Trapèze

 

Un métrage, une image : La Louve solitaire (1968)

L’éphémère et transfrontière Danièle Gaubert décéda d’un cancer, quarantaine écourtée, carrière quittée, mais La Louve solitaire donne à (re)découvrir et sait conserver son aura, sa beauté. Face à cette fanatique de fric, aristocratique, acrobatique, le jour employée d’agence immobilière, la nuit impeccable monte-en-l’air, on (re)pense bien sûr à la Musidora des Vampires (1915) de Louis Feuillade, à la Brigitte Auber de La Main au collet (1952) d’Alfred Hitchcock, à la Monica Vitti du Modesty Blaise (1966) de Joseph Losey ou au contemporain criminel, cagoulé idem, de Danger : Diabolik ! (1968) dû à Mario Bava. Toutefois, le film presque orphelin d’Édouard Logereau, (dé)formé à l’IDHEC, documentariste en court(s) puis téléaste transparent, possède sa propre personnalité de piège parisien pluvieux, de fuite sudiste en été, de douce-amère moralité, à la double coda désenchantée. Figure du féminisme soft, Françoise paie le prix de son indépendance, de sa seconde chance. Par Marcel Jullian co-écrit entre deux titres de Gérard Oury, La Grande Vadrouille en 1966, Le Cerveau en 1969, d’après la série livresque d’Albert Sainte-Aube, journaliste reconverti en romancier, sinon en émule d’un certain Maurice Leblanc, le père d’Arsène Lupin, parce qu’il le valait bien, éclairé par Roland Pontoizeau, le directeur de la photographie du Testament d’Orphée (1960) de Jean Cocteau, l’opus soigné, assez stylé, se soucie de trafic cosmopolite de coke en stock, s’assortit, gare au noir Julien Guiomar, d’un policier obsédé, insultant, conciliant, lucide, car en colère il caractérise de « coffre-fort » l’héroïne en définitive séduite par la Suisse, amène un amoureux malheureux, ancien sourd capable de lire sur les lèvres et pourtant incapable de survivre à sa captivité. Si la mort audacieuse et gracieuse de l’émouvant Michel Duchaussoy n’afflige le philatéliste Sacha Pitoëff, invite par elle-même au visionnage de l’ouvrage, La Louve solitaire séduit aussi par sa modestie, sa romance, sa masculinité tourmentée, son artiste à moitié autiste. Dans la vraie vie vite compagne de Jean-Claude Killy, ici doublée par la souple Gipsy Bouglione, Miss Gaubert ne se laisse faire, salue son sniper, se débarrasse du séide en hauteur et ne pleure…   

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