Belle et Sébastien

 

Un métrage, une image : Sébastien Tellier: Many Lives (2020)

Corrigeons l’hagiographie jolie, déjà rassie, fastidieux défilé des « habituels suspects », comme on cause dans Casablanca (Curtiz, 1942), typique de ce type de produit à bas coût produit : personne, pas même un compositeur assez inspiré, ne saurait posséder « plusieurs vies », tant mieux, tant pis, même si celui-ci se plaît à déployer un aréopage de personnages, à la fois drolatiques et anecdotiques. Dissimulé derrière des lunettes aussi noires que les blanches de Michel Polnareff, autre artiste parfois précieux et a priori individu davantage désagréable, autant grand, barbu et chevelu qu’un second Sébastien, Chabal, bien sûr, Tellier, doté d’un patronyme à la Maupassant, certes déteste l’esprit de sérieux, ne s’y prend jamais, considère chaque disque non en « conclusion », seulement en essai. Mais il prend au sérieux la composition, l’émotion, la surexposition de sa persona sympa, basée sur l’insaisissable secret de sa personnalité. Il passa autrefois, selon ses dires en tout cas, calé au creux de la capitale hexagonale, quatre ans devant un poste de télévision sans le son ; le voici désormais, depuis une vingtaine d’années, à l’intérieur du téléviseur, par exemple en train de disserter, blagueur, auprès du risible Ruquier, destinée amusante et amusée, dispensable, souhaitée, un brin à la Max Renn (Vidéodrome, Cronenberg, 1983). Tout cela, cette réussite rapide, excentrique, expérimentale, y compris au cours du célèbre concours concon de l’Eurovision, le documentaire scolaire ne l’occulte pas, preuve à l’appui d’archives défraîchies. L’essentiel se situe ailleurs, entre les interstices des images de sage déconnage, de malice inoffensive. Tellier, que l’on se le dise, en français ou en anglais (to tell), ne se la raconte, travaille, crée de manière collective, généreuse, et sa mélancolie me séduit, moui…

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