The Game
Lignes peu malignes mais bénignes…
Je n’écris pas pour vous, je n’écris
pas pour toi. Je sais pourquoi et pour qui j’écris. Je n’écris pas pour
m’amuser, pour occuper mes journées. J’écris depuis deux ans, je n’écrirai
bientôt plus. Je n’écris pas en auteur, en critique, en concierge. Je crus
possible d’écrire à deux mais on vit, rêve et crève seul, surtout accompagné. J’écris
toujours à la première personne du singulier, au propre et au figuré, sans me
confondre avec un pronom. Je n’écris pas sur le cinéma mais avec lui. Je
n’écris pas à propos de l’actualité mais en elle. Chaque mot de chacune de mes
phrases s’apparente à une brique, une balle, une injection, un élan. Je
comprends parfaitement et personnellement le peu d’importance accordé à tout
cela car je lui en attribue à peine. L’écriture constitue un jeu et une
nécessité. Quand on écrit, on se contraint au silence, à l’absence, au retrait
dans sa psyché. Le texte-empreinte vous identifie mieux qu’un ADN. Je n’écris
pas pour discuter, pour me faire voir et bien. J’écris sur ce qui me plaît,
donc sur ce qui me donne la nausée. J’écrivis pour célébrer des œuvres, pour
saluer des présences féminines. Je n’écris pas pour me faire des amis et les
ennemis s’avèrent fidèlement/infiniment plus sûrs. Je laisse à d’autres
l’écriture pour le fric, la gloire, le reflet narcissique du miroir. Je n’écris
pas (plus) pour autrui, sur des sites, dans des magazines. Comme tout le monde,
je ne m’intéresse qu’à mon avis, et encore. Aucun écrivain ne peut sortir de
son corps. Essayez un peu d’écrire durant la compression d’une céphalée. La
phrase surgie souvent armée, déjà vivante. Il suffit alors de l’affiner telle
une lame sur la pierre encore chaude du soleil sudiste. Un texte qui ne parle
pas pour lui-même, qui appelle l’exégèse, le commentaire, le rafistolage, se
dévalue de lui-même.
On ne doit jamais s’excuser d’écrire,
y compris sur un sujet aussi futile et vital que le cinéma. En vérité, on ne
devrait jamais s’excuser, éviter de blesser, de mésestimer, de (se) trahir. Je
n’écris pas pour me sauver, pour maquiller, pour rendre le monde meilleur. Le
monde, avec ou sans sa logorrhée, qu’il périsse sur pied, qu’il disparaisse à
la manière d’un message d’insulaire sur la plage déserte. Si vous n’écrivez pas
contre le monde, contre le temps, contre la mort, ne comptez pas sur moi pour
vous lire. Si vous choisissez de vous garder d’écrire contre ça, ne croyez pas
écrire sur le cinéma. Dans l’écriture, on lutte avec joie, ardeur, confiance,
contre soi-même et les mille pesanteurs de la langue, de l’esprit, de la
morale. L’écriture participe de l’impuissance et de l’action, de la raison et
de la folie, de l’autarcie et de l’ouverture. En elle fusionnent les
contraires, en elle dansent ensemble les énergies du jour et de la nuit.
L’écriture crée son propre espace-temps, la lecture permet d’accéder à une
intériorité externe. Lorsque tu me lis, tu respires à mon rythme, tu perçois
l’univers à travers mon cerveau, mon cœur, mon sexe. Je ne t’épargne pas mais
j’ignore la flagornerie réflexive. Je me contrefous des états d’âme, les miens
et ceux d’étrangers, pourtant ma prose dégorge d’intimité. J’essaie d’écrire en
adulte. Je m’adresse aux plus de dix-huit ans et ne me soucie pas de n’avoir
point conservé une âme d’enfant. J’écris pour mieux me taire, me défaire des
films. J’écris pour disparaître dans une trace écrite de ma passion et de ma
désaffection. Qui m’écrira en retour, quel oubli recouvrira toutes les lectures ?
Cela s’écrira sans moi. J’écris que ceci me va.
Lignes bénignes, un jeu presque inquiétant !
RépondreSupprimerJim Morrison en lézard royal absolument vivant : Once I had a little game/I liked to crawl back in my brain/I think you know the game I mean/I mean the game called go insane...
SupprimerD'un autre côté, comme pour nous rassurer, était publié immédiatement après celui-ci, un article intitulé Instinct de survie... Break On Through !
SupprimerTout se recoupe toujours, y compris de l'autre côté, en effet, Benjamin Rassuré...
SupprimerL'écrit pour prendre le maquis...
RépondreSupprimerAvec ou sans myrrhe, (d)écrire vers l'avenir...
SupprimerLES VERTUS DU CISTE LADANIFERE CORSE. https://www.youtube.com/watch?v=s32AanMctEU
RépondreSupprimerhttps://www.youtube.com/watch?v=tu-lcwhZcEs
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