouvant, élégant, y forment un estimable tandem espiègle, en écho à ceux de Columbo : du lycée soigné, allez… Le Baiser du diable (Jordi Gigó, 1976) Le strabisme de la Française Silvia Solar s’avère certes irrésistible, cependant l’on sourit assez souvent à cette version hispanique du féminin Frankenstein . Escortée par l’accorte Evelyn Scott, soubrette pas simplette, zombie si jolie, par un scientifique cardiaque et télépathe, notre héroïne, presque marxiste, cherche donc à conjurer son

Dédée d’Anvers : Le Port de la drogue

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  L’infâme veut s’enfuir à Rotterdam, gare aux représailles de la dame… À nouveau voici l’assez sublime Simone Signoret, cette fois-ci en dépressive prostituée. Une femme, trois hommes, plusieurs possibilités, une seule impossibilité : la sudiste Dédée, maltraitée par Marco son proxo, s’offre fissa à Francesco, selon le souhait du sentimental M. René. Certes, Dédée d’Anvers (Yves Allégret, 1948) doit beaucoup à son actrice principale, capable de composer avec habileté, sensibilité, une entraîneuse jamais oiseuse, emmerdeuse, toujours attachante, émouvante, y compris lorsqu’elle écrase en voiture son souteneur saoul, assommé, assassin mesquin de marin italien. Mais ce métrage d’un autre âge, en sus d’être bien servi par des acteurs de valeur, je parle de Bernard Blier, par procuration papounet, de Dalio, impitoyable et pitoyable salaud, de Marcel(lo) Pagliero, amoureux bienheureux, malheureux, ne se contente pas de ressusciter un fameux romantisme maritime, déjà illustré durant les s

Someone to Watch (Over) Me

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  Souvenir d’un visage, description d’un paysage… Enfant sauvage à la François Truffaut ? Femme de trente ans à la Balzac ? Un peu, peut-être, puisque Jacqueline Waechter alors trentenaire, à l’instant où elle pose, se pose, devant l’objectif subjectif d’une connaissance d’enfance – mais, justement, sans prendre la pose, sans poser pour la postérité. Observer ce visage avancé, à la tête un brin baissée, en clair-obscur composé, revient, bien sûr, à revenir vers un personnel passé, pour le lecteur en ligne étranger, pour le complice correspondant en partie, en pudeur, partagé. Sa biographe Camille Stern évoque les tournesols domestiques, esseulés, de van Gogh, les œuvres de Giacometti, son visage à lui, la révélation de Venise, l’épiphanie de Pompéi, des cinéastes d’Italie, l’appartement d’Apollinaire, tout ceci se retrouve ici, stade, station, informe en filigrane les traits, leur confère une force fragile, une intensité intérieure. Le modèle, doté de mystère, davantage qu’exemplaire

Les Cauchemars naissent la nuit + Exorcisme : Francofonia

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  En mode Belmondo : « Vous n’aimez pas Franco ? Allez vous faire foutre ! »… Titre poétique, pour opus onirique : dans Les Cauchemars naissent la nuit (Jess Franco, 1970), escortée par le score inspiré de Bruno Nicolai , Anna narre à un médecin malsain, à silence de sacristain, in extremis assassin, son destin lesbien, un brin brechtien, en vain indien. Victime (in)volontaire d’une voleuse machiavélique, la voici vite, programme hypnotique, malédiction cinématographique, conduite au suicide, antidote ad hoc , molto baroque, remarquez les multiples miroirs mouroirs, superbe, spectral, droit au creux des yeux malheureux, monté en alternance avec un accouplement de perdants, à sa supposée insanité, à ses mains par les mauvais rêves, par la réalité, elle ne le sait, le lendemain ensanglantées. Muni d’un monologue off , oh, les innombrables maux du monde immonde, son trépas personnel cependant se développe, jusqu’à endosser une culpabilité décuplée, datée, disons ethnocentrée, comme

La Femme-objet : Le Jouet

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  R2-D2 rend heureux ? Bien mieux à deux… Romancier de SF, obsédé par le sexe, Nicolas n’en finit pas, de taper à la machine son passé de machine(s), confession off , autobiographique, alcoolique, tabagique. On trouvait auparavant, dans Le Sexe qui parle (Frédéric Lansac, 1975), le pantin transalpin : revoici Pinocchio, cette fois-ci en filigrane du scénario, flanqué de Frankenstein, sa créature, accompagné de Pygmalion & Galatée. Galactique, la robotique Kim, ainsi prénommée en souvenir de ciné, amitiés à Mademoiselle Novak ? Plutôt mutique, « charmante mais pas causante », comme le remarque la maîtresse exaspérée, je ramasse mes affaires, je m’en vais. « Mieux qu’une poupée gonflable », en effet, la partenaire trop parfaite, a priori idéale, en réalité fatale, sa bouche rouge utilise à d’autres tâches, de sa langue nettoie la tache, de sperme, déposée sur la peau, d’ébène. Car le Nico, marri de sa surprenante autonomie, lui substitue, aussitôt, une consœur selon son cœur, fan

Phantom of the Paradise : Black Swan

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  Disons De Palma décrit par Derrida… Pour la précise et précieuse Jacqueline A Que le cinéma, de façon fondamentale, s’avère un art funéraire, nul ne le niera, surtout pas Jacques Derrida. La chère Jacqueline Waechter m’orienta vers cet article signé Adolfo Vera, basé sur deux « interventions » du penseur de la « déconstruction ». Au lieu de commenter un commentaire, merci mais mieux à faire, de (re)formuler mon propre rapport au ciné, à ses fantômes, en effet, en reflet, à son miroir mouroir, donc à notre interminable mort, une fois encore, je décidai de réactiver le vocabulaire derridien, d’appliquer ce particulier lexique, en projecteur cinématographique, parmi le Paradis ; voilà le résultat, appréciable ou pas. Auparavant, en 2015, voici ce que j’écrivis, avec ma voix (voie) à moi, au cours d’un parcours intitulé  L’Insoutenable Légèreté de l’être : Notes sur les comédies musicales  : Vicki Page résonne avec la Phoenix incendiaire de Phantom of the Paradise : Brian De Pa

Fantômas : Un pays qui se tient sage

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  Adieu au sérieux, bienvenu au malvenu… …la Déesse est d’abord un nouveau Nautilus. Roland Barthes, La nouvelle Citroën , Mythologies , 1957 De plus, il n’y a pas d’histoire apolitique. La politique se glisse toujours dans les histoires. Christian Petzold, entretien du dossier de presse de son Ondine (2020) Un demi-siècle divise Fantômas (1913) et Fantômas (1964), cependant deux productions Gaumont ; une guerre, en partie française, les agrège, « Grande » ou « sans nom ». (Louis) Feuillade affichait sa frontalité (de proscenium ), sa profondeur (de champ), sa fatalité (de fuite), pour un polar de (peine) capitale, de couperet pirandellien, premier opus d’un serial plébiscité, surtout par les surréalistes. André Hunebelle, « un vieux monsieur délicieusement courtois et bien élevé », dixit , sur son site , la mimi Mylène (Demongeot), armé de son fidèle tandem de scénaristes, dont son propre fils, le dialoguiste Jean Halain, à ne pas confondre avec le romancier Marcel Al

Jacqueline : Quatre mains, deux claviers

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  Dialogue en duo, script en stéréo… Où sont mes racines Nashville ou Belleville Eddy Mitchell 1 Générique (de début) Elle s’appelle Jacqueline Waechter, je me nomme Jean-Pascal Mattei. On la sait Parisienne, on me situerait Marseillais. Les parcours nous séparent, la correspondance nous rapproche. En tandem , à distance, nous tenons des carnets de bord, de notre survivance, de nos réminiscences. Nous aimons le cinéma, pas toujours le même, pas toujours pour les mêmes raisons. J’esquissai son portrait, je lui proposai de réfléchir à sa cinéphilie. Ce qui suit constitue, en sincère simplicité, le témoignage créatif d’une amitié, au-delà de la virtualité.       2 Mon cinéma à moi 12 questions, 12 réponses Votre tout premier souvenir de ciné ? Un Laurel & Hardy, un souvenir précis, entre fou rire et chaudes larmes, la première fois que je me suis sentie en décalage avec une foule, je devais avoir quatre ans, je pleurais alors que les autres riaient… Parfois les