Voyage au pays de la peur

 

Un métrage, une image : Ceci n’est pas un complot. (2021)

Pour Patrick

Défié « à nous », doté d’un intitulé, d’une affiche, à la Magritte, d’un sous-titre explicite : Comment les médias racontent le COVID, cet essai individualisé séduit par sa modestie, s’apprécie en réponse posée, réfléchie, au dramatique, discutable et dilaté Hold-up (Barnérias, 2020). En soixante-dix minutes sans tumulte, le documentariste éclectique et critique récapitule une chronologie de contamination, de communication, de collusion, de coercition, de contestation. Pendant que le président méprisant de la France se prend pour un chef de résistance, au milieu et au sommet de sa « guerre » imaginaire, la Belgique succombe aussi vite, ne se veut « incivique », tels les octogénaires géniteurs de l’auteur. Sa chronique d’une double mort annoncée, celle de la démocratie, celle de la déontologie, a fortiori journalistique et pharmaceutique, possède la colère calme du constat sidéré d’un désastre en direct, d’une réalité détraquée, au surréalisme désormais point pictural. Ainsi nous (sur)vivons tous au sein d’une démonstration de narration, portée par la peur, de gouverner l’un des moyens les meilleurs, à la soumission masquée, au cynisme démasqué. En creux du récit rétrospectif se diagnostiquent deux maux médicaux de notre modernité médiocre : capitalisme + moralisme. À côté d’une croyance concon en une quelconque conspiration, ourdie et adoubée par le bon Bill Gates, philanthrope avec l’argent des autres, messie malsain de mondialisé vaccin, la moindre marginalité se voit aussitôt condamnée, le discours dominant, médiatique ou administratif, muselant à l’instant les « rassuristes » et les récalcitrants. Tout ceci, à base en sus d’hygiénisme et de « récession », renvoie vite vers « l’unidimensionnalité » mise à jour de Marcuse ou la dictature douce des États totalitaires contemporains, jadis déjà pointée du doigt et de la caméra par le pertinent et pérenne point de vue poétique et politique pasolinien. Pourtant, l’opus anti-propagandiste se refuse in extremis au pessimisme, fait confiance à sa profession, à une majoritaire rémission. Comment se terminera d’effroi et de fatigue le feuilleton ? Par le (re)confinement, par la confrontation ? Par l’explosion ou l’implosion ? Cassandre se le demande et Candide jardine.           

Commentaires

  1. et le Chevalier inexistant sans peur et sans reproche qui espère encore peut-être que le virus à couronne ne gagne pas la guerre dans la porcherie... :
    "Ces effets de chaîne sont démontrés dans l’affaire du virus Nipah…
    En Malaisie, en 1998, tous les ingrédients sont réunis : on brûle une forêt à Bornéo pour planter des palmiers à huile, et les chauves-souris doivent fuir, chassées par les fumées. Elles se rabattent sur la Malaisie, se posent sur les manguiers pour se nourrir, défèquent sur les cochons élevés sous les arbres de manière industrielle. Via les cochons, les ouvriers sont contaminés, jusque dans les abattoirs situés à… Singapour ! Bilan : 105 morts sur 265 personnes infectées, et l’abattage de plus de 1 million de cochons pour stopper l’épidémie."
    https://www.parismatch.com/Actu/Environnement/Les-pandemies-ne-sont-pas-ineluctables-1723330
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Chevalier_inexistant

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    1. Merci pour cet article anxiogène, certes, mais, aussi, assez stimulant...
      Autre (vraie) chevalerie, heureusement moins macronienne :
      https://www.youtube.com/watch?v=QkquOi9AE5U

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    2. Le professeur Didier Raoult qui a rencontré le président Macron a dit de lui dans l'une de ses interviews de l'an dernier : il est charmeur et intelligent, mais il a également averti plus récemment entre deux phases plus convenues de son propos relativement aux dernières constatations des spécialistes du dit domaine viral, l'air de rien, qu'il faudrait surveiller les élevages de cochons, domaine de prédilection des possibles émergences de variants possiblement aggravants..espérons qu'il soit entendu dans les hautes sphères
      et que les huiles des ministères activent leurs burettes à bon escient...

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