Violettes impériales
Un métrage, une image : Fandango (1949)
Vous voulez un ouvrage estival ?
À défaut du fandango de Bernard Herrmann (La Mort aux trousses, Alfred
Hitchcock, 1959), voici celui de Francis Lopez. Tourné à la Victorine, donc à
Nice, Fandango (Emil-Edwin Reinert, 1949) ne se déroule pas au Pays
basque, tant pis pour ce qui s’écrit en ligne, plutôt aux environs de Falicon
(06), pourtant l’un des deux personnages principaux, prénommé Luis, amateur
mécano, déclare venir d’Irun : double détail autobio de Mariano, né au
même endroit, au garagiste papa. Deux ans avant L’Auberge rouge (Claude
Autant-Lara, 1951), un « pont d’or » n’y sème la mort mais y détourne
idem les touristes sudistes en
direction d’un établissement au succès sous peu assuré par un prévu tracé, à
l’inverse de la solitude très désaxée du motel
de Norman Bates (Psychose, Hitchcock, 1960). Le serveur subito licencié, assorti de sa simplette dulcinée, se transforme
fissa en petit capitaliste complice, en arnaqueur au cynisme inoffensif et démuni
de noirceur. Néanmoins, « bien mal acquis », comme on dit, son magot
planqué derrière une nuptiale photo finira dans la poche d’un parisien escroc, in extremis
magnanime, gardez donc mon auto, le flic Robert Dalban ne frime. Entre
nonchalance et romance, chômage et ramage, superstition et promotion, Raymond
Bussières s’aère, Antoinette Poivre fait la réclame, Luis Mariano transcende
une sérénade en bel canto, Ludmilla Tcherina danse en silence, cela va de soi.
Pas encore consacré par ses réussites en série sur scène et au ciné, le
chanteur charmeur, interprète point obsolète, s’amourache d’Angelica, remplace
(mal) l’amical et remercié François, apprécie la pluie, ramasse, au propre et
au figuré, de jolies jumelles, en vérité vendeuses de violettes et non stars du Splendid, déplore le précité
piège, monte même en manège. Porté par une équipe soignée – ici en compagnie de
Gérard Carlier & Jean-Paul Le Chanois, André Tabet va dialoguer Ali
Baba et les Quarante Voleurs (Jacques Becker, 1954), Le
Corniaud et La Grande Vadrouille (Gérard Oury, 1965 + 1966), Roger Dormoy
éclaira Les Eaux troubles (Henri Calef, 1949), Napoléon (Sacha Guitry,
1955), Boulevard (Julien Duvivier, 1960), Victoria Mercanton va
souvent monter les œuvres de Roger Vadim –, l’opus d’un type cosmopolite se suit avec le sourire et sans
déplaisir. À Monaco, notre duo décroche le gros lot, s’en revient vite au
village, vive la « biquette » et la « ballerine ». Jamais
mesquin, délesté de la discrimination des vaccins, Fandango cartographie une
France d’outre-enfance, peut accompagner un pertinent apéro, prodigue une
détente ludique, non nostalgique, s’avère solaire, pas réactionnaire, divertit
aujourd’hui.
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