La Nuit des grands chiens malades

 

 « Roman noir » à « lac Noir » ? Romance de seconde chance…

Écrivain stakhanoviste, Dominique Arly alimenta donc deux collections du Fleuve noir, Angoisse + Spécial Police à savoir, aussi se divertit via plusieurs polissonneries aux titres explicites, Elles disent toutes oui, L’Auberge rose, Bonne à tout faire je cite, itou sévit, instituteur un jour, instit pour la vie, dans un domaine désormais dénommé « littérature jeunesse », peste. Conseillé par un certain Frédéric Dard, le voilà dare-dare à rédiger de multiples polars, dont encore Les Raisins de la mort, whodunit viticole carrément contemporain du film homonyme de Jean Rollin, sorti en 1978, avec lequel il n’entretient néanmoins aucun lien, sinon celui d’une œnologie de terroir propice « à vous dégoûter du pinard », en effet, comme le résume un docte gendarme descendu de sa chouette « Estafette ». Si la première partie du bref bouquin presque malin, jamais crétin, se soucie de sociologie, avec la mise en abyme d’une étudiante étasunienne éprise des mœurs rurales, la seconde se préoccupe des suspects de Savoie, cela va de soi. Vite pondu, vocable idoine, vite lu, Les Raisins de la mort constitue un divertissement d’antan assez divertissant, satirise ses « indigènes » gentiment, abîme de manière inoffensive le petit peuple du « pays des Abîmes », que l’auteur connaissait depuis sa naissance et ensuite sa résidence. Par ailleurs narrateur, un type timide, sentimental, boiteux, mène le jeu dangereux, en compagnie d’une auto-stoppeuse venue travailler aux vendanges, future licenciée en histoire et géographie, future assommée abusée, tant pis. Les amateurs de la série Police des mœurs peuvent aller s’astiquer ailleurs, puisque ici un pudique soupçon d’érotisme suffit, la « cousine » mutine et taquine s’en charge au pas de charge. Choc des cultures sur fond de biture, opus de promiscuité partagée, « roman de gare » plutôt que de « série noire », enquête en tandem conduite à proximité d’insipides flics, Les Raisins de la mort dépeint doté d’une discrète empathie sa troupe de hippies confrontée in fine à la folie et à la fatale félicité du tartufe Félicien, ravisseur, violeur et assassin porté sur la réparation et de caves « en enfilade », la troisième à l’ouverture dissimulée, la fielleuse et fiévreuse fréquentation. Écrit sans chichis, sans trop d’a priori, Les Raisins de la mort n’exige d’accord nul effort et se suit cependant en souriant, suite de chapitres courts succédés en rythme toujours. Il s’agit ainsi d’une machine lexicale tout sauf bancale, qui fait l’éloge de l’imperfection, a fortiori physique, qui du « naufrage » de la vieillesse, oui ou non gaulliste, effectue le constat objectif. « L’anormalité » de Roselyne, hommasse homosexuelle à main armée, attristera certes les révisionnistes VRP du lobby LGBT, mais Dominique Arly au fond se contrefiche d’homophobie autant que d’ethnographie, concocte un cru pas si malvenu, à siroter en été...

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