La Dernière Mise : La Nouvelle Ève


Kailey correspond avec son fiston par l’intermédiaire du paternel Rip Torn ; le spectateur, pris dans un insondable ennui, ne désire qu’écrire sur/à l’actrice principale…   


Doté d’un titre original technique et poétique (Turn the River), ce téléfilm cacochyme caricature les travers du cinéma dit indépendant via la langue poussive de parvenu du mainstream des studios (champs-contrechamps, petites saccades en porté, glissements circulaires de steadicam). On ignore si l’acteur Chris Eigeman connaît L’Arnaqueur, le beau film désespéré de Robert Rossen, indépassable sommet d’un « sous-genre » dédié à tous les magnifiques perdants de la vie, au billard et ailleurs, mais il ne sait assurément ni écrire un scénario ni se servir d’une caméra. Le drame maternel, de l’épaisseur d’un billet d’autocar (pour le Canada, éden frontalier jamais atteint), aux allures de conte de fées transposé dans le réalisme dépressif de l’époque, avec sa fin faussement ouverte en signe arrogant et paresseux de récit supposé adulte, repose sur une grand-mère bigote et retorse, mise à jour maladroite de la marâtre de naguère.

Devant l’objectif, la grande (par sa taille, par son talent) Famke Janssen, assez justement primée, remarquable et remarquée chez Clive Barker épris de son Maître des illusions, enfin débarrassée de l’encombrante panoplie de femme fatale (à la James Bond, remember l’étranglement érotique de Pierce Brosnan par l’Amazone SM), de Jean Grey/Phoenix (ersatz cyniques de la Marvel à des années-lumière d’enfance des mélodrames choraux de Chris Claremont) ou d’ex-femme de Liam Neeson dans la risible trilogie du kidnapping selon Besson, fait ce qu’elle peut afin de ranimer un personnage (écrit spécialement pour elle) de mère épuisée, éloignée, vengeresse et à peine fugitive (jolies scènes avec le juvénile et juste Jaymie Dornan, gamin maltraité par son papa, ancien séminariste enragé par l’ombre castratrice de sa génitrice).

En fan de la dame néerlandaise (on aimerait bien découvrir son opus de réalisatrice, l’ignoré Bringing Up Bobby, sur une trame similaire, apparemment), il faudra se contenter de cela, en preuve inutile, démonstrative et arty, de son charisme et de sa sensibilité, qui rappellent ceux d’une Linda Fiorentino, autre femme et actrice bien trop intelligente et indépendante pour être entièrement adoubée par l’usine hollywoodienne, surtout contemporaine, si conformiste, dérisoire, méprisante et méprisable dans son obsession mercantile et misogyne du jeunisme…    

Bonus infra : Famke Janssen évoque alors avec humour et lucidité La Dernière Mise, le jeu (sur le tapis vert, sous les projecteurs), sa carrière et son rapport aux blockbusters.


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