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Affichage des articles du septembre, 2020

Ne vous retournez pas : Un mois de cinéma

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  Des films, des films, des films … Frime futile ? Exil utile ! Avec la peau des autres (Jacques Deray, 1966) Dirigé par le solide Deray, voilà le valeureux Ventura à Vienne, selon cette version sérieuse des Barbouzes écrite par Giovanni, bis , à partir de Perrault cependant dépourvu de pull-over (rouge). Si les belles Ellen Bahl & Marilù Tolo ne font que de la figuration, les premiers nous le regrettons, Bouise, suicidé via une vitre, sauve la mise du métrage d’un autre âge, idem musiqué par Michel Magne, en composant un espion à soupçon(s), un père d’adoption, sur le départ, hélas bien trop tard. La Balance (Bob Swaim, 1982) Avant d’être le braqueur masqué de L’Amour braque , Karyo fracasse et met Pagny au tapis, descend un second flic, se fait dessouder en souriant ; son supérieur de malheur, élégant Ronet en caïd cuistot, traqué, exécuté, d’une bastos dans la bouche, sème ainsi sa némésis nommée Berry ; la force de Baye, la fragilité de Léotard confèrent au polici

Mano de obra : Travaux

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  Squatteurs de caveau, (dé)construction des idéaux… Bande-annonce d’à moitié mensonge, car Mano de obra (David Zonana, 2019) ne se résume pas à un tendu thriller entre un ouvrier vénère et un impitoyable propriétaire. Ceci survient, voire s’évacue, vite, autant que la chute du vrai-faux alcoolisé, dès le premier plan pondéré, harmonie masculine immédiatement minée, mystérieux traumatisme originel jamais surmonté, même si au final instrumentalisé. En effet Francisco se remet fissa du double fiasco, il supprime subito l’assassin désinvolte, par procuration, de sa belle-sœur enceinte, pauvre Lupe dépourvue d’indemnités, pendue puisque désespérée. Une fois la corde (de la discorde) mise en commun, seconde pendaison de saison, à présent en appartement, l’intrus s’improvise parvenu, incite ses potes à s’installer au sein de la piaule luxueuse, coûteuse, géométrique, en fabrique, de l’esseulé décédé. Le farniente en jacuzzi ne lui suffit, il monétise des meubles du mort, il passe un sec

Dans un jardin qu’on dirait éternel : Ça commence aujourd’hui

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  Retour à la perfection ? Parcours de la procrastination… Tea for two and two for tea Me and you and you and me La Grande Vadrouille (Gérard Oury, 1966) On ne changera pas le monde Mais il ne nous changera pas Jean-Jacques Goldman, On ira Pendant vingt-cinq ans, la narratrice apprend à faire du thé, de l’automne au printemps, de l’hiver à l’été. Au-dehors du sanctuaire hebdomadaire, des événements « inimaginables » surviennent, invisible et vaste univers, tandis qu’à domicile sa commerçante cousine si « franche » finit fissa par fonder une famille. Elle-même devient « auteure indépendante », perd son père, en coda accède à la succession des leçons. Toutefois tout ceci, tel le générique aquatique, au thème musical en mineur lyrique, dû à la douée Hiroko Sebu, itou compositrice du score de Je veux manger ton pancréas (Shin’ichirō Ushijima, 2018), semble glisser sur sa serviette en soie à (re)plier puis déplier avec une méticulosité d’insanité. Les morts ne cessent de re

La Ferme du pendu : Au nom de la terre

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  Propriétaire terrien ? Propriétaire, t’es rien… Regain (Pagnol, 1937) se terminait sur un couple en train de semer, sur le point de récolter, d’accoucher, bouleversait via ses travellings vibrants, la belle BO du fier Honegger ; La Ferme du pendu (Dréville, 1945) s’achève sur un vieil homme esseulé, terrassé, au sens propre, figuré, trépas depuis longtemps programmé, n’en déplaise au neveu juvénile, qui l’appelle, invisible, qui convainquit in extremis sa maman s’en allant de le laisser là, auprès de son oncle conquis, sur cette terre obsédante, épuisante, suaire austère sillonné de sueur, de labeur, tout au long des décennies, tant mieux, tant pis. Commencé au milieu d’un cimetière, le métrage méconnu mérite son exhumation, se dédie à une destruction, celle d’une fragile fratrie où les « affaires » se foutent des femmes, où un cocufieur finit fou, où un frêle frangin file, devient mécanicien. La tante précitée elle-même s’enfuit à la ville, rentre au bercail pour raison écono

Shock : Asylum

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  La tête des emmurés, à la Franju ? Le « mur » à traverser, bienvenue… La suite du langien Latex (Michael Ninn, 1995), certes, mais en sus l’apocryphe matrice de The Cell (Tarsem Singh, 2000), car Shock (1996) pénètre aussi à l’intérieur (du corps, du corridor) de l’esprit, repose sur une prisonnière in extremis volontaire, délivrée, au propre, au figuré. Ninn annexe Marilyn, toutefois Jeanna Fine affiche un faux air de Jennifer (Lopez), CQFD… La consœur de Snake Plissken ( New York 1997 , John Carpenter, 1981), sexy en cuir idem , se dénomme Mangrove, Tyffany Million, trentenaire carnassière, interprète avec talent ce toubib instable, cette doctoresse en détresse. Le renversement final, pas si fatal, quoique, repris du précédent, se devine dès l’ incipit point priapique, dossier de cinglée en voix off étudiée, ou au début de la thérapie électrique, lorsque l’horloge recule le rendez-vous de deux heures. Film médical, mental, Shock se déroule donc au sein tout sauf malsain d

L’Aîné des Ferchaux : Deux hommes dans Manhattan

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Nouveau départ à La Nouvelle-Orléans ? Désaccords de mort(s) au volant… Dès l’ouverture en travelling virtuose et en voix off devant un ring de boxe, Melville (Jean-Pierre) cite Melville (Herman), c’est-à-dire décalque l’ incipit de Moby Dick  ; ensuite, il adresse un clin d’œil adéquat au Nous avons gagné ce soir (1949) de Robert Wise. Road movie immobile, errance retracée en transparences, L’Aîné des Ferchaux (1963) sacrifie Stefania Sandrelli, coupe ses boucles, la colore en rousse, tandis que Henri Decae éclaire Michèle Mercier, en danseuse gracieuse déguisée, observée, en bleu satiné de bricolé cabaret. Pas si angélique, l’estimable Niçoise interprète une ex -actrice arrivée à son misérable « terminus », rôle en reflet d’une melvilienne (celle de JP) cruauté. N’oublions pas le pitoyable lapin posé à la paupérisée Malvina (Silberberg) par le cogneur raté, le secrétaire improvisé, aux initiales dédoublées – tout cela, ça va de soi, déplaira aux féministes, mais le

Duel dans le Pacifique : Bleu comme l’enfer

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Robinson & Vendredi ? Les meilleurs ennemis… Avouons-le, on s’emmerde un peu, malgré les estimables Lee Marvin & Toshirō Mifune, car ils incarnent des coquilles creuses, coléreuses, malheureuses à défaut d’amoureuses. Survival sartrien, Duel dans le Pacifique (John Boorman, 1968) séduit cependant par son comportementalisme, son mutisme, sa forme millimétrée, sa dépressive radicalité. Ce troisième film du cinéaste trentenaire ressemble un brin à du Pinter insulaire, à du Beckett joué entre rescapés. Sorte d’anti- Papillon (Franklin J. Schaffner, 1973), il se termine au moyen d’une explosion, feint la fraternité, en affiche la fragilité. Il convient d’en revenir au titre d’origine, antinomique, explicite, à savoir Hell in the Pacific  : nos compères coopèrent en effet en enfer, parmi un opus ni pacifique ni pacifiste, plutôt une fable métaphysique, à la saveur satirique, sinon eschatologique, déroulée au creux de l’écrin guère serein d’une nature dès le début puis i

Et la vie continue + Au travers des oliviers : Tremblement de terre + Les Mariés de l’an II

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Suite à leur visionnage sur le site d’ARTE, retour sur les titres d’Abbas Kiarostami. Abbas Kiarostami aimait les bagnoles, savait s’en servir, cf. Le Goût de la cerise (1997) ou Ten (2002). Ici, chez lui, la vitre de la voiture devient vite viseur, écran au carré sur lequel un gosse ensommeillé découvre la réalité. Toujours picaresque, jamais pittoresque, le périple paternel permet de cartographier une catastrophe, comme en écho à la déroute de La Route (John Hillcoat, 2009), même si, cette fois-ci, on ne se nourrit d’un nourrisson, on amuse un marmot en hamac au milieu des arbres, petit Moïse plâtré, pansé. Plus tard, le fiston philosophe, fanatique de foot télédiffusé, rappelle à la mère lessiveuse, pas lessivée, le sacrifice d’Abraham, autre histoire de fils, de supplice, de foi d’effroi, de miséricorde divine. Ce dialogue dessine davantage que réesquisser une scène de Où est la maison de mon ami ? (Kiraostami, 1987), relier le premier volet de la « trilogie » à celu