Esclave de Satan : Malcolm X

 

L’enfer en famille, la mort sans remords…

Premier film estampillé horrifique d’un réalisateur de valeur, mais ultime apparition sur grand écran d’une actrice attractive, Esclave de Satan (Warren, 1976) constitue un exemple parlant de cinéma indépendant. Financé par les principaux intéressés, tourné en extérieurs, avec des moyens limités, monté à domicile, agrémenté de minutes dites explicites, censées consolider sa distribution à l’étranger, un peu tripatouillé par les ciseaux du BBFC (British Board of Film Classification), parfois apparié à Ruby (Harrington, 1977), Satan’s Slave divisa la critique et ne convainquit le public. Durant le quart d’heure de sa double introduction, le spectateur assiste à une messe noire masquée, à un holocauste nocturne de juvénile victime, blonde bien sûr déshabillée, la bien nommée Moira Young, en épouse de l’un des co-producteurs à contrecœur s’y colle, à présent en rigole, à une tentative de viol envapé, à un meurtre perpétré par une porte de cou cassé – en résumé, pas le temps de respirer ni de s’ennuyer. Ensuite, l’accorte Catherine se casse à la campagne, son sentimental et suicidaire John en souriant s’en désole, en compagnie de ses parents, chez son oncle d’accident. Elle seule survit à l‘intempestif incendie, par le tonton, sa secrétaire, son fiston, recueillie, ragaillardie. Après l’express cérémonie, caméo du scénariste David McGillivray déguisé en curé compris, notre héroïne tombe sur la tombe de son quasi homonyme, sorcière du dix-huitième siècle, mazette. Alors qu’elle s’amourache de l’agresseur précité, lui-même traumatisé témoin enfantin de l’assassinat de sa cute et cara mama, Catherine cauchemarde à propos de puritanisme rural, de femelle à poil punie attachée à un arbre puis profanée au crucifix de fer rougi, oh oui, en sus de sabbat tout sauf pas sympa.

Triste et altruiste, Frances fissa se confie à Cathy, balance le bracelet dérobé, l’assomme de nécromancie, la place devant un portrait, presque un autoportrait, l’invite à vite s’envoler avec elle, car ses vingt ans se fêteront demain dans les flammes et le sang. Son soutien hélas aussitôt lacéré, l’héritière renverse son adversaire, ressuscite son père, comprend trop tard qu’il ne s’agissait pas, de toute façon, d’une médicamenteuse hallucination. En expéditive coda, la voilà la proie de son papa, Malcolm en maître du culte occulte, Abraham countryman, Cronos à la noce. En partie porté par l’incontournable Michael Gough, musiqué ad hoc par John Scott, cadré au cordeau et en Scope, Esclave de Satan magnifie et sacrifie la candide Candace Glendenning (La Tour du diable, O’Connolly, 1972). Le cinéaste des futurs et réussis Inseminoid (1981), co-écrit par Gloria Maley, qui rencontra ici son maquilleur de mari, du davantage terrestre, de Saint-Sylvestre, Réveillon sanglant (1987), anticipe de peu les films infernaux, effrayants, de Lucio Fulci, clin d’œil d’énucléation oculaire inclus. Un néo-réalisme des atrocités filmées à la dynamique britannique se met ainsi en place, expose le cru, ose le dégueulasse, à l’unisson d’une décennie excessive, excitante et violente, fameuse et funeste, pas uniquement au Royaume déjà désuni. Moins ironique qu’un Peter Walker (The Comeback, 1978), l’estimable Norman, Warren, n’en déplaise à Bates, construit un huis clos non démuni de brio, un mélo situé du côté gynéco, où les générations gémissent, mal-aimées, complices, où les femmes affolent et succombent en série à des hommes médiocres, à des malades mentaux dissimulés sous une sollicitude d’aristos. Les films d’effroi ne fantasment pas, au fond nous miroitent, eux tous, toi et moi.

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