Mirror, Mirror : The Serpent and the Rainbow

 

Blanche-Neige et ses sept nains ? Des femmes réfléchissant (à) leur destin…

Sur la surface de la glace, un duplicata de Carrie (Brian De Palma, 1976) ; en profondeur de la peur, le reflet d’une féminité. Avec ses équipes dites « artistique » et « technique » à dominante du « deuxième sexe », notre époque de quotas au cinéma admirera, avec son script co-écrit par des sœurs spécialisées dans la livresque horreur, avec ses personnages d’hommages et d’outrages de protectrices et de prédatrices Mirror, Mirror (Marina Sargenti, 1990) dépoussière – au propre et au figuré – un accessoire dérisoire, un motif majeur, une image « magique » et méta. Au-delà, il adresse des clins d’œil aux jumelles « mortelles » de Sisters (De Palma, 1972), à la piscine de La Féline (Jacques Tourneur, 1942), sinon à celle de Suspiria (Dario Argento, 1977), au torrent de sang de Shining (Stanley Kubrick, 1980), en sus d’annoncer le cannibalisme sentimental de Trouble Every Day (Claire Denis, 2001). Après Prince des ténèbres (John Carpenter, 1987), revoici le miroir du désespoir, portail puis épouvantail. Après Orphée (Jean Cocteau, 1950), revoilà l’inversée coda du retour en arrière, du souhait exaucé, du tragique roleplay. Le mélodrame entre dames adoube le double et carbure au « complexe d’Électre » carabiné, à l’hécatombe accumulée. L’aimable Megan, mais mal-aimée, même par sa mère suivie par un psy, arrive vite de la ville, son « gothisme » aussi factice que les perruques multiples de sa génitrice lui donne des faux airs de Boy George & Jeanne Mas. Tandis que se déroulent des élections à la con, en interne, de lycéenne nommée Kane, le « citoyen » homonyme s’en amuse (Citizen Kane, Orson Welles, 1941), la métamorphose de la jeune fille à moitié orpheline enfin advient, le pacte of course faustien manie l’autoérotisme et l’onanisme. « Les morts ne reviennent jamais », en effet, sauf au ciné, domaine des mouches maousses, en mode Amityville : La Maison du diable (Stuart Rosenberg, 1979), des ralentis à la « Marty » (Scorsese, who else ?), de l’appétit public et privé à deux reprises coupé, en raison d’un saignement de nez géant, à cause des vers vivaces, dégueulasses, ailleurs se diriger, digérer.


Doté d’un humour sombre pas si dissimulé, cf. le « canicide » à la Bret Easton Ellis (American Psycho) au cadavre en cuisine, filmé par une éphémère et toutefois véritable cinéaste, interprété par des actrices solides, dont le duo Karen Black & Yvonne De Carlo, Mirror, Mirror donne à voir « (de) l’autre côté du miroir », POV de vidéo-surveillance bleutée révélant du désir sexué l’abyssale obscurité, Buñuel à l’idem divisée héroïne opine (Cet obscur objet du désir, 1977). Face à cette « fille du feu » ténébreux, à cette Eurydice d’Amérique nordiste very WASP, les types insipides, indécis ou risibles se font fissa suffoquer, maculer, noyer, baignoire mouroir renversant un fameux moment des Griffes de la nuit (Craven, 1984), ou servent aussitôt de sex toys patients ou impuissants, à baiser ou à « débarrasser ». S’il frise parfois ainsi une soft misandrie, Mirror, Mirror doit pourtant une part de sa réussite aux notes synthétiques du compositeur et producteur Jimmy Lifton, au directeur de la photographie Robert Brinkmann, aux monteurs Barry Dresner & Glenn Morgan. Et si tout cela ne suffit pas à vous donner envie de le visionner, de l’exhumer, d’en quelques lignes en acclamer, tel moi-même miroité, la modeste radicalité, l’émouvante sincérité, la stimulante tonalité, sachez qu’il permet en plus de découvrir une comète en aucun cas obsolète, alors (et encore) appelée, de son prénom et de son nom la poésie symbolique et pragmatique au passage appréciez, Rainbow Harvest. Sa Gordon n’en « fait des tonnes », au milieu du milieu médiocre détonne, adolescente résistante et cependant endeuillée, en train d’expérimenter jusqu’à leurs extrémités les puissances du corps et de la psyché. À l’instar de la cara Laura (Twin Peaks: Fire Walk with Me, David Lynch, 1992), son démon à domicile finit par se manifester, l’infester, lui « faire vivre un enfer », la défaire, avant qu’un voile noir ne l’occulte au rencart, en même temps que l’écran. Carrie White, à la suite (serviette) hygiénique du bal infernal, ses « mamelles » purifiait, sa maman crucifiait. Mademoiselle arc-en-ciel récolte au broyeur d’évier l’âme très tourmentée de la maternité…

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les Compagnons de la nouba : Ma femme s’appelle Maurice

La Fille du Sud : Éclat(s) de Jacqueline Pagnol

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot : Le Trou noir