Police fédérale Los Angeles : Vivre et laisser mourir

 

Malchance de Chance, triche de Vukovich…

French Connection (1971) s’achevait sur une détonation ; Police fédérale Los Angeles (1985) débute idem, en parallèle à un plan rouge sang, sur fond de flamme infernale, annonce ésotérique de la conclusion, de la suite. Le jour se lève en accéléré sur l’enfer californien, ses palmiers frissonnent, cernés selon son smog. Le générique affiche la clinquante couleur du masculin malheur, un tableau sinistre, de (d’auto)portrait dépressif, surgit puis disparaît, remplacé par une série d’images topographiques, géométriques, diagonale de train de fret sonorisé, panoramique horizontal de casse esseulée, du titre explicite en forme d’aphorisme surmontée, remarquez l’éclat écarlate, entre arbre et impact de balle. Vivre et mourir à L.A. ? Bien sûr, mais aussi et surtout s’y activer, s’y croiser, y faire des affaires friquées. Friedkin filme de billets un brassage à la Scarface (Brian De Palma, 1983), d’argent et des gens une circulation à la Bresson (L’Argent, 1983). Il alterne les échelles, gros plan de visage fardé qui nous dévisage, effronté, assez sublime et quasi subliminal, une pensée pour l’épiphanie méphistophélique et onirique de L’Exorciste (1973), plan d’ensemble d’un convoi d’autrefois, parmi la ferraille, le long d’une palissade, pylônes électriques étiques, phalliques, pont en amorce, blonde en jean assise (Debra Feuer, frisée, défaite), à gauche décadrée, adossée à un muret aux vitres en verre rectangulaires, clair-obscur solaire + un soupçon de marron et de vert. La paire de Wang Chung soudain accélère, le morceau allegro, quintessence dotée d’élégance, sinon d’urgence, du son de ce temps, synthétique, mécanique, sans âme, sans états d’âme, accompagne une seconde toile, un échange étrange, au-dessus d’un comptoir illusoire, du trafic viral de visu, placé en pleine rue, peut-être une pute et son mac pas à patte, une caisse enregistreuse malicieuse et bilingue, anglophone, hispanophone, raccord dans l’axe inclus.

Ça compte et ça (se) recompte, en biais, surcadré, en éventail, en enveloppe, à contre-jour pas toujours, appréciez l’effet de signature du doué DP Robby Müller, de Wim Wenders le valeureux partenaire (Paris, Texas, 1984). Des photographies prises par les flics rejouent La Jetée (Chris Marker, 1962), chronologie secouée, sablier scellé, éléments (of crime dit von Trier) documents d’une narration absconse, encore ponctuée par le coup de revolver liminaire, élargi à une réverbération d’orage de métal. La légende de l’une d’elles affirme : « This is our guy in E. LA », la suivante mentionne le démoniaque Masters, maître du domaine, contrefacteur tueur, artiste destructeur, incendiaire austère, fissa il vous faut Willem Dafoe. La masse de mouvement et de statisme, de mobilité immobile, du pictural, du sculptural, du capital, de l’illégal, ne gêne l’allongée (et regrettée) Darlanne Fluegel, jambes levées, en train de fumer, de stores baissés à proximité. Le vrai-faux contrechamp donne l’impression qu’elle se trouve du côté opposé de l’atelier, à regarder le sombre propriétaire déplier sa dernière œuvre, ersatz délocalisé, un brin malsain, du Penseur de Rodin. En  deux minutes trente mémorables, magistrales, William Friedkin, flanqué de deux monteurs majeurs, Smith père & fils, revisite et redéfinit la forme du clip, un an après l’évocateur Self Control de Laura Branigan, (re)lisez-moi ou pas, associe réalisme et symbolisme, propose un puzzle ou plutôt une mosaïque choc et chic, que le reste de l’item va développer, compléter, corriger. Énigmatique et expressive, l’ouverture de Police fédérale Los Angeles demeure donc, en définitive, une leçon d’introduction, une réussite authentique, une stimulante mise en scène audiovisuelle, celle du mystère des êtres et de leur paraître. Quant au métrage, l’un des meilleurs de l’auteur, il vaut sa souvenance, y compris à contresens.

Commentaires

  1. Paillettes, cinéma, sex et drogues, perversions voir pédophilie le tout dans un simple téléfilm avec Michael Douglas,"Les Rues de San Francisco (The Streets of San Francisco) une série télévisée américaine en un pilote de 95 minutes, 121 épisodes de 47 minutes et un téléfilm de 90 minutes, créée par Edward Hume d'après les personnages de Carolyn Weston, et diffusée entre le 16 septembre 1972 et le 9 juin 1977 sur ABC.
    En France, la série a été diffusée sur Télé Luxembourg fin octobre 1972..."
    https://www.youtube.com/watch?v=Z1PpXAWSHNM

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