Lady, Stay Dead : Fish Tank
« Animal » bancal, obsession
en immersion, sœurette circonspecte, motard trop tard.
Jeu du chat et de la souris cruel, au
carré, transposé en Australie : un jardinier esseulé espionne, viole,
étouffe dans un aquarium une chanteuse
hargneuse doublée d’une starlette de publicité, ersatz de Sheena ; peu après, il s’en prend
à sa sœur au cours d’un survival
domestique. Le body count compte itou
un voisin, son chien, deux flics en renfort, merde alors. Gordon Mason, moins
invalide que le Perry homonyme, ne chôme pas, tel Attila, ni l’herbe ni l’être
ne repoussent ensuite, canicide et incendie compris. Le mélodrame, sens
étymologique, se déroule dans une villa
maritime immaculée, reculée, baptisée d’Este. En début de journée, gros soleil
à peine levé, la petite princesse à sévices plonge à poil, au ralenti, vers sa
piscine translucide où se débattront plus tard, de nuit, l’agresseur et le
policier. La callipyge Deborah Coulls, dotée d’une certaine ressemblance avec
Eva Green, monte notamment en contre-plongée un escalier extérieur, auréolée de
sa nudité ; sa chambre regagnée, devant une psyché, vêtue d’une robe
échancrée, elle soupèse ses seins, ou plutôt une doublure le fait à sa place,
visage hors-champ. L’agression sexuelle se situe au salon, sur un canapé blanc,
en levrette ou en anal, allez voir-savoir. Mais le pire reste à venir, la voici
soulevée, renversée à la verticale, le haut du corps immergé au milieu des
poissons cons. Quelques perles multicolores de son collier se fondent aussitôt
dans le décor aqueux. Racontée ainsi, la scène semble obscène et insupportable.
En réalité, Terry Bourke, spécialiste polyvalent de ce type de divertissement a priori malaisant, ne franchit pas la
ligne de l’intime, du salace dégueulasse, même si l’actrice faillit se noyer
pour de vrai, assurent la légende et surtout le vétéran Roger Ward,
représentant des forces de l’ordre apparu également dans Mad Max (Miller, 1979) ou
Long
Weekend (Blanks, 2008).
Le spectateur en ligne, anglophone,
ne découvre guère une resucée des Chiens de paille (Peckinpah, 1971),
davantage une délocalisation de saison du giallo, sur fond de lutte des classes
et de prédation sexuelle. En effet, l’homme à tout (dé)faire cumule les
plaintes sans suite d’épouses à plaindre, en raison de « maris furieux »,
nous apprend le moustachu en uniforme, et collectionne des photos cochonnes.
Mieux, quoique, il se masturbe en salopette dans le sable remué de la plage
abandonnée, coquillages et crustacés de Cambrera, à la manière de De Niro &
Depardieu selon le très gay
Bertolucci (Novecento, 1976). Issu de la TV à l’instar de ses partenaires,
le velu Chard Hayward parvient à insuffler à son personnage sans excuses disons
des circonstances atténuantes, monstre immature et maladroit, mélomane énamouré de
poupée gonflable, un salut à Private Parts (Bartel, 1972),
amoureux malheureux, fleur bleue. Ses larmes post-outrage/naufrage font penser, proportions conservées, à la
détresse de Leatherface dans une situation similaire. D’ailleurs, il manie à
son tour la tronçonneuse… Bien servi par la jolie direction de la photographie
de Ray Henman, par les notes sucrées, classiques, ironiques, de Bob Young, par
la présence physique, parfois hystérique, de Louise Howitt, proie pas dénuée de
ressources, gare à la barre métallique de cheminée, à la casserole d’eau
bouillante ou à la bêche revêche, Lady, Stay Dead (1981), beau titre symbolique, déférent et
drolatique, ne se pose jamais en apologie misogyne ou en démonstration
d’exploitation cinématographique (pléonasme, corrige à raison Roger Corman). Inédit en salles internationales, l’ouvrage mérite son exhumation et sa positive appréciation, pour sa modestie,
son soin, son portrait de solitudes croisées, de psychopathe terriblement
humain.
La Ford du prolétaire traité comme
tel, avec une morgue et un mépris de parvenue, ou la Ferrari de la sirupeuse et
moqueuse propriétaire au grand air ? Bourke ne nous demande pas de
choisir, ne justifie ni n’atténue rien. Il illustre proprement, décemment, une histoire
d’aisance et de jouissance, de jeunesse et de maladresse, de fait divers placée
dans un cadre paradisiaque. Sous le soleil exactement, du sang, un sac
poubelle, une paire de jumelles, le fauteuil d’Emmanuelle et un film certes
facile et cependant assez élégant, plaisant, point assommant. En conclusion, en
guise de recommandation, si vous partez en terre australe cet été, méfiez-vous
des porteurs de sécateur et de la mort-aux-rats, voilà, voilà.
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