Les Merveilles : L’Apiculteur


Suite à son visionnage sur le site d’ARTE, retour sur le titre d’Alice Rohrwacher.


La réalisatrice trentenaire (flanquée de sa sœur actrice), originaire de Toscane, ancienne universitaire (littérature et philosophie) formée au cinéma à Turin, connaît-elle le film de Theo Angelopoulos, L’Esprit de la ruche de Víctor Erice ou Candyman de Bernard Rose ? « Me ne frego », affirmait il (pas vraiment) caro Benito. Elle délivre en deuxième salve, en Ombrie de fiction, une chronique adolescente, apicole et en partie autobiographique assez anodine (très généreux prix à Cannes), digérant maladroitement et interminablement disons La dolce vita (ruralité versus vulgarité, autarcie face à l’horizon), L’Effrontée (fascination d’une apparition, Monica Bellucci en Brunehilde magnanime et méta), L’Été où j'ai grandi (fantastique du réel, présence anxiogène des adultes) ; la famille devient une ruche dépareillée mais solidaire et la puberté un espace d’émancipation féminine : Gelsomina (oui, comme dans La strada), Électre souriante, vaillante, opposante éprise de son papa, s’endort sur un avatar « étrusque » de L’Île des morts de Böcklin, enlacée à un « délinquant » allemand mutique (bien que siffleur) et le métrage s’achève par un souffle d’air au sein d’une ferme fantomatique. L’Italie de 2014, celle-là, en tout cas, à la fois altermondialiste et berlusconienne, régionaliste et cosmopolite (polyglottisme de co-production), entre dettes et dromadaire, semble se survivre à elle-même, encore un peu sensuelle et cependant déjà disparue sur la (dé)route d’une mémoire muette, commercialisée, littéralement mise dehors, hors de la maison (ou du harem), processus consumériste et funeste autrefois décrit a contrario, en huis clos, à Salò, au plus près de sa « cruauté », par Pier Paolo Pasolini l’enragé. Dans ce constat doux-amer de cimetière solaire réside la meilleure part (ou « jeunesse » à la PPP) d’une version 2.0 de la manière néo-réaliste, tout sauf honteuse – malgré une exposition « scatologique » (pas sadienne) accolée à une ouverture masculine rapportée, chasse nocturne en préambule d’une chasse d’eau, so (seau de miel à changer) – et pour autant, assurément, loin d’être merveilleuse.     


          

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les Compagnons de la nouba : Ma femme s’appelle Maurice

La Fille du Sud : Éclat(s) de Jacqueline Pagnol

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot : Le Trou noir