Midsommar : Soleil de nuit
ABBA, sabbat, b.a.-ba du bla-bla…
Le réalisateur poseur du raté Hérédité
(2018) délocalise donc en Suède Le Dieu d’osier (Robin Hardy, 1973 +
Neil LaBute, 2006), espère que son Midsommar (2019) sidérera le
spectateur, à l’instar du personnage de Christian, peu chrétien en dépit de son
prénom, de son destin, aux prises avec des païens, alors possible ersatz de
l’Alex molto Ludovico de Orange mécanique (Stanley Kubrick, 1971),
étalon concon, de défloraison à l’unisson, thésard en retard, plagiaire policé,
in fine immobilisé, rendu muet,
glissé nu à l’intérieur d’une carcasse vidée d’ours maousse, brûlé vif en
compagnie d’un duo de volontaires masos, what
if si l’if ne fait son office ?, trinité mortelle bouclant la boucle
du suicide en trio initial. Hélas, cette acmé enflammée, de festival estival
létal, dévoile le vide général, réduit le mince récit en cendres, propose en
apothéose un incendie qui jamais ne flambe. En raccourci, la communauté bucolique,
atrocement accueillante, ne sert ici qu’à cristalliser l’animosité d’un couple
américain, déjà en déroute avant même de prendre la route. A contrario des touristes sexuels de Hostel (Eli Roth, 2005),
les anthropologues ne pistent point un baisodrome, mais ils connaîtront un
sinistre sort similaire, in extremis
transformés en pantins empaillés, là encore en paraphe de leur caractéristique
inanité. Doté d’une base autobiographique, dixit
l’intéressé, Midsommar déploie ainsi sa rupture transposée sur un mode
étiré, subjectif, souhaité immersif, le cinématographique à nouveau associé à
l’hypnotique, comme au temps, disons, de Europa (Lars von Trier, 1991).
Mis au vert, peintre presque
impressionniste, en vérité surconscient du moindre plan, de son supposé
envoûtement, d’une femme en effet fatale, fleurie, « Reine de Mai »
sans pitié, émancipée, fi de la psychiatrie, traîtresse trahie à mettre en
liesse la foule immaculée, portée sur le communisme autarcique, l’inceste
sélectif, les oracles et la catharsis, en sus atteinte d’hystérie extatique
devant le brasier supra, Ari Aster
s’appuie sur la sensualité hyperréaliste de son directeur de la photographie Pawel
Pogorzelski, la musique atmosphérique de Bobby Krlic, le visage tendu, humide,
de Florence Pugh. Le very bad trip de la fine équipe, au propre, au figuré, miroite par conséquent celui du film,
voyage au bout de la nuit horrifique et sentimental, éclairé par un soleil
nocturne, solstice oblige, moins chorégraphique, quoique, danse épuisante
incluse, que son homonyme selon Taylor Hackford (1985). Pourvu d’un Pelle
plutôt recrutant que conquérant, tant pis pour Bille August, alourdi d’une
dimension de mélodrame familial, arrière, sœur bipolaire, Midsommar se résume à un
séduisant soufflé, dont le style assuré ne saurait posséder une quelconque
consistance. Trop lent pour un public adolescent, cf. les sept égarés de salle
provinciale, fissa enfuis bien avant la fin, trop languissant pour les amateurs
de sang, trop arty pour les coureurs
de hardcore, Midsommar amusera, ou pas,
les amoureux malheureux, les orphelins guère sereins, la critique auteuriste et
les champêtres féministes.
Un brin lacrymal, assez bancal, il se
termine sur un sourire de martyre, sur Dani au Paradis, ravie par la fumée
fumeuse, alter ego d’un cinéaste
content de lui-même, de son maniement maniéré de la caméra, de son métrage à la
douceur sauvage, voire l’inverse, conte cruel de la jeunesse délesté d’ivresse,
de profondeur, démonstration anémiée, sinon dispensable, d’un art de surface
qui ressasse, se situe en vase clos, à l’écart de contemporains échos, comme un
leçon de révisionnisme du rousseauisme, comme une virée endeuillée, loin de la
violence du vrai monde immonde, contre lequel se barricader, se retrancher,
quitte, ensuite, à payer le prix élevé de la consanguinité, de l’assassinat
xénophobe, de l’idyllique illusoire, thématiques précédemment prémâchées par le
M. Night Shyamalan pareillement mystificateur des enfantillages du Village
(2004).
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