Les Gaspards

 

Un métrage, une image : La Créature du cimetière (1990)

Il existe, on le sait, une multiplicité d’atrocités, comme au cœur de l’horreur mille couleurs. La Créature du cimetière (Singleton, 1990) carbure à l’économique, sinon à la sexuelle, because contremaître malhonnête, sinon raciste, de l’exploitation des ouvriers, de la « promotion canapé » adepte. Conte anticapitaliste doté d’un intitulé à double sens, temporel, mortel, Graveyard Shift cartographie ainsi, en douce, avec rudesse, une Amérique nordiste à contresens du reaganien triomphalisme, démontre de manière marxiste que les travailleurs, là ou ailleurs, ne comptent pour rien, pour du beurre, à peine bons pour une impossible dératisation aux allures d’extrême-onction. Comme l’Overlook de Shining, l’usine textile au bord de la ruine repose sur une nécropole, on y sue, on s’y sacrifie, on ne s’y fait des amis, on y esquisse une romance de malchance. À l’instar du solitaire de western, l’ex-universitaire endeuillé, à la dérive, explore et déplore le provincialisme complice, avise un vétéran du Vietnam, performance épatante de Brad Dourif, la même année que le damné de L’Exorciste, la suite (Blatty), en exterminateur à la Bill Burroughs, découvre une caverne très souterraine à la Ça, ouh là là. Au sommet d’un immense charnier, la célibataire harcelée, syndiquée, se fait poignarder, « féminicide » fétide, tandis que le survivant évacue la menace maousse au vainqueur broyeur de boucle bouclée, olé, ses mains sur ses oreilles plaquées, son cri à l’unisson de celui de la grosse bestiole, amitiés au Travolta traumatisé de Blow Out (De Palma, 1981). Tout ceci se déroule in situ, Maine idem, durant la semaine du 4 juillet, OK, indépendance de souffrance. Adapté d’une nouvelle en partie autobiographique de Stephen King parue en VO vingt ans plus tôt, désavoué par le principal intéressé, distribué par Paramount, l’item presque méconnu, amenuisé par l’amnésie, possède quelques plans au steadicam et un casting choral correct, une bagnole cabossée à la masse par une maitresse furax, des lances à eau staccato, un cercueil secourable, se situe dans le sillage du sarcastique D’origine inconnue (Cosmatos, 1983), bénéficie du beau boulot du dirlo photo Peter Stein (Simetierre, Lambert, 1989). Chef-d’œuvre de poche ? Divertissement pertinent.    

Commentaires

  1. https://www.ouest-france.fr/bretagne/lorient-56100/lorient-disparition-l-ecrivain-poete-joseph-ponthus-s-en-est-alle-7166009

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Arpenteur/Le-journal-d-un-manoeuvre

      Supprimer
    2. Montedidio de Erri De Luca raconte le passage d'un enfant au monde adulte du travail.https://www.humanite.fr/node/261051

      Supprimer
    3. https://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2015/08/hier-aujourdhui-et-demain-voyage-deux.html

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Les Compagnons de la nouba : Ma femme s’appelle Maurice

La Fille du Sud : Éclat(s) de Jacqueline Pagnol

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot : Le Trou noir