Articles

Affichage des articles du 2023

Les Fantômes du miroir

Image
  Exils # 13 (22/12/2023) J’écrivis, on le vit, sur Vecchiali, désormais (tré)passé de l’autre côté du miroir mouroir, du regard et des égards, comme quelques autres réalisateurs plus ou moins de mon cœur : Deville, Friedkin, Lado, Saura, cohorte pas en toc, à retrouver itou sur ce blog . Idem décédées cette année de ciné, déjà par moi miroitées, Mesdames Laurie, Lollobrigida, Stevens, Welch. Ainsi va la (sur)vie, de la nécrophile, dénommée cinéphilie aussi, vers la nécrologie, arts funéraires en reflet, sis sous le signe de l’éphémère, du lapidaire. Si les salles, croyait Artaud, pas trop marteau, ressemblent illico à des caveaux, certes confortables et climatisés, hédonisme et hygiénisme de la modernité, empreinte de pseudo-pandémie, les soi-disant vivants, souvent à demi mourants, zombies du mercredi, station d’évasion placée entre la famille, le domicile, le métier, le supermarché, emploi du temps occupant, préoccupant, mascarade macabre à la Romand, menteur errant racontant de

Fêtes funèbres

Image
  Exils # 12 (20/12/2023) Quel élément (du crime ricane von Trier) commun entre L’Inconnu du Nord-Express (Hitchcock, 1951), Furie (De Palma, 1978), Le Retour de l’inspecteur Harry ( aka Sudden Impact , Eastwood, 1983) ? Of course leur crucial carrousel, leur ritournelle mortelle de circularité conflictuelle et cruelle, leur virtuosité visuelle de boucle bouclée comme climax musical causeur de décès emballé, empalé. Le passé ne saurait (tré)passer, il signe et persiste, refait faire un tour de piste aux pantins promis à un impitoyable destin, montés sur un maudit manège ( dixit Djian) de péril et de piège. Parmi un parc de pacte patraque, au palestinien et espionné soleil d’Israël, du côté de l’obscure et encadrée Santa Cruz, la roue de l’infortune, diurne ou nocturne, châtie les pécheurs, deus ex machina de machine maléfique, en rime a la caméra a priori prima donna. De la même manière moins douce qu’amère, la fête foraine au ciné souvent ne se finit de façon sereine, celle

La Fin du film

Image
  Exils 11 (15/12/2023)   Ouvreuse deviendrait en anglais usherette  ; chut se change en hush  (Robert Aldrich opine ; Bette Davis rempile, cf. Chut... chut, chère Charlotte , 1964). Sis ainsi sous le signe du silence, sinon du secret, d’une vie secrète et d’une blondeur éclairée, Josephine Hopper, modèle, muse, épouse, peintre, alors à mettre en parallèle avec Marianne Faithfull ( A Secret Life , morceaux mis en musique par Angelo Badalamenti), le beau tableau du sage Edward ne figure plus cet « effondrement central de l’âme » dont Antonin Artaud se plaignait auprès du correspondant Jacques Rivière en 1924, qu’auparavant Poe donna à lire, à ressentir, au propre et au figuré, architecture d’usure, impure, promise à la fatale fissure, dans La Chute de la maison Usher , cimetière domestique puis aquatique à l’ironique patronyme en rime, parue en 1839. Au siècle suivant, à l’orée d’une année elle-même maudite, placée sous le sceau d’une destruction de masse encore inédite, il s’agit dava

Demain les souterrains

Image
  Exils # 10 (13/12/2023) Du père Forster, le cinéphile se souvient donc des adaptations en série d’Ivory, par exemple Retour à Howards End (1992), du dernier film de David Lean (La Route des Indes , 1984). La traduction en français, d’abord datée d’une dizaine d’années, puis rééditée en pleine « pandémie de Covid-19 », opportunisme d’alarmisme, d’une nouvelle assez ancienne, puisque publiée en 1909, s’inscrit ainsi au sein d’une réflexion structurelle sur les classes sociales, sinon raciales, de surcroit au creux d’un contexte conflictuel, de lutte et de trêve perpétuelles. N’en déplaise aux exégètes lui conférant fissa le statut d’ outsider , a fortiori classé en science-fiction, allons bon, elle ne révolutionne en rien l’univers poétique et politique de l’écrivain, plutôt le projette parmi une « méditation » aux allures de malédiction et faisant appel, dès l’ incipit , à « l’imagination » du lecteur, en sus située dans une atemporalité non dépourvue de britannicité, cf. le nom (W

Annick aime les sucettes

Image
  Exils # 9 (12/12/2023) Juliette Gréco jugeait misogyne l’émouvant et amusant Jolie môme , sa plaisante appropriation une façon de s’en réapproprier la féminité supposée maltraitée, de lui rendre son inexistante innocence en complice sororité. Que pouvait-elle penser, si encore la chanson d’exception elle connaissait, de Ton style , instrumental   recalé destiné a priori à Jean-Pierre Mocky, radical mélodrame – au sens étymologique de drame musical, au sens esthétique d’étude sociale – qui sans se soucier une seule seconde de sociologie, Dieu merci, tant pis pour l’affirmé anarchisme, résumait à lui seul les années soixante-dix, leur lyrisme dépressif carburant à la mélancolie, après l’euphorie de la précédente décennie, en dépit, certes, des dernières infamies de la guerre d’Algérie. Comme si soudain, du jour au lendemain, de midi à minuit, l’occidentale société dessoûlait, pénétrait de plain-pied au creux d’un cauchemar plus ou moins climatisé, Henry Miller very vénère, comme si

L’Aura de Barbara

Image
  Exils # 8 (11/12/2023) Faut-il se méfier des surfaces, a fortiori des films ? Davantage on devrait les sonder, discerner les symboles, sillage d’Oscar Wilde, préfacier du pétrifié puis putréfié Portrait de Dorian Gray , céder le sens, l’essence, à leurs obsédés, assermentés à main armée. Au sein du point malsain Dans le bain d’Hector (2019) se dissimule un mutique trésor, dans la baignoire à ne pas voir, hors-champ du ravalement, fi de mythologie, en dépit d’un Grec obsolète, aucun sex toy de traviole, canard de panard aussi canari que la robe jaune de Gena ni gênée ni négligée, ni Davis ni Rowlands, un cuni à Cluny, ça lui dit, gode ou licorne, à elle la couronne, et loin de l’Hadrien mémorisé de Marguerite Yourcenar, voici, parce qu’il le vaut bien, l’Adrien bodybuildé de Jom Roniger. Le trio de travaux, métaphore du court métrage lui-même à moitié work in progress , mastique (mastic du plombier, poncif à pénis des bandes spécialisées supposées à bander, distinguez ici le dis

Tombeau des Danaïdes

Image
  Exils # 7 (14/11/2023) S’il existe un cinéma de l’invisible, pour écrire vite, mystique et scientifique, les films invisibles ne s’identifient à celui-ci, pas plus à l’expérimental ou au non commercial, niches qui s’esquissent, accessibles en quelques clics, depuis la cinéphilie en ligne. Ils se différencient aussi des projets avortés, d’ultimes utopies de visionnaires de naguère, citons, exemplaires, les peu prolifiques et préoccupés par l’historique Leone & Kubrick, le premier cartographe de Léningrad, le second biographe de Napoléon, feuilleton de télévision à présent il paraît assuré par le spécialiste Spielberg, vingt-deux années après la reprise du script de A.I. ( Intelligence artificielle , 2001, sans space odyssey , olé). On pourrait penser qu’à côté des regrets la rareté s’avère un vrai critère ; au contraire, la profusion de la production défie toute idée de totalité, de saisie exhaustive et donc définitive. Le cinéma indien, massif et incertain, interdit ainsi, en

Rudolf en force

Image
  Exils # 6 (16/08/2023) Aussi sublime que la célèbre séquence de danse épuisante et enivrante des Chaussons rouges (1948) ? Presque, par procuration, en raison d’une captation pas trop à la con. Chez Powell & Pressburger, la bien mais mal-aimée sorcière Moira Shearer on s’en souvient se suicidait, in extremis et sans malice sur un tracé ferroviaire sautait, écartelée entre l’art et l’amour, entre deux mecs trop (mal)honnêtes, sommée de (se) décider, donc de décéder, in fine se sacrifier, même si fi de misogynie ici, n’en déplaise à la spécialiste Margaret Atwood, au regard en déroute. Parmi Shakespeare revisité par Noureev, on continue à déclarer encore je t’aime, toutefois on diffère de dilemme : aux amants épris et passionnés dès l’orée, love at first sight , nous dit Kylie, la rivalité familiale et la mise en scène funèbre de mise en abyme théâtrale s’avèrent en effet fatales, la fidélité d’un philtre factice, religieux, à la Tristan & Yseult, indémodables modèles d’aïe

La Moustache d’Angela

Image
  Exils # 5 (08/08/2023) Dans Dernière nuit à Milan (Di Stefano, 2023), le commissaire concluait : « L’argent, c’est le Diable incarné. » Presque quarante ans avant, dans Vivre vite (Saura, 1981), Pablo, soudain visé par sa moitié à main armée, philosophait en reflet : « C’est le Diable qui charge. » En réalité de thriller désenchanté, de chronique tragi-comique, de western solaire et sec, le succube se prénomme Angela, on appréciera, elle sème aussitôt la discorde et le désordre au sein du masculin trio, que composent un beau gosse timide amateur de BD, un pyromane couvert d’acné, un fournisseur de horse qui ne voudrait tuer, qui tue contre son gré. Pas bien malins, avec ou sans Malin, cette trinité ludique et pathétique cogite, s’agite et périclite du côté d’une Espagne banlieusarde et rurale. Du « centre géographique » doté de sculptures de « Sacré-Cœur », monumental et endommagé par les « rouges » d’une guerre méconnue du passé, en tous cas des jeunes gens se moquant du couple

De l’unité à l’union

Image
  Exils # 4 (02/07/2023) Moretti cite ici Demy & Fellini, explique Kieślowski, vante les Taviani, contredit (à tort) Cassavetes, « beau » et pseudo-porté sur l’impro, pratique la piscine tel Lancaster ( The Swimmer , Perry, 1968), imite même Brando KO sur un bureau ( La Poursuite impitoyable , Penn, 1966). Il refuse de finir le « film dans le film » sur un suicide, en dépit d’une corde au cou de célèbre studio, n’en déplaise à Pavese, élit plutôt Calvino, et achève l’œuvre élégante, émouvante, gentiment gérontophile, cf. les sentiments (pas tant) surprenants de l’actrice et de la fifille, la première un peu rebelle, la seconde un peu musicienne, en relisant et remarchant le fameux défilé par « Charlot » épousé à l’insu de son plein gré ( Les Temps modernes , Chaplin, 1936). Chez Poudovkine, une autre mère que celle du cinéphile candidat coco portait l’écarlate drapeau, succombait aussitôt, « mia madre » de 1926 terrassée par la charge tsariste. S’il se situe à Rome dès l’orée noct

Voix sans visages

Image
  Exils # 3 (21/02/2023) « On n’est jamais seul avec un livre », philosophait sagement Fanny Ardant, naguère sur la TSR. Pas de passivité non plus, car la lecture, surtout romanesque, nécessite compréhension et représentation. Les mots manient l’imaginaire, le style l’anime ou le ranime. Le cinéma impose sa loi, laisse souvent le spectateur en liberté très surveillée, acteur très dirigé, selon la célèbre définition de Sir Alfred. Lire équivaudrait davantage à se recueillir, à édifier un film intime de manière émancipée, subjective et collaborative. Dans le silence d’une discrète et radicale absence, au monde, à notre rôle, voici l’émule du moine, idem mutique mais démuni de (con)sacré manuscrit, emmené hors de lui et néanmoins ramené à soi-même, désaltéré, faux esseulé, à une source essentielle, intemporelle. Rossellini conférait à la clarté démocratique de la profondeur de champ une valeur déontologique, presque une vertu thérapeutique, propice à l’affranchissement, ici et maintenan

Nouveauté infaillible des vieux films

Image
  Exils # 2 (14/02/2023) Un certain soir, grandes ondes algériennes guère sereines, l’auditeur de valeur évoqua un « vieux film », sis au sein de « l’espace », sur une « station », où un « monstre » local carburait à la « peur » des inversés envahisseurs : le cinéphile pense bien sûr à l’appréciable et apprécié Planète interdite (McLeod Wilcox, 1956), annexé ici, autour de minuit, en allégorie de la solitude, son « emprise » de démon propice à la multiple et inacceptable « capitulation ». Le moderne « mal du siècle » de l’esseulement, de l’isolement, de « l’exclusion sociale », dixit l’auditrice fébrile et fragile, s’unit ainsi à de la science-fiction américaine ancienne, en partie portée par Robby le Robot & Leslie Nielsen… Les films peuvent-ils vieillir ? Ils peuvent plutôt (dé)périr, en dépit de la résurrection de la restauration, de la réanimation de la numérisation, des écrins d’éternité des écrans d’ubiquité, puisque soumis, en résumé, à l’improbable pérennité de supports a

Balades à Biarritz

Image
Exils # 1 (10/02/2023) Dans Le Voyage à Biarritz (Grangier, 1963), titre programmatique, le spot impérial apparaît presque un paradis d’utopie, une forme de graal familial. Idem père amer, Fernandel doit déjà se déplacer, même seulement en pensée : il ne s’agit pas encore de retrouver une fille prostituée ( Le Voyage du père , Denys de La Patellière, 1966), mais cette fois un fils ingrat. Escorté d’une Arletty délocalisée, le Provençal rêvasse donc à cette destination, à cette réunion. La brume d’écume, ou du plâtre des façades, car Biarritz semble souvent en travaux, sans cesse rénovée, partie perdu d’avance contre l’érosion, l’abandon, la morte-saison ; le soleil aussi blanc que le crémeux ou mousseux océan en mouvement ; la pénurie de passants, en dépit d’un hiver quasi caniculaire – tout ceci confère en effet à la petite ville maritime un aspect fantastique, une aura onirique, une saveur sucrée salée de songe instantané. Ainsi, aujourd’hui, à demi endormie, Biarritz se dévisa

Un livre, une ligne

Image
Les auteurs, les horreurs... Laissez-moi /Marcelle Sauvageot « Commentaire » amoureux Embrouille en Provence /Peter Mayle Tourisme marseillais Âme brisée /Akira Mizubayashi Mélodrame mélomane Éloge de la morue /Jean-Claude Boulard Documentaire testamentaire Sur le fleuve /Hermann Schulz Odyssée médicale La Douce Empoisonneuse /Arto Paasilinna Tragi-comédie gérontophile L’Éternel Mari /Fiodor Dostoïevski Vaudeville invalide Shirobamba /Yasushi Inoué Enfance d’impermanence Nouvelles du désert /Isabelle Eberhardt Mélancolie de l’Algérie L’Initiation d’un homme : 1917 /John Dos Passos Secourisme d’impressionnisme Deborah, la femme adultère /Régine Deforges Déterminisme d’évangélisme Chez Mrs Lippincote /Elizabeth Taylor Adultère d’Angleterre Le Mort qu’il faut /Jorge Semprun Recréation de rééducation Mon frère Yves /Pierre Loti Lyrisme du naturalisme L’Objet de son désir /Anita Shreve Mariage naufrage La Mémoire des embruns /Ka