Mauvaises résolutions


Champagne de campagne « en réclame », fruits de mer amers, dindons de la farce (de la Force selon Lucas, saint mesquin) à plumer, voire « fumer », jusqu’au dernier.


Il ne faut rien attendre du « nouvel an ». Il convient de ne rien espérer de cette virtualité de calendrier. Surtout pas au cinéma, moins encore au-dehors. Au minable mois de mai les camelots de la démocratie quémanderont leur monopole de médiocrité. Durant le 31 décembre 2016, l’apôtre de la « normalité », y compris homosexuelle, le roi des enterrements terroristes, le repu serein supposé socialiste se félicita oralement de son lamentable bilan. Il osa même asséner au « peuple » – chimère de petits-bourgeois bien-pensants, de gauchistes braillards, de cyniques friqués à droite – qu’il méprise, qu’il méconnaît, qu’il ne représenta jamais, des leçons de morale, de rassemblement, d’unité dans la glorieuse, survivante et bigarrée « francité ». Lui cracher à la gueule via la radio constituerait un injuste honneur. Une série de souhaits de « citoyen » (laissons la cinéphilie aux impuissants, aux passifs, aux gentils « humanistes » à vomir) révulsé à formuler : qu’il se carapate au plus vite et qu’il emporte dans ses bagages de président provincial son ministre de la Culture invisible, insipide, anonyme, par intérim. Que le guignol qui lui succédera succombe à un attentat, pas tellement « pâtissier », qu’il se voit renversé en direct et aux yeux médiatiques du monde par une insurrection massive, presque autant que les bombardements « sanitaires » de l’armée française à l’étranger. Que les films hexagonaux arrachent de leur bras exsangue la perfusion économique, étatique, publique. Qu’ils dressent un autodafé avec le « cahier des charges » télévisuel, virtuel. Que les (vrais) artistes d’ici et d’ailleurs arrêtent un peu de faire la pute, de penser à leur loyer, à leur retraite.

Que « Hollywood », Mecque abjecte, cité faussement cosmopolite, angélique, réellement fascisante, des rêves brisés, usinés, lobotomisés, s’écroule aussitôt, foudroyée par sa stupidité de rapace à la von Stroheim, dans les marais mondialisés de sa merde audiovisuelle, en écho moderne à Sodome et Gomorrhe naguère. Que les métrages, enfin émancipés du « financement participatif », du relationnel, du copinage, ne s’adressent plus à des enfants incultes, à des vieillards nostalgiques, à des « chroniqueurs » en ligne prêchant pour des « niches » aux allures de tribus de parvenus. Que les œuvres individuelles (mais collectives), que les images (rarement animées, lestées d’une âme), avec ou sans récit, personnages et moralité, possèdent définitivement des dents, qu’elles ne se soucient plus de plaire, de pérorer, de divertir, de s’engager, plutôt de mordre, dans la radieuse chair mortelle de l’existence, dans la rétine, le cerveau et le sexe du spectateur réveillé. Puisque les maîtres ne délivreront en aucune façon à leurs esclaves complices le pain ni les roses, à peine les épines et les miettes, que le goût de la rage inonde les gorges, comme le sperme salé, rémunéré, américanisé, coule dans celle de la « travailleuse du sexe » US, brave petite fille aussi vieillie que sa « profession », cristallisation candide et incarnée d’une époque ignoble, d’une éthique antinomique, d’un imaginaire délétère, stérile. Que la fièvre s’empare des caméras, syndrome en symbiose avec une planète sociale malade, en sursis, à préserver en vert telle la victime d’un « viol en réunion », histoire de s’amuser à ses dépens une poignée supplémentaire d’instants.

Ou alors, si ces appels de prophète obsolète ne suffisent pas, s’ils s’avèrent être de piètres vœux pieux un brin envieux, que la disparition apparaisse. Dans l’abolition de soi, de son écriture, de son regard, réside une séduisante promesse d’anéantissement – de renaissance ? 
                    

Commentaires

  1. Colère et Temps : https://petersloterdijk.net/oeuvre/colere-et-temps/

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    1. Ressentiment ici et maintenant :
      https://www.ledevoir.com/societe/le-devoir-de-philo-histoire/591578/devoir-de-philo-le-retour-en-force-de-la-morale-du-ressentiment

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