L’Oiseau et le Tigre


Le Deuxième Souffle Le Samouraï (1967)


Explorons la relecture inspirée de Natsu Zuma. Nathalie Delon, invisible et troublant reflet féminin d’un acteur iconique, littéralement adoré par son cinéaste, au pseudonyme emprunté à l’auteur de Moby Dick, lui-même attiré par les amours entre hommes, observe Costello par le bien nommé judas, présage des futures caméras de surveillance aux perspectives anamorphosées.

Pour l’instant le regard perdu vers un ailleurs impossible, il se précipitera bientôt, dans ses gants blancs de tueur à la John Woo, avec la reconnaissance d’un autiste finalement revenu au sein de sa forteresse vide, loin de la traque du flic (en métro parisien, moderne avatar des Enfers) et de ses corbeaux de mauvais augure, caricatures de l’oiseau encagé lui tenant lieu d’unique et d’éphémère compagnie (car, sous peu, pareillement occis), entre les accueillants bras noirs de sa mort métisse et chantante – son pistolet dépourvu de chargeur, bien sûr, symbole d’impuissance sexuelle et existentielle : cet homme-là ne peut continuer à vivre dans la France glacée des années 70, il appelle de tous ses vœux mortifères le grand sommeil qui le dérobera au monde exsangue d’une imagerie abstraite, épurée comme un haïku, brûlant d’une fièvre absurde, le guérira de sa solitude féline (William Blake ?) et nippone,  le délivrera, enfin et surtout, de sa propre énigme, matrice de la fascination du spectateur.

Décoiffé de son chapeau fétichiste, le cadran de sa montre tourné sur son poignet, afin que le pouls de métal fasse battre le sien à l’unisson de son pauvre cœur mécanique et sentimental, l’automate achève sa marche funèbre en interrompant la musique du désir, dans une posture de martyr (et de diva) transpercé par le doux aiguillon fatal de la foi (cf. la statue de sainte Thérèse par Le Bernin) et de la loi (policière) : il peut s’endormir, désormais, immortel dans la mémoire de tous les cinéphiles, passés et à venir…

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