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Affichage des articles du octobre, 2015

Je t’aime moi non plus : Hollywood et le reste du monde, d’hier à aujourd’hui

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Un vilain ogre et quatre gentils Petits Poucets ? Pas si loin, pas tout à fait… Actes d’un colloque tenu en mars 2010 à la Cinémathèque de Toulouse, Loin d’Hollywood ? Cinématographies nationales et modèle hollywoodien : France, Allemagne, URSS, Chine : 1925-1935 , sous la direction de Christophe Gauthier, Anne Kerlan et Dimitri Vezyroglou (avec la collaboration de Nicolas Schmidt), comprend quatorze chapitres et autant de contributeurs – chercheurs, historiens, universitaires, membres de la Bibliothèque nationale de France, des Archives françaises du film et du CNC, de l’Institut d’histoire du temps présent ou de l’Atelier de recherche sur l’intermédialité et les arts du spectacle –, dans une cartographie, en cinq grandes parties, du passage au parlant, à l’horizon (à l’ombre) du cinéma américain. L’ouvrage, qui se lit vite et bien, heureusement dépourvu du jargon, dérisoire dans son hermétisme, de certains (la majorité ?) travaux issus de l’enseignement dit supérieur (seule

Jesus Christ Superstar : Mon ami le traître

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Dans Un violon sur le toit , le protagoniste, subissant un avant-goût de pogrom, interrogeait, mains tendues et muet, le ciel de l’Histoire ; avec Jesus Christ Superstar , le retour aux sources (du paysage, du témoignage) s’apparente à une tentative de réponse et s’abreuve au lyrisme, perçu telle une prière vers les puissances destructrices et rédemptrices des êtres…       Chez Jewison, Judas aime jalousement Jésus, et lui reproche avec une amertume douloureuse sa célébrité, le fait avéré qu’il se partage avec d’autres, les onze disciples et tous les innombrables convertis dans son sillage irrésistible, scandaleux. Cette histoire d’amour entre deux hommes jeunes, le premier blanc et condamné à mourir, le second noir et conduit au suicide, excède l’amitié humaine en se jouant d’une interprétation homosexuelle contemporaine. On se brûle à se consumer ainsi pour un messie récalcitrant, dévoré par ses doutes, par sa rage pour ce monde si décevant, gigantesque marché matérialiste

Vedettes du pavé : La Môme

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Un ogre tendre, une charmante voleuse, un musicien lucide : exhumons un plaisant trio étonnamment « moderne », dont la « petite musique » un peu triste précède un grand désastre… Certes, il manque à cette réponse insulaire à Une étoile est née (l’original de 1937) un vrai regard de cinéaste (on ne se souvient aujourd'hui de l’américain Tim Whelan que comme co-réalisateur du Voleur de Bagdad , coincé entre les écrasants Korda & Powell, aux parcours davantage glorieux, ou William Cameron Menzies et Ludwig Berger, bien moins renommés) ; cependant, même modestement servi , le duo Vivien Leigh/Charles Laughton (Rex Harrison, sans une seule fausse note, apparaît plus effacé en compositeur et rival) séduit, alors que les acteurs, semble-t-il, se « détestèrent cordialement », selon l'expression d'usage et les biographes indélicats, l’occasion de saluer leur talent de professionnels (l’une des répliques du métrage) n’en laissant rien paraître, bien au contraire. Le

Vers l’autre rive : J’ai épousé une ombre

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Amours défuntes, amours des feintes (Serge pour Jane), réalité biaisée, reflet d’un ailleurs déjà là : suivons, avec ravissement, Mizuki, Yusuke et Kiyoshi dans leur trajectoire sentimentale et stellaire. Les doigts hésitants d’une enfant sur le clavier d’un piano, la main tendre d’une femme sur la joue d’un homme endormi : il faudrait pouvoir parler de Vers l’autre rive à son image, avec une infinie douceur, avec un tempo personnel et serein – « Vous devriez peut-être changer de rythme », suggère gentiment la mère au professeur particulier, peu convaincue des progrès de sa progéniture –, celui du réalisateur, celui du film, à contre-courant de la vitesse actuelle du cinéma et du monde, si enclins à tourner (trop) vite et à vide. « Le vide est à l’origine de tout » affirme le dentiste, alors conférencier scientifique improvisé (encore une facette identitaire méconnue, un possible inachevé), devant un parterre de villageois qui l’écoute comme jadis les tribus le chamane ou l

Electric Dreams : Du cinéma vers la vidéo

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Un soupçon de sexe, aucun mensonge et beaucoup de vidéo… Vidi  – je vis l’avènement des vidéo-clubs, la valeureuse VHS et une avide envie de voir Ouvrir le boîtier (la brique) en plastique léger. Une cassette (sans diamants) noire et transparente repose à l’intérieur, telle une femme morte offerte à la nécrophilie d’un cercueil réduit. Ses fenêtres semblent sourire et une bande magnétique d’ébène attend sagement que les tambours silencieux la fassent passer d’un côté à l’autre, en sens inverse et pour l’éternité du rembobinage . Un volet s’ouvre au moment de l’insertion dans le magnétoscope,  «  bouche d’ombre  »  garnie de métal vaginal. Enfoncer avec délicatesse et doigté la touche « Lecture ». Sur l’écran du téléviseur, une image apparaît, poussière de cinéphilie balayée en hélice et verticalité , à 240 points par ligne et avec une largeur de bande privilégiant la luminance à la chrominance  : on voit bien de vilaines couleurs. Le cinéma d’horreur d’alors,