Shock : Asylum
La tête des emmurés, à la Franju ? Le « mur » à traverser,
bienvenue…
La suite du langien Latex
(Michael Ninn, 1995), certes, mais en sus l’apocryphe matrice de The
Cell (Tarsem Singh, 2000), car Shock (1996) pénètre aussi à
l’intérieur (du corps, du corridor) de l’esprit, repose sur une prisonnière in extremis volontaire, délivrée, au
propre, au figuré. Ninn annexe Marilyn, toutefois Jeanna Fine affiche un faux
air de Jennifer (Lopez), CQFD… La consœur de Snake Plissken (New
York 1997, John Carpenter, 1981), sexy
en cuir idem, se dénomme Mangrove,
Tyffany Million, trentenaire carnassière, interprète avec talent ce toubib
instable, cette doctoresse en détresse. Le renversement final, pas si fatal,
quoique, repris du précédent, se devine dès l’incipit point priapique, dossier de cinglée en voix off étudiée, ou au début de la thérapie
électrique, lorsque l’horloge recule le rendez-vous de deux heures. Film
médical, mental, Shock se déroule donc au sein tout sauf malsain d’une psyché
dédoublée, adoube la colombe immaculée, mouillée, de Blade Runner (Ridley
Scott, 1982) et la coda douce-amère, entre éden et despair, du lobotomisé Brazil (Terry Gilliam, 1985). Face à
la tyrannie de la psychiatrie, symbolisée par l’inflexible Ona Zee, la liberté ainsi
résiderait au creux du huis clos d’un cerveau dingo ? La réponse du cinéaste,
à la fois futuriste, fantomatique, rappelle Lynch plutôt que Buñuel. Co-écrit
par Antonio Passolini, produit par Jane Hamilton, le dernier volet du diptyque
s’achève via une victoire à la
Pyrrhus, une guérison-sidération, un vrai-faux duo de facto en solo, tandem
de la traqueuse dessillée, de son alter
ego apaisé, Mangrove & Malcom réunis, a priori à l’infini.
Placé sous le signe d’une sorte de
trinité laïcisée, décomplexée, pensons au trio de personnages, au triolisme des
performers, au « Gate 3 »
de toponyme, Shock s’apparente par conséquent à une parabole sur
l’asservissement, osant matérialiser la métaphore de façon hardcore : assistante confisquée, ange blond (dé)chu, vertige
gracieux, audacieux, dans un univers de film noir, Shayla LaVeaux ne ravit pas
seulement des gargouilles qui ne gribouillent, elle se transformera fissa, le
temps d’un « rituel » de dévouées lesbiennes, d’un mémorable moment,
en jouissante jument, merci à la panoplie fournie, novice complice in fine baptisée par un bukkake peut-être
lacté, accompli par quatre « Pony Girls » guère bégueules. Bien
éclairé par le doué DP Barry Hartley (Decadence, Ninn, 1997), bien musiqué
par Dino & Earl Ninn, ici on travaille en famille, cf. la consultant Que Ninn, Shock
donne à écouter un titre lyrique, explicite, sinon mystique. Outre mettre en
abyme le mécanisme de l’imagerie du désir, ciné à domicile, théâtralité par ta
mimine dirigée, astiquée, l’opus
réputé résiste à la rouille des années, sa beauté enténébrée dépeint, mine de
rien, les possibilités de la pornographie. Itou directeur artistique, l’invisible
Ninn ne prend pour des imbéciles les cinéphiles onanistes, ses personnages
concrets, abstraits, son casting
impeccable, mention spéciale au dénudé Jon Dough. Le rêve éveillé, assuré, assorti
de Sex
(1994), New Wave Hookers 5 (1997), Perfect (2002), représente de manière
presque exemplaire la part la plus stimulante du X US, excède les limites
stériles, rarement subversives, du « film de fesse ».
« Pain is bliss » énonce Stevens, cependant, en dépit d’un fouet saphique, Shock ne cède au plaidoyer SM. Muni de sa main street unique, dotée d’une vitrine à dames à la Amsterdam, d’un caïd quasi eunuque, d’Asiatiques mutiques, humides, silencieuses, malicieuses, d’aristocrates blanchâtres, d’un couple en socquettes, d’un cabaret côtoyé par un Black à brasero, clochard à proximité des richards, de bottes léopard portées par la sodomite émancipée, d’une citation attribuée à Aristote, au sujet de la violence en évidence de l’ignorance, il s’agit, en résumé, d’un divertissement intelligent, d’une fable affable, d’un item ni misogyne ni obscène – l’obscénité, la laisser à la morbidité de la modernité, allez...
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