Le Crocodile de la mort


L’Écume des nuits : Tabou de Miguel Gomes (2012)


Le romanesque et le colonialisme fusionnent avec la mort de Mario instrumentalisée par un mouvement de libération local ; l’agent à la Havane de Greene voyait pareillement ses faux plans (d’aspirateur) se réaliser dans la « vraie vie ». Plutôt qu’à Murnau, on pense à Van Dyke et son homme-singe, à Pollack et ses souvenirs d’Afrique, à Allen et sa rose égyptienne.

Dans une Lisbonne livide, dépourvue de sacré – la jeune Polonaise de la communauté religieuse ne viendra pas plus que Godot –, la sentimentale Madame Pilar rêve d’un film gentiment tabou et triangulaire, où le cinéma s’abouche à la réalité, se mord la queue (de reptile) : l’enfant invisible d’Aurora, le voici devant nos yeux, en noir et blanc, paradis perdu puis regagné, comme on retrouve son foyer, comme on regagne la salle de projection.

Tandis que les femmes pleurent et meurent, que les hommes se racontent et chantent, que l’œuvre se divise dans la jointure d’une parole volontiers hypnotique, jamais vraiment muette, la faune se fige – sculpture surréaliste de la girafe dans les rues de la capitale – ou s’ébroue – le fameux crocodile grandi au fil des saisons –, le tout baigné par la douce mélancolie de la saudade lusitanienne…

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