Le Petit Dico vache du cinéma français : Tais-toi quand tu parles


Déclarations de haine, rengaine de citations : « ça balance pas mal à Paris », oui…


Le compilateur, spécialiste d’Audiard (la quatrième de couverture pastiche la prose du dialoguiste), Belmondo, Gabin, Poiret, Ventura, du Conservatoire et des Bronzés, voulait « dresser un portrait un peu plus réaliste de cette fausse grande famille du cinéma français », « amuser le lecteur tout en faisant craquer le vernis derrière lequel acteurs et réalisateurs se cachent trop souvent ». En partie et en effet « rassurant » de franchise, le classement alphabétique s’avère également assez désolant, car personne n’en sort grandi, émetteur ou cible des amabilités rapportées, référencées. Philippe Durant parsème son anthologie de quelques notices essentiellement contextuelles et l’ensemble, vite lu, ne surprend guère, tant l’on retrouve certains « couples » célèbres, par exemple Sophie M. & Maurice P. au commissariat, Vanessa P. & Jean-Claude B. en cours de philo ou Léa S. & Abdellatif K. après la Croisette (des variantes entre hommes existent aussi, tels les duos Delon père et fils, Depardieu/Torreton ou Raimu/Pagnol), tandis que l’infatigable et fatiguant Mocky tire sur tous ceux qui bougent. Le Festival de Cannes, les César, le Splendid, une poignée de producteurs (Christian Fechner, Thomas Langmann, Ariel Zeitoun) et même une entrée élégamment intitulée « P… comme Pute » : rien de bien original ni de radical, rien qu’une litanie d’acrimonies où manquent cruellement l’esprit et le style (du théâtre autarcique de la cruauté). Que ces gens, passés les plateaux de promo, se détestent allègrement, s’insultent par lettre (Godard/Truffaut) ou ne s’adressent plus la parole et se gardent de jamais retravailler ensemble (Sophie Marceau, récidiviste avec Véra Belmont ou Tavernier), cela, nul ne l’ignorait, en vérité, le cinéma (pas seulement franco-français) tout sauf au-delà des vicissitudes relationnelles de n’importe quel milieu professionnel, l’égocentrisme et l’argent venant bien sûr compliquer les choses, accessoirement décupler les névroses.

Néanmoins, le phénomène (voire l’épiphénomène) méritait-il un livre de cent quatre-vingt-huit pages ? Que penser du « régal » (fumet de scandale) promis au lecteur ? Personnellement, la bile, le fiel et les aigreurs d’estomac ne nous intéressent pas, surtout signés par des stars et l’éventuelle dureté d’une critique – celle de The Revenant, peut-être la plus acerbe sur ce blog – déploie, n’en déplaise aux tartufes des réseaux sociaux, une analyse, une réflexion et une argumentation certes discutables, comme tout point de vue subjectif, mais inassimilables à un quelconque discours de concierge, de Café du Commerce, de commentateur illettré titillé par les Likes, bien planqué sous son pseudonyme et son avatar risibles. Le sieur Durant, à son corps pas défendant, évoque un peu un éboueur (amateur, scrutateur) chargé de son plein gré de la collecte des ordures orales du gotha du « septième art » hexagonal. Il préfère les « anecdotes » aux « explications de texte », se moque des « motivations des personnages » et se focalise sur la façon « dont une scène a été filmée, avec difficultés à la clé » – on ne songera pas à lui contester ce double droit. Le cinéma français (nous ne l’épargnons pas, nous le célébrons parfois), indéniablement admirable, immensément méprisable (car méprisant, hier et dorénavant), méritait cependant à la fois mieux (étudier la dialectique actrice-réalisateur) et pire (un vrai dévoilement de ses petits arrangements hypocrites à l’ère médiatique, à l’heure du numérique) que cet ouvrage inoffensif, national jusqu’à la caricature (infantile souci des propos/avis d’autrui), acquis neuf dans un bazar provincial à un euro cinquante au lieu des quinze originaux (prix modeste, mérité, « vecteur d’achat », voilà). En matière de rouge et de noir, de coup de couteau au cœur (cf. la couverture), choisissons, sans une once d’hésitation, d’en rester à Stendhal, allez.     
        

Commentaires

  1. « On peut avoir le regard intelligent quand on est bête. Voyez Delon. »
    Béatrice Dalle, allez on ne va pas se priver, ce genre de pics ça vaut que dalle ou presque, dans ce milieu de paillettes et de gens qui aiment jouer de l'image...Et pour alléger et oublier la bande du Splendid dans ses débordements( l'oubli de la mémoire d'Anémone aux derniers Césars) , restons dans le strass avec Donatella Rettore Splendido Splendente
    https://www.youtube.com/watch?v=wlzpDOSqVCg

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