Le Boucher : La Chair de l’orchidée

 

Bœuf à la Rembrandt ? Fable affable…   

Essai à succès, presque remarquable, aussitôt remarqué, Le Boucher d’Alina Reyes, chassons de Chabrol l’homologue, s’apprécie en apologue, à base de jouissance, de délivrance, de renaissance. Ce livre vite écrit, lu d’un trait, certains diraient dévoré, vocable valable, se divise en deux temps, le premier de désir impatient, le second de dédoublé assouvissement. Il s’agit ainsi du récit d’une caissière éphémère, guère austère, de ses trois partenaires, d’une saison estivale davantage qu’infernale, qui pourrait se résumer au moyen de cette phrase en phase : « Le boucher avait la chair dans l’âme. » L’étudiante aux Beaux-Arts, par son Daniel délaissée dare-dare, se laisse séduire in situ par des paroles salaces, puis met en pratique le théorique, affirme le fantasmatique. Ici, au sein de la salle de bains, humide, forcément humide, la pénétration s’apparente à une épiphanie, du « sauveur » assortie, de la « grâce » remplie, et même une douloureuse autant que délicieuse sodomie, improvisée, cheveux tirés, à proximité de la pluie, aperçoit le paradis, majuscule optionnelle, puisque la narratrice anonyme « condamnée à garder la tête au ciel », amen. Mais au mysticisme jusqu’au bout de l’outrage, de l’hommage, de l’indépassable Pauline Réage, prêtresse experte du valeureux esclavage, son Histoire d’O en chef-d’œuvre charnel et spirituel, en mémorable, émouvant, lamento, se substitue disons une religiosité intériorisée, en rime au retour matriciel d’un trip à l’acide mémorisé. Ce souci d’une transcendance immanente, du nouveau départ, reviendra parmi d’autres œuvres de l’œcuménique Alina, oui-da, et Le Boucher s’achève en boucle bouclée, route ouverte, de quasi survivante esseulée, souriante, en rappel de la lame inaugurale, cause, au creux d’une entrecôte, de « comme une plaie radieuse ». Une fois plusieurs fois offerte, affermie, entre enfance des sens et juvénile jalousie, l’héroïne se gorge de roses, en jette la « tige épineuse » au clébard furibard, abandonne derrière, douce guerrière, un boucher obsédé, tendre et brutal, un quidam masqué, au crâne squelettique très symbolique, collègue élégante de l’Alice à Lewis. 

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