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Un métrage, une image : Que Dios nos perdone (2016)

Les personnages principaux de cet opus espagnol discrètement drôle, citons en démonstration un ventilateur létal et une ceinture de sécurité à s’étrangler, possèdent tous quelque chose à se faire pardonner, y compris le réalisateur pour avoir livré un récompensé pudding européen plutôt psychanalytique que catholique, quoique. Avec sa culpabilité décuplée, partagée, avec sa rédemption de toute façon hors de question, Que Dios nos perdone affiche une forme faible, d’abord adepte de la caméra portée, de la courte focale, ensuite du téléfilm de luxe cadré en widescreen, visez la virtuosité trafiquée d’un mouvement d’évasion sans balcon. Le cinéaste sévit aussi à la TV co-productrice, on le devine vite. Basé sur un assassin assez risible, jamais crédible, à maman jadis abusive, la catéchèse, quel malaise, le récit en sus se soucie de pseudo-sociologie, cf. le sous-texte du contexte, association de manifestation sociale, de spectacle papal, de domesticité immigrée. Pire, il prétend nous éclairer sur l’obscurité au carré, puis triplée, d’une certaine madrilène masculinité. Comme si tout ceci ne suffisait à occuper l’esprit du spectateur durant deux longues heures, le sieur Sorogoyen mise sur le fameux effet miroir, voire mouroir, du fou et des fonctionnaires, du cinglé, des policiers. Tandis que le « violeur de mamies » s’éclate, verse dans l’escalade, avec la bénédiction par procuration des autorités de la sécurité, du clergé, discrétion et sourdine recommandées en raison de raisons d’intérêt, de charité, notre duo de flics psychotiques se confronte à et affronte des femmes fortes, filigrane féministe peut-être dû à la présence de la fidèle co-scénariste Isabel Peña. Au nerveux Javier la fifille indocile, la dame adultère, le canidé décédé ; à l’astucieux Luis le deuil de sa génitrice, presque incipit de POV depuis le creux du columbarium, perspective surprenante et désolante à la David Fincher, « suspension d’incrédulité » directo trépassée, le bégaiement de maternel maltraitement, la séduction à outrage d’une mélomane femme de ménage. En partie tourné à Tenerife pour fiscal motif, Que Dios nos perdone déploie donc on le voit une trame de mélodrame macabre à la mode télénovela, s’applique parfois à choquer le bon bourgeois, à coup de gérontophilie pas si jolie, de suspense d’ampoule ampoulé. Surnagent au-dessus du naufrage un irréprochable casting choral, mentions spéciales à Javier Pereira en serviable + impitoyable fada, à Roberto Álamo (La piel que habito, Almodóvar, 2011) & Antonio de la Torre (Amours cannibales, Martín Cuenca, 2013), la mélancolie amie d’Amália Rodrigues, séduisant l’auditeur et le cœur de la magnanime mais morose María Ballesteros…

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